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Beate Zschäpe, insondable néonazie à l’épreuve de la justice

Beate Zschäpe, qui attend mercredi le verdict des juges concernant son rôle dans une dizaine de meurtres racistes, reste une…

Beate Zschäpe, qui attend mercredi le verdict des juges concernant son rôle dans une dizaine de meurtres racistes, reste une énigme en Allemagne malgré plus de cinq ans de procès, marqués par son quasi-mutisme sur les faits.

Présentée par certains médias comme « l’incarnation du mal », cette Allemande de 43 ans à l’allure juvénile risque une peine de prison à perpétuité assortie d’une période de sûreté à l’issue de l’un des plus grands procès de crimes racistes de l’après-guerre en Allemagne.

Malgré la gravité des crimes qui lui sont reprochés et la douleur exprimée à la barre par les proches des victimes, elle est restée des années durant murée dans son silence avant d’assurer à la clôture des débats, début juillet, que l’idéologie d’extrême droite n’avait « vraiment plus aucune importance pour elle ».

Et il a fallu attendre deux ans et demi d’audience pour qu’elle s’adresse pour la première fois à ses juges dans une lettre lue par l’un de ses avocats.

Elle rejette alors toute responsabilité dans le meurtre de huit Turcs ou personnes d’origine turque, d’un Grec et d’une policière allemande, tués entre 2000 et 2007, deux attentats à l’explosif contre des communautés étrangères et une quinzaine de braquages.

Les meurtres racistes visaient des petits commerçants, la plupart turcs ou d’orgine turque, dans toute l’Allemagne.

« Je n’ai été impliquée ni dans la préparation, ni dans la commission » de ces crimes qui ont beaucoup choqué l’Allemagne quand ils ont été découverts, affirme-t-elle.

Elle explique s’être résignée et ne pas avoir eu le courage de quitter ses deux acolytes, auteurs des meurtres et qui se sont suicidés en novembre 2011 alors qu’ils s’apprêtaient à être découverts par la police.

– Jeux vidéos et vin mousseux –

Elle raconte s’être distraite avec des jeux vidéos et avoir bu trois à quatre bouteilles de vin mousseux par jour pendant que ses deux complices, Uwe Mundlos et Uwe Böhnhardt, commettaient leurs forfaits.

Mais l’accusation a rejeté en bloc sa vision des faits, assurant au contraire qu’elle a activement fomenté ces crimes racistes. Le ministère public a brossé le portrait d’un être « froid et calculateur pour lequel la vie humaine ne joue aucun rôle ».

Au premier jour de son procès, en mai 2013, alors que les médias du monde entier se précipitaient à Munich, elle tournait ostensiblement le dos aux équipes de télévision et photographes admis quelques minutes dans la salle d’audience.

En se rendant à la police le 8 novembre 2011, Beate Zschäpe avait mis un terme à près de 14 années de vie clandestine.

Quatre jours plus tôt, Uwe Mundlos et Uwe Böhnhardt, avec qui elle a tour à tour entretenu une liaison, s’étaient donné la mort, sonnant le glas de leur groupuscule néonazi, Clandestinité national-socialiste (NSU).

L’Allemagne entendait alors pour la première fois parler de ce groupuscule et découvrait peu à peu les nombreux dysfonctionnements dans l’enquête, notamment des renseignements intérieurs qui ont surveillé le trio sans l’inquiéter.

Pendant des années, cette femme originaire de l’ex-RDA, seule témoin encore en vie d’une des séries meurtrières les plus sanglantes de ces dernières décennies, a joué la voisine polie, volontiers considérée comme « une bonne âme » par ses amies ou connaissances. Très loin de l’image d’une militante néonazie nostalgique du IIIe Reich.

Elle gérait l’argent issu des braquages, faisait la cuisine et s’occupait de ses deux chattes, Lilly et Heidi. Elle organisait la location des appartements dans lesquels le trio se cachait, dont le dernier auquel, le 4 novembre 2011, elle a mis le feu peu après le suicide des deux Uwe.

Adolescente dans l’ancienne RDA frappée de plein fouet par le choc économique de la Réunification, elle s’est engagée dès l’âge de 20 ans dans les milieux néo-nazis, rencontrant Mundlos et Böhnhardt au début des années 90 dans un centre de loisirs pour jeunes.

Dotée d’une formation à l’horticulture, elle a alterné petits boulots et longues périodes de chômage et a participé à des défilés d’extrême droite. Très vite, le trio s’est radicalisé et armé.

Sa vie a basculé en 1998 lorsque, repérés par les renseignements intérieurs, ils sont passés dans la clandestinité. La jeune femme a alors rompu tout lien avec ses proches.

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