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De l’accueil à la rue, polémique après la fermeture d’un centre de migrants en Italie

"On leur a donné une dignité, un parcours d'intégration et là on leur demande de partir"... La fermeture d'un des…

« On leur a donné une dignité, un parcours d’intégration et là on leur demande de partir »… La fermeture d’un des plus grands centres d’accueil de migrants d’Italie, aux portes de Rome, suscitait mercredi l’indignation d’une partie des habitants et de nombreux élus.

« On peut changer les politiques de gestion de l’immigration mais on ne peut pas jeter les gens comme ça dans la rue », s’insurge Riccardo Travaglini, le maire de Castelnuovo di Porto, localité de 9.000 habitants au nord de la capitale italienne.

« Sur ce territoire, nous avons beaucoup œuvré pour l’accueil et, en quelques heures, il a été décidé de démanteler notre communauté », ajoute l’élu qui ne décolère pas depuis l’annonce de la fermeture du centre d’accueil pour demandeurs d’asile situé sur sa commune.

Une décision qui est la conséquence de la loi Sécurité et Immigration, récemment votée en Italie, qui a durci la politique de l’Italie.

Le texte voulu par Matteo Salvini, le ministre de l’Intérieur et chef de file de la Ligue (extrême droite), a notamment aboli les permis de séjour humanitaires accordés aux personnes vulnérables, familles ou femmes seules avec enfants, victimes de traumatismes pendant leur périple vers l’Italie.

Il réorganise aussi le système d’accueil des demandeurs d’asile en prévoyant la fermeture des grands centres, comme celui de Castelnuovo dont Matteo Salvini estime qu’ils coûtent cher et ne font qu’accroître la criminalité.

Annoncée avec un préavis de 48 heures, l’évacuation du centre (qui accueillait plus de 500 personnes dont 120 femmes et 14 enfants), a commencé mardi avec le départ de 30 migrants, en autocar, vers des centres d’accueil de Campanie et de Basilicate (sud).

– Visite du pape –

Mercredi matin, 75 sont partis vers d’autres régions d’Italie suscitant l’indignation et aussi quelques larmes chez certains employés du centre qui avaient tissé des liens d’amitié avec les migrants. La structure doit être totalement évacuée d’ici à la fin du mois.

« Après les avoir accompagnés, parfois des années, dans un parcours d’intégration, il a fallu leur annoncer qu’ils allaient partir, sans même connaître leur destination », a déclaré à l’AFP Rosanna Just, responsable juridique du centre.

« Les enfants étaient scolarisés à l’école ou au collège, certains avaient même trouvé un travail et du jour au lendemain on leur enlève tout ça », déplore la jeune femme.

Mardi soir, une marche rassemblant plusieurs dizaines d’habitants de la commune a été organisée à Castelnuovo pour protester contre la fermeture du centre, ouvert il y a dix ans.

La structure avait reçu en 2016 la visite du pape François qui y avait célébré la messe du Jeudi saint et lavé les pieds de 11 migrants de diverses confessions.

Parmi les migrants, certains ont préféré ne pas attendre leur transfert et ont quitté le centre à pied dès lundi en direction de la gare romaine de Termini « parce qu’il ne savaient pas où aller », a raconté le maire aux journalistes.

Or, le principal reproche adressé par ses détracteurs à la loi anti-migrants de Matteo Salvini est précisément qu’elle risque de jeter de nombreux migrants dans la clandestinité.

« J’ai trouvé une famille ici, j’ai travaillé avec le curé de la paroisse, je servais la messe, j’allais à l’école, ça va être difficile de reconstruire tout ça ailleurs », a raconté à l’AFP-TV Anthony Ehikwe, un Nigérian de 27 ans.

« Je vis ici depuis deux ans, je ne sais pas où je vais être envoyé, je suis dans le brouillard », explique ce jeune catholique qui dit avoir fui son pays, via la Libye et en traversant la Méditerranée, en raison de persécutions religieuses dont il était victime.

Matteo Salvini a une nouvelle fois justifié mercredi sa mesure en rappelant qu’il s’était « engagé à fermer les mégastructures d’accueil où il y a des gaspillages et des crimes ».

« C’est une intervention de bon sens qui fera économiser aux Italiens six millions d’euros par an sans enlever de droits à personne », a-t-il assuré.

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