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Divisé, le Congrès américain sous pression pour réformer l’immigration

Forcée par la crise des enfants migrants séparés de leurs parents à la frontière et sous l'injonction de Donald Trump,…

Forcée par la crise des enfants migrants séparés de leurs parents à la frontière et sous l’injonction de Donald Trump, la Chambre américaine des représentants tente jeudi de réformer la loi sur l’immigration. Mais les divisions internes des républicains et l’opposition frontale des démocrates menacent toute avancée.

Alors que le doute demeure sur le temps que les plus de 2.300 mineurs déjà séparés de leurs parents, en vertu de la politique de « tolérance zéro » du président américain, mettront à retrouver leurs familles, les dirigeants républicains s’appliquent à rallier leurs troupes autour d’un difficile compromis entre modérés et droite dure.

Les plans républicains collent au décret surprise signé mercredi par Donald Trump dans une spectaculaire volte-face: si les enfants ne seront plus séparés de leur famille, c’est parce qu’ils seront désormais autorisés à rester en centre de rétention avec leurs parents pendant leurs poursuites pénales.

Dans une curieuse façon d’encourager un vote qu’il réclame depuis des mois, le président républicain a signalé dès le début de matinée que cette réforme semblait promise à l’échec au Sénat, où son parti n’a qu’un mince majorité.

« Quelle est l’utilité pour la Chambre de faire de bonnes lois sur l’immigration » si les démocrates « ne cherchent qu’à faire obstruction » au Sénat, s’est-il interrogé sur Twitter.

Et de lancer un nouveau coup de boutoir contre la minorité démocrate qu’il accuse de vouloir « ouvrir les frontières », étant allé cette semaine jusqu’à les accuser de vouloir « que les immigrés illégaux, peu importe à quel point ils sont dangereux, déferlent et infestent notre pays ».

Reconnaissant la « complexité » d’une réforme profonde que les précédents présidents ont échoué à obtenir, la ministre de la Sécurité intérieure Kirstjen Nielsen a exhorté le Congrès à agir jeudi matin.

– Deux votes –

Les élus de la Chambre sont appelés à voter sur deux lois allant bien au-delà du sort de ces familles déchirées.

Au menu: financement du mur à la frontière mexicaine, statut des jeunes dits « Rêveurs » –arrivés sans papiers aux Etats-Unis lorsqu’ils étaient enfants– et nette réduction de l’immigration légale, avec notamment de strictes limites au regroupement familial et un changement des critères d’attribution des visas de travail.

Deux votes sont prévus.

D’abord, vers 13H15 (17H15 GMT), sur un texte très restrictif qui circule depuis janvier et dont les partisans eux-mêmes reconnaissent qu’il n’aboutira certainement pas.

Puis à partir de 17H00 (21H00 GMT), sur un projet présenté cette semaine et se voulant plus ouvert à la frange modérée, même si cette étiquette fait rire les démocrates. Il prévoit un permis de travail et de résidence pour les « Rêveurs », renouvelable tous les six ans et qui les autorise à tenter de décrocher ensuite un statut de résident permanent.

Pas de suspense du côté démocrate, leur cheffe Nancy Pelosi a déjà annoncé qu’ils voteraient contre. Et de dénoncer dans un même souffle le décret Trump qui « cherche à remplacer une forme d’agression contre les enfants par une autre ».

Le président « prépare la voie pour l’incarcération à long terme des familles », a-t-elle accusé sur Twitter.

– « Bienvenue en Amérique » –

Au-delà des clivages partisans, la solution apportée par Donald Trump aux séparations qu’il avait lui-même encouragées, avec sa fermeté aux frontières, ne satisfait pas non plus les associations de défense des droits de l’homme.

« Les enfants n’ont pas leur place en prison », a ainsi jugé la puissante ACLU mercredi.

Et s’il met un terme aux séparations, le décret ne mentionne pas les plus de 2.300 enfants et jeunes migrants qui ont été séparés de leurs parents depuis début mai après avoir franchi la frontière avec le Mexique.

Envoyés dans des centres aux quatre coins du pays, on ignore encore quand ils pourront être réunis avec leurs familles.

Pleurs déchirants, images poignantes d’enfants dévastés, la politique fermement revendiquée dans un premier temps par la Maison Blanche n’a pas tenu face à la tempête dans l’opinion publique, dénoncée par l’ONU, le Pape, des pays européens et jusqu’au coeur même de ses rangs républicains.

Alors qu’il a souvent vanté par le passé ses nombreuses apparitions en Une du Time, Donald Trump ne devrait pas afficher celle du prochain numéro, révélée jeudi et qui le montre dominant une fillette en larmes, dont la photo a largement contribué à alerter l’opinion, avec le simple titre: « Bienvenue en Amérique ».

Père et grand-père, le président septuagénaire l’a reconnu mercredi: sa femme Melania et sa fille Ivanka ont pesé sur sa décision de mettre un terme aux séparations, dont ses proches conseillers affirmaient encore récemment qu’elles servaient de « dissuasion » pour ceux qui seraient tentés d’entrer illégalement.

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