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Droits de l’homme, politique et économie en couverture des journaux camerounais

Un gouvernement qui se remue pour redorer son blason sur le front du respect des droits humains, alors que les…

Un gouvernement qui se remue pour redorer son blason sur le front du respect des droits humains, alors que les sphères politique économique restent désespérément sinistrées, sont les sujets phares des journaux camerounais parus mercredi.«Rapport 2019 de Human Rights Watch : le gouvernement dénonce» ; «Allégations non fondées de l’ONG Human Rights Watch : le gouvernement dénonce». En chœur, les quotidiens à capitaux publics et privés Cameroon Tribune (CT) et Épervier, respectivement, relaient les propos outrés tenus la veille par le porte-parole du gouvernement, René Emmanuel Sadi, s’insurgeant contre l’organisation non gouvernementale attribuant, aussi bien aux sécessionnistes qu’aux forces de défense et de sécurité, la responsabilité des exactions commises sur des centaines de civils dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

Et, alors que CT se contente prudemment de publier l’intégralité du communiqué gouvernemental sur le sujet, son confrère s’étrangle littéralement, estimant que l’ONG jette l’opprobre sur l’armée camerounaise, qui même en zone de conflit ne se départit pas de ses obligations républicaines.

«René Emmanuel Sadi n’est pas passé par quatre chemins pour indiquer qu’en minimisant les actes odieux des bandes armées, HRW prend partie pour elles. Une attitude que condamne le gouvernement camerounais en même temps que les actes des sécessionnistes», prolonge le bihebdomadaire Repères, rappelant que le rapport décrié par Yaoundé fait état d’au moins 170 morts et des centaines d’habitations incendiées dans les deux régions anglophones du pays en 6 mois.

Et le gouvernement, renchérit Le Messager, menace désormais de rompre avec les partenaires humanitaires qu’il appelle à plus de responsabilité au risque de perdre non seulement leur crédibilité, mais aussi leur relation avec le Cameroun.

Sauf que le même régime, s’empresse d’ajouter Repères sous le titre «Motions de soutien à Paul Biya : 36 ans d’enfumage», aurait tort de penser que ses multiples sorties outrées constituent un signe de crédibilité : l’élite politique et administrative, militant au sein du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc, au pouvoir), rivalise d’ingéniosité et d’hypocrisie pour la signature des motions de soutien au président de la République, mais l’ampleur de la pratique contraste fort avec les actes et résultats.

«Pour se convaincre que les signataires sont mus par autre chose que le soutien véritable, il n’est qu’à voir que les motions sont régulièrement signées par tout le monde : les absents, les morts, les prisonniers, des personnalités dont les fonctions interdisent un tel engagement, etc.»

À propos de mort, celle, par arme blanche vendredi dernier dans la métropole économique, Douala, d’un élève assassiné par un racketteur dans l’enceinte de son établissement scolaire, rebondit dans les colonnes de The Guardian Post, CT, Le Jour et Mutations, à la faveur d’une mesure prise la veille par le ministre de la Santé publique, Malachie Manaouda, de suspendre pour 3 mois des infirmières qui, plutôt que de tenter de sauver l’infortuné en salle d’urgences, auront passé leur temps à filmer le blessé avec leurs téléphones androïde avant d’en poster les images sur les réseaux sociaux.

Saluant lui aussi la mesure ministérielle, Le Messager s’en prend violemment à ces infirmières photographes, plutôt qu’urgentistes, qui laissent un malade se vider de son sang avant de rendre l’âme.

Les 3 infirmières sont accusées par leur hiérarchie de «manquement à l’éthique et la déontologie professionnelle», précise le Jour alors que, pour Mutations, en sanctionnant ces réalisatrices en herbe de films d’horreur, le gouvernement atténue la douleur des Camerounais sur ce drame, et donne à espérer que les responsabilités autour de ce scandale seront établies et les coupables punis.

«Comment ne pas penser que ces infirmières auraient pu être plus utiles autrement ? Et si elles n’avaient concrètement rien à faire là, pourquoi encombrer cet espace ?» s’étrangle CT.

Faut-il, finalement, avoir peur des urgences ? s’interroge lourdement Repères, pour qui le décès tragique, du fait d’une négligence du corps médical dans ces services spécialisés, de Bleuriot Rosmann Tsanou, élève en classe de 2nd C au lycée bilingue de Deïdo, vient remettre sur la sellette la prise en charge des patients souvent à l’article de la mort, du fait d’un plateau technique inadéquat et de l’insouciance professionnelle de certains personnels.

Le même niveau d’amertume transparaît quelques pages plus loin lorsque la publication constate que le Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (DSCE), jadis présenté comme la boussole du développement du pays, n’a pas produit les effets escomptés : en 10 ans de mise en œuvre, le taux de croissance de 4,5% n’a pas permis de faire reculer la pauvreté, au contraire, elle s’est accrue et cela peut s’observer à mesure que l’on s’éloigne du centre de décisions.

Là où les choses semblent évoluer dans la bonne direction, répond en écho L’œil du Sahel, c’est dans le domaine des matériaux de construction avec l’annonce, par les Cimenteries du Cameroun (Cimencam), de l’augmentation de l’ordre de 25% de sa production dans l’usine de Figuil (Nord) dès 2020.

La bataille du ciment aura lieu, assure Le Quotidien de l’Économie, revenant sur l’inauguration, la veille par le même opérateur dans la banlieue de Yaoundé, la capitale, de sa 3ème unité de production dans le pays.

Avec tous les projets d’infrastructures dans lesquels est engagé le Cameroun, la demande interne va s’accroître à un rythme annuel de 10%, de quoi aiguiser les appétits, confirme Mutations.

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