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En autocar et en chantant, un patron de pubs en croisade pour le Brexit

Avec sa gouaille, sa crinière blanche et son autocar, le patron de la chaîne britannique de pubs JD Wetherspoon, Tim…

Avec sa gouaille, sa crinière blanche et son autocar, le patron de la chaîne britannique de pubs JD Wetherspoon, Tim Martin, a pris la route avec un objectif: persuader ses clients qu’ils n’ont rien à craindre d’un Brexit sans accord.

A l’image de la Première ministre Theresa May tentant d’unir son pays derrière le « traité de retrait » entériné par les dirigeants de l’UE, Tim Martin essaie lui aussi de convaincre ses concitoyens, mais de jeter aux oubliettes cet accord âprement négocié pendant 17 mois.

Un point de vue pas si fréquent chez les chefs d’entreprises britanniques, souvent plus enclins à soutenir un divorce sans vagues, de nature à éviter toute perturbation économique.

A bord d’un autocar de luxe spécialement affrété pour l’occasion, le patron de 64 ans roule vers l’un de ses pubs de l’ouest de l’Angleterre.

A quelques jours du vote crucial du 11 décembre, lors duquel les députés se prononceront sur l’accord de retrait, il a entrepris de visiter une centaine de ses 900 établissements pour défendre un Brexit sans concession.

« Je pensais qu’il fallait contourner les médias (londoniens) pour faire passer le message », explique-t-il.

– « Héros » –

Theresa May aussi est partie en campagne: mardi au Pays de Galles et en Irlande du Nord, elle était mercredi en Ecosse. Dans le même temps, le gouvernement et la Banque d’Angleterre ont publié des prévisions économiques pessimistes en cas de « no deal ».

Des projections « biaisées » et « massivement pro-maintien (dans l’UE) », critique Tim Martin. « Il y a beaucoup de désinformation de la part d’organisations qui veulent désespérément que nous restions (dans l’UE) et qui ont arnaqué le public ».

Pour défendre ses convictions, le chef d’entreprise entonne un tube des années 80, « New Song », de Howard Jones, dont les paroles invitent à libérer sa pensée.

Car pour lui, un « no deal » serait synonyme de boom économique, en permettant au pays de conclure des accords commerciaux à sa guise dans le monde entier: « Les revenus augmenteraient le premier jour », croit-il.

Histoire de montrer l’exemple, il a déjà commencé à sélectionner des produits purement britanniques, ou non originaires de l’UE, pour ses pubs, remplaçant par exemple le digestif allemand Jägermeister par de la Strika, une liqueur anglaise à base de plantes.

Le premier arrêt de sa tournée le conduit au pub The Commercial Rooms, à Bristol, ville du sud-ouest de l’Angleterre de 460.000 habitants, où il est accueilli en véritable star.

« Vous êtes l’un de mes héros », glisse Liz Montgomery, 65 ans, employée de bureau à la retraite, elle-même très critique quant à la stratégie de Theresa May sur le Brexit: « Ce n’est pas suffisant », lâche-t-elle, « elle doit faire mieux ».

– Pubs vs « dîners chics » –

Une heure de route plus tard, l’autocar arrive à Gloucester, où certains sont venus spécialement pour rencontrer le fondateur de Wetherspoon, et pas seulement des pro-Brexit. Tim Mars, par exemple, est un partisan du maintien dans l’UE. Mais lui et Tim Martin se retrouvent néanmoins sur un point: le rejet de l’accord négocié par Theresa May.

En plus de sa tournée, le patron de JD Wetherspoon donne de la voix dans le magazine publicitaire de sa chaîne de pubs, lu selon lui par deux millions de clients, et jonche ses établissements de pamphlets contre l’accord de retrait.

Autant d’initiatives pas toujours très appréciées par les clients, reconnaît Matthew Osborne, 30 ans, directeur d’un pub Wetherspoon à Bristol. Mais d’un autre côté, se défend-il, « ce n’est pas comme si étiez obligés de les regarder ».

Tim Martin estime de toute manière que ses clients sont probablement majoritairement pro-Brexit, et que les défenseurs du maintien dans l’UE ne sont guère du genre à frayer dans les pubs. Leur truc à eux, « ce sont les dîners chics », dit-il.

« Le vrai fossé dans la société britannique se situe donc entre les dîners chics et les soirées au pub », ajoute-t-il en s’esclaffant. « Et moi, je sais dans quel camp je me trouve…! ».

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