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Armes chimiques: L’OIAC traverse une « période difficile », selon son patron

L'organisation pour l'interdiction des armes chimiques, chargée de débarrasser le monde de ces armes apparues pendant la Première Guerre mondiale,…

L’organisation pour l’interdiction des armes chimiques, chargée de débarrasser le monde de ces armes apparues pendant la Première Guerre mondiale, traverse une « période difficile » après une série d’attaques et doit s’adapter à cette « nouvelle ère », estime son patron dans un entretien à l’AFP.

Attaques chimiques répétées en Syrie depuis 2013, ex-agent russe empoisonné à l’agent innervant Novitchok en mars en Angleterre, empoisonnement au VX du demi-frère du dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un en Malaisie en 2017: la multiplication du recours à l’arme chimique est « inquiétante », juge Fernando Arias, directeur-général de l’OIAC à quelques jours d’une réunion-clé de l’organisation.

« Nous traversons une période difficile », convient-il mardi, dans son bureau de La Haye.

En juin, la Russie a comparé l’organisation à un Titanic « en train de couler », après la décision d’une majorité des 193 Etats membres de renforcer les pouvoirs de l’organisation en l’autorisant à désigner l’auteur d’une attaque chimique et non plus seulement à documenter l’utilisation d’une telle arme.

Deux mois plus tôt, les autorités néerlandaises ont appréhendé et expulsé quatre agents russes qui préparaient une cyberattaque visant le siège de l’OIAC, peu après la tentative d’empoisonnement de l’ex-agent russe Sergueï Skripal à Salisbury, pour laquelle Londres accuse la Russie.

« Ce que je peux dire est que le sentiment général des Etats membres est que l’OIAC est plus nécessaire que jamais », avance le diplomate espagnol.

« Ce que nous vivons maintenant est temporaire, les conflits commencent et se terminent mais l’organisation demeure », dit-il à propos de l’OIAC, lauréate du prix Nobel de la Paix en 2013. « L’organisation est bien plus que la Syrie – la Syrie est bien sûr un sujet important, Salisbury est bien sûr un sujet important – mais elle est bien plus que cela ».

Mais, « au lieu de dire +nous avons tellement de difficultés+, nous nous adaptons à cette nouvelle ère ».

L’OIAC est chargée de superviser l’application de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques (CIAC), entrée en vigueur en 1997, qui interdit la production et le stockage d’armes chimiques.

– Besoin d’équipements –

Elle a contribué à éliminer 96% des stocks mondiaux déclarés d’armes chimiques et a été chargée de mettre en oeuvre l’accord russo-américain de 2013 prévoyant l’élimination par la Syrie de son arsenal.

Mais la poursuite d’attaques chimiques en Syrie et l’empoisonnement de Sergueï Skripal notamment ont conduit les Occidentaux à renforcer l’organisation.

La réunion qui débute lundi à La Haye vise à mettre en place l’instrument qui permettre d’attribuer les responsabilités d’une attaque, « une tâche difficile », selon Fernando Arias.

L’OIAC est en train de mettre en place une équipe d’attribution pour la Syrie et une « mission de réponse rapide » pour tout recours à l’arme chimique ailleurs dans le monde », explique-t-il. Mais l’organisation a selon lui besoin de « plus de ressources, d’expertise et d’équipements ».

Opposé à ce renforcement, Moscou a menacé de se retirer de l’OIAC. La Russie est « un pays très important et a toujours eu un rôle important dans l’organisation », plaide le directeur-général.

Il est indispensable d’essayer de maintenir tout le monde à bord, quelles que soient les tensions politiques, argue-t-il, comparant son rôle à celui d’un « médiateur ».

Alors que vient d’être célébré le centenaire de la fin du premier conflit mondial, qui a vu l’arme chimique utilisée pour la première fois en 1915, Fernado Arias juge important d’avoir une perspective historique sur le rôle de l’OIAC.

« Mourir dans une attaque à l’arme chimique est horrible. Nous devons retenir la leçon », met-il en garde.

La multiplication récente du recours à l’arme chimique est donc « inquiétante sans aucun doute », juge-t-il. « Mais en même temps, nous avons les outils pour réduire les risques ».

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