InternationalAFP




Début d’un pèlerinage historique de sikhs indiens au Pakistan

Des centaines de sikhs indiens ont franchi samedi la frontière indo-pakistanaise pour se rendre dans un des lieux les plus…

Des centaines de sikhs indiens ont franchi samedi la frontière indo-pakistanaise pour se rendre dans un des lieux les plus saints de leur religion, situé au Pakistan, en un puissant symbole de coopération entre deux nations à couteaux tirés depuis des décennies.

L’ouverture d’un corridor spécialement conçu à l’intention des pèlerins sikhs, réclamée de longue date par New Delhi, va permettre à des milliers d’entre eux de participer sans visa aux célébrations du 550e anniversaire du fondateur de la religion Gourou Nanak dans les prochains jours.

Son mausolée se trouve dans la petite ville pakistanaise de Kartarpur, à seulement 4 km de la frontière indienne.

Après plusieurs heures d’attente, le portail blanc situé à la frontière entre les deux pays s’est ouvert peu avant 14H00 (09H00 GMT) et une foule bigarrée, certains portant leurs enfants sur leurs épaules, l’a joyeusement franchi avant de grimper à bord de bus qui les ont transportés à destination.

« Pendant des années nous avons prié à distance. A présent nous pourrons prier au gurdwara (lieu de culte sikh, NDLR). Des années de prières ont porté leurs fruits », s’est réjoui un pèlerin de 67 ans, Balbir Singh, côté indien.

Parmi les premières personnes à passer le portail figurait l’ancien Premier ministre indien Manmohan Singh, qui a salué un « grand moment ». « J’espère que les relations entre le Pakistan et l’Inde vont s’améliorer après l’ouverture de Kartarpur », a-t-il noté.

« L’ouverture du corridor de Kartarpur Sahib avant le 550e anniversaire de Gourou Nanak nous a comblés de joie », avait auparavant lancé le Premier ministre indien Narendra Modi depuis la ville frontalière de Dera Baba Nanak.

M. Modi a adressé ses remerciements à son homologue pakistanais Imran Khan pour « son respect des sentiments de l’Inde (et) pour sa coopération ».

Peu après, M. Khan, s’exprimant à Kartarpur devant une effigie géante de kirpan (poignard), l’un des cinq symboles de la foi sikhe, a à son tour félicité les milliers de pèlerins réunis devant lui et ceux qui ont rendu le projet possible « en seulement dix mois ».

– Restrictions de visa –

Dès l’aube de samedi, des centaines de personnes dont de nombreux hommes arborant des barbes et les turbans colorés caractéristiques du sikhisme, avaient commencé à affluer en direction du site de chaque côté de la frontière.

Kartarpur est un des lieux les plus sacrés au monde pour les fidèles sikhs, dont le nombre est estimé à quelque 30 millions dans le monde, dont plusieurs millions en Inde et environ 20.000 au Pakistan.

Le site n’était jusqu’ici que très difficilement accessible aux sikhs indiens, soumis comme la plupart de leurs compatriotes à des restrictions de visa en raison des tensions géopolitiques qui opposent les deux pays depuis leur indépendance de la couronne britannique en 1947.

La violente partition entre Inde et Pakistan qui avait immédiatement suivi la décolonisation s’était traduite par la plus importante migration de masse de l’Histoire et avait causé la mort d’au moins un million de personnes.

Nombre de familles de toutes confessions s’étaient retrouvées brutalement divisées et restent dans l’incapacité de se retrouver depuis en raison des difficultés à obtenir un visa.

Le projet de corridor sikh vers Kartarpur est longtemps demeuré gelé faute de dialogue entre les deux puissances nucléaires. Paradoxalement, il se réalise à un moment où leurs relations sont particulièrement difficiles.

Inde et Pakistan se disputent la région himalayenne du Cachemire et se sont livré trois guerres en 72 ans. Ils ont frôlé une nouvelle confrontation en février et tentent chacun de gagner la communauté internationale à leur cause.

Un accord indo-pakistanais pour la création du corridor a malgré tout vu le jour fin octobre après plusieurs mois de discussions parfois houleuses.

Imran Khan a expliqué samedi s’être emparé de la question à l’instigation de son ami indien sikh -et comme lui ancien champion de cricket- Navjot Singh Sidhu.

« J’espère que ceci n’est qu’un début. Un jour viendra où nos relations avec l’Inde s’amélioreront », a-t-il ajouté.

Le site de Kartarpur, désormais embelli et agrandi, doté d’un nouveau pont et d’un point de contrôle pour l’immigration, pourra accueillir quelque 5.000 pèlerins chaque jour.

Nombre de sikhs venus du monde entier – munis de visas – sont déjà arrivés au Pakistan ces derniers jours en vue des célébrations.

« Depuis l’enfance, nos anciens nous ont raconté tant d’histoires sur le Pakistan, comment ils venaient de là, mais nous n’aurions jamais imaginé que nous pourrions le voir et éprouver de tels sentiments », s’émeut Manees Kaur Wadha, une pèlerine indienne.

Suivez l'information en direct sur notre chaîne