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Aux Comores, la campagne référendaire sans embûche du président Azali

La région de "Mboudé vote oui". Sur la grand place de leur village du nord-ouest des Comores, les hôtes de…

La région de « Mboudé vote oui ». Sur la grand place de leur village du nord-ouest des Comores, les hôtes de la caravane du président ont affiché la couleur. Lundi, ils soutiendront comme un seul homme sa réforme contestée de la Constitution.

A la tête de l’archipel pauvre de l’océan Indien depuis son élection en 2016, Azali Assoumani a convoqué les électeurs le 30 juillet pour leur faire approuver un texte qui lui permettrait, entre autres, de rempiler pour dix ans de plus.

Les adversaires politiques de l’ancien putschiste l’accusent depuis des mois de dérive autoritaire et ont choisi de boycotter le scrutin, qu’ils jugent « illégal ».

Leur décision a ouvert au chef de l’Etat un boulevard politique sur lequel il n’a pas manqué de s’engouffrer.

A quelques jours du vote, il fait aujourd’hui étape à Ntsaouéni, paisible chef-lieu côtier de la région du Mboudé, sur l’île de la Grande-Comore. Chemise orangée et collier de jasmin autour du cou, il déroule ses arguments à une foule bariolée, sagement assise sur des chaises de plastique blanc.

« Nous proposons une révolution des idées qui permettra au pays de se débarrasser des obstacles sur sa route vers le développement », lance Azali Assoumani.

Fraîchement dévoilé, son projet de révision constitutionnelle modifie le régime de la présidence tournante instauré en 2001, qui a permis de ramener le calme dans l’archipel après une série de crises séparatistes et de coups d’Etat.

Ce système attribuait successivement la présidence à un candidat de chacune des trois îles du pays, élu pour un mandat unique de cinq ans.

Si le oui l’emporte lundi, le chef de l’Etat a promis de remettre son mandat en jeu et d’organiser dès 2019, selon les nouvelles règles, une élection présidentielle anticipée à laquelle il sera candidat.

Son projet prévoit aussi la suppression des trois postes de vice-présidents des Comores, celle de la Cour constitutionnelle et fait de l’islam la « religion d’Etat » du pays, à 99% musulman.

Sur le dais dressé entre les maisons qui encerclent la grand place de Ntsaouéni, les orateurs se succèdent au micro pour louer les vertus de la réforme.

– « Pour l’avenir » –

« C’est un référendum pour l’avenir du pays », assure le ministre des Finances Said Ali Said Chayhane. « La nouvelle Constitution est une arme contre la pauvreté, une voie pour des Comores émergentes à l’horizon 2030. »

Battu par Azali Assoumani en 2016, Achirafi Said Hachim s’est rallié à sa cause et vante aujourd’hui son « esprit éclairé ».

« Azali est le Kylian Mbappé de la politique », s’enflamme l’industriel Mihidhoir Sagaf, qui assimile l’art du louvoiement politique prêté au chef de l’Etat à celui des dribbles du jeune footballeur sacré champion du monde avec la France.

Au pied de la tribune, les envolées des courtisans ne suscitent que quelques youyous polis.

La chaleur étouffante, peut-être. Sous couvert de l’anonymat, un universitaire suggère une autre explication. « Nous sommes ici pour la cuillère », lâche-t-il. En clair, les habitants sont venus grossir les rangs de peur de perdre leur emploi.

Sous l’oeil vigilant de leurs voisins de chaise, les spectateurs récitent leur leçon sans fausse note.

« Si la nouvelle Constitution est appliquée, la vie des Comoriens va s’améliorer », estime, péremptoire, Abdoussalam Halidi, « j’appelle tous les citoyens et toutes les citoyennes à venir voter +oui+ pour nous puissions bâtir les Comores émergentes ».

« La nouvelle constitution renforce la stabilité politique », renchérit Maoulida Mmadi, « au lieu de gouverner cinq ans, le président va pouvoir le faire dix ans ».

Une perspective « dangereuse » pour l’opposition, qui dénonce depuis des mois la « dictature » du président.

Devant les habitants de Ntsaouéni, le chef de l’Etat n’a laissé à personne d’autre le soin de balayer leurs critiques. « On les (l’opposition) a invités au référendum, ils ne veulent pas y participer, on ne peut pas les forcer », raille-t-il.

« Lundi, votons le oui ! », conclut Azali Assoumani. Sûr de lui, il anticipe, selon son entourage, une victoire des « oui » à 90%.

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