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Dans un hôpital jordanien, des patients yéménites « maudissent la guerre »

Dans un hôpital privé d'Amman, Mohammed Hussein regarde tristement son épouse, atteinte d’un cancer. "Que Dieu maudisse la guerre", répète-t-elle…

Dans un hôpital privé d’Amman, Mohammed Hussein regarde tristement son épouse, atteinte d’un cancer. « Que Dieu maudisse la guerre », répète-t-elle d’une voix faible, en allusion au conflit au Yémen, pays qu’ils ont quitté grâce à un pont aérien médical organisé par l’ONU.

Il y a un an et demi, des médecins yéménites ont diagnostiqué un cancer de la thyroïde chez Dawla, la femme de M. Hussein, âgée de 40 ans.

« Ils m’ont dit qu’elle en souffrait depuis environ quatre ans », déclare, les larmes aux yeux, Hussein, un agriculteur de 50 ans de la province de Hajja, au nord-ouest de Sanaa.

Dans un pays qui connaît la pire crise humanitaire au monde selon les Nations unies, il était impossible pour sa femme de recevoir des soins sur place.

« Je ne pouvais ni la faire soigner au Yémen à cause de la guerre, du blocus, du manque de personnel médical et de traitement ni la transférer à l’étranger faute de moyens », explique ce père de six enfants.

« Personne ne peut imaginer à quel point la vie est difficile au Yémen », dit-il en soupirant.

– « Nous sommes fatigués » –

Le couple a attendu quatre mois à Sanaa avant de pouvoir quitter le Yémen. Il est arrivé le 8 février à Amman sur un vol organisé par les Nations unies et transportant 24 patients, dont des enfants, le deuxième de ce type depuis 2016.

La capitale Sanaa a été conquise en 2014 par les rebelles Houthis qui ont pris aussi le contrôle d’autres régions. La guerre s’est intensifiée avec l’intervention en 2015 d’une coalition militaire dirigée par Ryad en soutien au président Abd Rabbo Mansour Hadi.

Depuis cette date, elle a fait des dizaines de milliers de morts et de blessés, dont de nombreux civils, selon les organisations humanitaires.

Dans une autre salle de l’hôpital spécialisé d’Amman, Wahib, 40 ans, originaire de Taëz, dans le sud-ouest du Yémen, accompagne Aymen, son fils de 10 ans, qui souffre d’une malformation congénitale de la colonne vertébrale.

Les médecins ont prévu une opération le 23 février, tout en prévenant Wahib qu’elle était « délicate ».

« Mon fils souffre depuis qu’il a six ans », raconte cet ouvrier du bâtiment. « On a consulté beaucoup de médecins et tous ont dit: +Nous ne pouvons pas faire l’opération au Yémen+ ».

« Nous sommes fatigués et nous vivons avec l’espoir que la guerre prendra fin rapidement pour pouvoir reprendre une vie normale », dit-il.

Originaire de la province d’Amrane, au nord de Sanaa, Nadia, 25 ans, tient la main de ses deux filles amaigries, Manal, cinq ans, et Maria, deux ans.

« Manal va subir une intervention chirurgicale au bras droit qu’elle ne peut bouger depuis sa naissance », indique cette jeune mère.

Malgré la guerre, Nadia attend avec impatience son retour au Yémen après les soins.

« Dans mon pays, les hôpitaux sont dévastés par la guerre, les médecins sont peu nombreux et les médicaments sont presque inexistants, mais ce voyage nous a redonné espoir », dit-elle.

– Cas compliqués –

« J’espère que les choses iront bien et que je retournerai dans mon pays dès que possible », ajoute-t-elle.

L’hôpital a accueilli « 19 patients yéménites, dont sept enfants », explique le Dr Hani al-Kurdi, directeur de l’établissement, ajoutant qu’ils « souffrent de maladies cardiaques et rénales, de cancer, de malformations congénitales… ».

Selon lui, la majorité d’entre eux « ont besoin d’une intervention chirurgicale parce qu’ils n’ont pas reçu de traitement approprié, ce qui a compliqué leurs cas ».

Pour la porte-parole du bureau régional de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) Inas Houmam Fathi, ces patients « ne méritent pas de souffrir à cause de ce qui se passe au Yémen ».

C’est grâce au pont aérien humanitaire que Hashem Abdallah, 28 ans, de Sanaa, espère pouvoir sauver son pied.

« Il y a trois ans, j’ai été renversé par une voiture alors que j’étais en vélo et les médecins à Sanaa ont voulu m’amputer du pied droit mais ma famille a refusé », raconte-t-il.

« Je veux marcher, je veux me marier et me débarrasser de cette béquille », affirme-t-il.

« Ici, les médecins m’ont assuré que tout irait bien ». Son opération est prévue la semaine prochaine.

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