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Au Burkina Faso, la difficile lutte pour sauver les enfants du paludisme

"On souffrait beaucoup avec la prise en charge des enfants malades du paludisme, mais depuis le début de la +CPS+,…

« On souffrait beaucoup avec la prise en charge des enfants malades du paludisme, mais depuis le début de la +CPS+, le nombre de cas a considérablement diminué », déclare à l’AFP Tasséré Zongo, leader religieux à Soa, un village du centre du Burkina Faso.

Le programme de chimio-prévention du paludisme saisonnier (CPS), est l’élément-clé de la stratégie lancée depuis cinq ans par les autorités sanitaires burkinabè pour tenter de faire chuter la mortalité des enfants de moins de cinq ans, particulièrement vulnérables à cette maladie endémique en Afrique.

Associée à la distribution aux familles de moustiquaires imprégnées d’insecticide, la distribution systématique de médicaments préventifs pour les jeunes enfants pendant les quatre mois de la saison des pluies – lorsque le paludisme flambe en raison de l’augmentation de la population de moustiques- a fait nettement baisser le nombre de malades dans ce pays qui figure parmi les plus pauvres du monde.

Selon le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP), le nombre de cas de « palu » chez les enfants burkinabè de moins de cinq ans a baissé de 29% (de 300.000 à 215.000) et le nombre de décès de 24% (de 4.200 à 3.200) de 2014 à 2018.

Des résultats encourageants, mais le coordonnateur du PNLP, le docteur Yacouba Savadogo, ne s’avoue pourtant « qu’à moitié satisfait ».

Le paludisme est une des maladies les plus anciennes et les plus dévastatrices sur le continent africain. Causée par des parasites transmis par les piqûres de moustique, le paludisme cause d’abord une forte fièvre, des maux de tête et des courbatures, puis peut évoluer vers une anémie sévère, une détresse respiratoire, et atteindre les organes ou le cerveau s’il n’est pas rapidement traité.

Quelque 219 millions de personnes ont été infectées dans le monde en 2017, 435.000 en sont mortes. Plus de 90% des victimes sont africaines, selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Pays sahélien de 20 millions d’habitants, le Burkina Faso n’échappe pas à la maladie, et les jeunes enfants y représentent les trois quarts des décès, succombant parfois en 24 heures.

– Sauver jusqu’à 80% des vies –

Recommandée par l’OMS en 2012, « la CPS consiste à administrer à titre préventif une combinaison d’antipaludéens (amodiaquine et sulfadoxine-pyriméthamine) à action prolongée aux enfants de moins de cinq ans, à raison de trois jours consécutifs par mois de juillet à octobre », explique le Dr Savadogo.

La CPS a été étendue progressivement à tout le pays et couvre désormais 3,5 millions de jeunes Burkinabè, soit 99% d’entre eux, selon le médecin. Formés par des infirmiers, 17.000 agents de santé communautaires, bénévoles, distribuent les médicaments chaque mois.

« Les populations sont régulièrement informées de la campagne. Des appréhensions existent chez certains notamment sur les effets secondaires des médicaments mais après de longs échanges, les parents finissent par comprendre », témoigne Jephté Tiendrébéogo, un agent communautaire à Koubri, un village situé à une vingtaine de km de Ouagadougou.

Parallèlement, l’Etat burkinabè a instauré en 2016 la gratuité pour les enfants, ce qui a beaucoup amélioré l’accès aux soins, notamment dans les campagnes, selon le Dr Savadogo.

Pour autant, les espoirs initiaux sont loin d’être atteints.

« Lors des études expérimentales, la CPS avait permis de réduire le nombre de cas de paludisme et de décès de 75 à 80% », indique le Dr Savadogo. « Mais la mise en application sur le terrain est difficile ».

D’abord, si 80% des familles burkinabè disposent de moustiquaires, à peine la moitié d’entre elles les utilisent.

Quant à la CPS, les enfants ne la prennent pas correctement. Les agents de santé leur font bien prendre la première dose, mais ce sont les parents qui doivent administrer les deux suivantes, et c’est là que le bât blesse, explique le Dr Savadogo.

« Il faudrait que les trois doses soient prises sous la surveillance des agents de santé. Si le traitement est bien suivi, on pourrait sauver jusqu’à 80% des vies », espère-t-il.

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