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Elections générales sous haute tension au Mozambique

Le Mozambique élit mardi son président, ses députés et ses gouverneurs au terme d'une campagne électorale violente qui illustre les…

Le Mozambique élit mardi son président, ses députés et ses gouverneurs au terme d’une campagne électorale violente qui illustre les difficultés du régime au pouvoir depuis plus de quarante ans, englué dans la crise économique et les conflits armés.

Sauf énorme surprise, le chef de l’Etat sortant Filipe Nyusi et son parti, le Front de libération du Mozambique (Frelimo), devraient une fois encore l’emporter devant leur éternelle rivale, la Résistance nationale du Mozambique (Renamo), tant dans la course à la présidence qu’au Parlement.

Le gouvernement et l’ex-rébellion de la guerre civile (1975-1992) devenue opposition ont signé en août un accord de paix et de désarmement censé mettre un terme définitif aux affrontements sporadiques entre les deux camps qui avaient repris en 2014.

Mais les tensions sont restées vives entre les deux camps à l’approche des élections du 15 octobre.

« Ce scrutin va servir de test pour la démocratie » dans le pays, résume Ericino de Salema, de l’Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique.

En vertu de l’accord de paix signé avec la Renamo, le Frelimo sait qu’il va devoir renoncer à sa mainmise politique absolue sur le pays, un des plus pauvres du monde, et faire un peu de place à l’opposition.

Les 13 millions d’électeurs mozambicains éliront pour la première fois mardi leurs gouverneurs provinciaux, dotés de larges pouvoirs, jusque-là nommés par le gouvernement. La Renamo devrait ainsi prendre, selon les estimations, le contrôle de trois à cinq des dix régions du pays.

« Pour la première fois, le parti au pouvoir risque de perdre quelque chose (…) et il ne va pas se laisser faire », note Zenaida Machado, de l’ONG Human Rights Watch (HRW).

« Cette élection est d’ores et déjà une des plus violentes que nous avons pu observer », ajoute-t-elle.

– Régime fragilisé –

Candidats menacés, destruction de matériel électoral, rixes entre militants, les incidents se sont multipliés ces dernières semaines. Jusqu’à l’assassinat lundi du chef d’une mission d’observateurs électoraux par quatre policiers.

La société civile, qui entend déployer des milliers d’observateurs le 15 octobre, a déjà dénoncé de nombreuses irrégularités, notamment la présence d’électeurs « fantômes » sur les listes électorales.

Le gouvernement de Filipe Nyusi aborde ce scrutin dans une position de faiblesse inédite.

Lors des élections locales de l’an dernier, le Frelimo a réalisé la plus mauvaise performance électorale de son histoire avec « seulement » 51,8% des suffrages au niveau national.

Depuis 2016, le Mozambique se débat en outre dans une grave crise financière causée par la révélation d’un emprunt secret de 2 milliards de dollars, qui a mis au jour une vaste opération de corruption au sommet de l’Etat.

Le régime a aussi été fragilisé par le passage en mars du cyclone Idai, qui a détruit la deuxième ville du pays Beira (centre) et fait près de 2 millions de déplacés.

Et depuis deux ans, il est confronté à une mystérieuse insurrection islamiste qui a fait des centaines de morts dans la province du Cabo Delgado (nord). Le président Filipe Nyusi, qui y est né, a maintes fois promis d’y ramener l’ordre, jusque-là sans résultat.

– « Ecartons le Frelimo » –

Ces attaques jihadistes menacent de retarder le coup d’envoi de l’exploitation des gigantesques réserves de gaz sous-marin de la région, dont le chef de l’Etat a fait miroiter les futurs « pétrodollars » dans tous ses discours.

Face à un sortant affaibli, son adversaire de la Renamo, Ossufo Momade, 58 ans, n’a pas pour autant la partie facile.

Moins populaire que le chef historique du parti Afonso Dhlakama mort en 2018, son autorité est contestée par une faction de son mouvement qui refuse l’accord de paix signé avec le régime et menace de relancer les hostilités.

En clôturant samedi sa campagne en banlieue de Maputo, Filipe Nyusi a redit sa certitude de l’emporter.

« Nous avons eu l’occasion de voir et de sentir la sympathie des gens, leur affection », a-t-il lancé devant des milliers de partisans enthousiastes revêtus des couleurs rouges du parti, « nous pensons que le Frelimo et notre candidature sont (…) la solution préférée de nombreux Mozambicains ».

« Nous allons gagner et nous allons mettre fin à la corruption », lui a lancé en retour Ossufo Momade à Nacala (centre), un de ses bastions. « Ecartons le Frelimo du pouvoir. Ainsi nous rendrons leur dignité aux Mozambicains ».

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