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Afghanistan: les talibans annoncent la mort du fondateur du redouté réseau Haqqani

Il avait fait ses armes contre les Soviétiques puis rejoint les talibans et fondé le groupe insurgé le plus redouté…

Il avait fait ses armes contre les Soviétiques puis rejoint les talibans et fondé le groupe insurgé le plus redouté d’Afghanistan: Jalaluddin Haqqani, dont les talibans ont annoncé la mort mardi, était une figure-clé du conflit qui ravage le pays depuis 40 ans.

« Tout comme il a enduré de grandes épreuves pour la religion d’Allah durant sa jeunesse et alors qu’il était en bonne santé, il a également enduré une longue maladie pendant ses dernières années », selon un communiqué des talibans afghans annonçant son décès sur Twitter.

Sa famille a également confirmé sa mort mardi dans un message transmis à des journalistes, dont l’AFP.

Jalaluddin Haqqani, qui était sans doute septuagénaire ou octogénaire, avait fondé dans les années 1980 le réseau éponyme, constitué pour lutter contre la présence de l’URSS en Afghanistan et devenu depuis le réseau insurgé le plus redouté du pays, accusé de la mort de centaines de civils dans des attentats-suicides.

Un commandant taliban proche de la famille Haqqani, a indiqué à l’AFP que Jalaluddin Haqqani est décédé dimanche et a été enterré lundi « entouré d’un nombre limité de commandants talibans et de membres de sa famille ».

« Il était vieux, malade et faible et souffrait constamment de la poitrine », a-t-il précisé.

Des rumeurs avaient annoncé sa mort à plusieurs reprises, dès 2008 puis en 2015, sans jamais avoir été confirmées par les talibans.

Signe peut-être que ces rumeurs n’étaient pas infondées, une autre source haut placée talibane a affirmé mardi à l’AFP « que Jalaluddin Haqqani est mort en 2015 au Pakistan » et « a été enterré à Peshawar ».

Selon cette source, les talibans n’avaient pas rendu sa mort publique car dans la même période ils avaient annoncé le décès de leur chef, le mollah Omar, et ne souhaitaient pas divulguer ces deux importantes pertes dans le même temps.

Ils souhaitaient également attendre afin de savoir si son fils, Sirajuddin Haqqani, qui a pris alors les rênes du réseau, était « capable de diriger le groupe », selon cette source.

– Peu d’influence –

L’annonce de sa disparition, qui était attendue, ne devrait toutefois avoir que peu d’impact sur l’évolution de la situation dans la région.

« Depuis qu’il était malade et alité ces dernières années, il n’était plus en mesure de diriger le groupe et sa mort ne l’affectera en rien. Ses fils avaient déjà pris la relève et dirigent les opérations », a estimé auprès de l’AFP l’analyste politique afghan Atta Noori.

« Le réseau Haqqani va rester la branche la plus meurtrière des talibans et continuer à frapper comme par le passé car leur principal objectif opérationnel est de freiner l’influence indienne et américaine en Afghanistan », a-t-il ajouté.

« Je doute que son décès change quelque chose », a renchéri un diplomate étranger à Kaboul sous couvert d’anonymat. Son fils Sirajuddin dirige le réseau « avec un soutien important de l’ISI » (l’Inter Services Intelligence, les services secrets du Pakistan), a-t-il ajouté.

Longtemps soupçonné d’être lié à l’establishment militaire de l’ombre du Pakistan, le réseau Haqqani avait été décrit dès 2011 par l’amiral américain Mike Mullen comme un « véritable bras armé » du renseignement pakistanais.

Les Etats-Unis ont annoncé samedi l’annulation de 300 millions de dollars d’assistance sécuritaire au Pakistan, exaspérés par son soutien présumé à des groupes extrémistes. Le sujet sera au menu de la visite du secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo prévue cette semaine au Pakistan.

– Chef de guerre –

Jalaluddin Haqqani a fondé le réseau éponyme dans les années 1980 afin de lutter contre la présence de l’URSS en Afghanistan, avec l’aide des Etats-Unis et du Pakistan.

Chef militaire moudjahidine respecté, il est nommé en 1989 à la tête d’une commission sur la formation d’un gouvernement intérimaire afghan, puis tentera vainement de mettre fin à la guerre civile (1992-1996), à laquelle il ne prendra pas part.

Il sera néanmoins le principal responsable d’une dévastatrice offensive talibane menée fin 1996 contre l’Alliance du Nord (coalition anti-taliban) dirigée par le commandant Massoud, assassiné par Al-Qaïda le 9 septembre 2001.

Proche du mollah Omar dans sa vision d’un islam ultra-conservateur, il a été ministre sous le régime des talibans dans les années 1990, avant de se tourner après leur chute en 2001 contre les forces américaines et l’Otan.

Faction des talibans afghans proche d’Al-Qaïda, le réseau Haqqani a mené de nombreuses attaques en Afghanistan. Il est également soupçonné de liens avec l’organisation Etat islamique (EI) responsable de sanglants attentats dans la capitale afghane.

Désignés comme groupe terroriste par les États-Unis, les Haqqanis sont connus pour leur utilisation massive d’attentats-suicide à la bombe.

Réputé proche des monarchies du Golfe et des services secrets pakistanais, le réseau Haqqani a pendant longtemps bénéficié des largesses de ces généreux sponsors.

La continuité du réseau est assurée par la descendance de Jalaluddin Haqqani qui a eu 10 enfants avec deux épouses. Quatre d’entre eux sont décédés et un a été arrêté.

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