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A Bahreïn, élection d’un nouveau Parlement sans voix dissidente

Les Bahreïnis, dont le pays accueille la cinquième flotte américaine et une base britannique, votaient samedi pour élire un nouveau…

Les Bahreïnis, dont le pays accueille la cinquième flotte américaine et une base britannique, votaient samedi pour élire un nouveau Parlement, un scrutin qui se déroule sans les principaux groupes d’opposition, interdits par le pouvoir.

Les 54 bureaux de vote dans le petit royaume du Golfe doivent fermer à 20H00 locales (17H00 GMT).

Au total, 293 candidats, dont 41 femmes, se disputent les 40 sièges du Parlement et les votes des 350.000 électeurs. Un scrutin municipal coïncide avec l’élection parlementaire.

Alors que certains électeurs ont reçu des SMS assurant que leur nom avait été barré de la liste électorale, le ministère de l’Intérieur a appelé samedi les Bahreïnis à « ne pas prêter attention aux rumeurs », accusant l’Iran d’interférer dans le processus électoral.

Ces informations sont erronées, a-t-il assuré. Le ministère a accusé Téhéran d’être à l’origine de 40.000 SMS envoyés à des citoyens bahreïnis, « visant à nuire » aux élections, et précisé que d’autres messages provenaient de personnes se trouvant à l’intérieur du royaume.

Le pouvoir à Manama, allié clé des Etats-Unis dans la région et de l’Arabie saoudite, accuse régulièrement l’Iran chiite, qui dément, de provoquer des troubles dans le royaume.

L’absence des candidats des deux principaux groupes interdits de l’opposition, Al-Wefaq (chiite) et Waad (laïc), a suscité des appels au boycott des élections.

Les résultats sont attendus en principe dimanche mais les experts ne s’attendent pas à des changements.

– « Réduits au silence » –

Les dernières législatives, en 2014, avaient été boycottées par l’opposition qui les avaient qualifiées de « farce ».

Bahreïn a été secoué par des troubles à partir de 2011, lorsque les forces de sécurité ont réprimé les protestations de la communauté musulmane chiite qui réclamaient une monarchie constitutionnelle et un Premier ministre issu de la majorité parlementaire.

Le pays, qui compte environ 1,4 million d’habitants, est gouverné par des sunnites. Sa population est majoritairement chiite, selon des estimations non officielles contestées par le gouvernement.

En amont du vote, la répression contre les voix dissidentes s’est intensifiée, a affirmé l’ONG Amnesty International, soulignant sa grande « inquiétude » face au sort d’opposants « emprisonnés, intimidés et réduits au silence ».

Avant le scrutin, au moins six personnes ont été arrêtées et inculpées pour « obstruction au processus électoral », selon le procureur.

L’un d’eux, Ali Rachid al-Achiri, ancien député d’Al-Wefaq, a tweeté que lui et sa famille boycotteraient les élections, selon le Bahrain Institute for Rights and Democracy, basé à Londres.

Le 4 novembre, le cheikh Ali Salman, ancien chef d’Al-Wefaq, a été condamné à la prison à vie pour « intelligence » avec le Qatar, un jugement qualifié de parodie par des défenseurs des droits de l’Homme.

Comme lui, des centaines d’opposants, majoritairement chiites, ont aussi été déchus de leur nationalité, et des dizaines d’autres emprisonnés.

Et une loi promulguée en juin a interdit aux dirigeants et membres des mouvements dissous Waad et Al-Wefaq de se présenter aux élections.

– Pas de changement –

En éradiquant toute source de contestation, le pouvoir a fait perdre à ce scrutin « toute signification pratique et politique », juge Neil Partrick, dont les recherches se concentrent sur le Golfe.

La chambre basse du Parlement, qui compte 40 sièges, a le pouvoir d’examiner et d’adopter les projets de loi proposés par le roi ou le gouvernement, mais la chambre haute, ou Conseil consultatif, formée de personnalités nommées par le roi, a le pouvoir de les bloquer.

Sensibles aux appels de boycott, de nombreux Bahreïnis « ne prendront simplement pas la peine de voter », estime Jane Kinninmont, spécialiste du Golfe durant des années à l’Institut Chatham House à Londres.

Pour elle, « les élections ne changeront pas grand-chose puisque la quasi-totalité des partis d’opposition sont désormais interdits et leurs dirigeants emprisonnés ».

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