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En Irak, des Kurdes syriens trouvent refuge loin du « sang » et des « roquettes »

Zoueida pensait vivre une soirée normale, heureuse, en famille. Mais, soudain, la rumeur a couru que les Turcs arrivaient et…

Zoueida pensait vivre une soirée normale, heureuse, en famille. Mais, soudain, la rumeur a couru que les Turcs arrivaient et « cinq minutes plus tard, on a vu des roquettes voler », raconte cette Kurde de Syrie tout juste arrivée en Irak.

Comme elle, près d’un millier de Kurdes syriens ont trouvé refuge au Kurdistan irakien voisin, loin du « sang » et des « roquettes », depuis le lancement le 9 octobre par la Turquie d’une offensive contre la milice kurde syrienne des Unités de protection du peuple (YPG), alliée des Occidentaux dans la lutte antijihadiste.

L’une des cibles de l’opération turque dans le nord de la Syrie, est Ras al-Aïn, la ville de Zoueida sur la frontière turque.

« Tout était normal et soudain, on a entendu qu’il y allait y avoir des frappes. On a quitté la maison et cinq minutes après, on a vu des roquettes voler », raconte à l’AFP cette femme qui préfère ne pas donner son nom, en évoquant cette soirée du jeudi 10 octobre.

Alors, avec son mari, leurs enfants et quelques maigres bagages en main, elle prend la route. Direction la frontière syro-irakienne, à environ 200 km plus loin.

Au bout de quatre jours de marche, la famille arrive à destination. Là, elle est escortée vers des bus affrétés par les autorités du Kurdistan irakien autonome qui offre une issue de secours cruciale aux Kurdes de Syrie depuis le début de la guerre dans leur pays en 2011.

Elle est ensuite installée dans un camp de déplacés irakiens dans la localité de Bardarach, près de la frontière, reconverti ces derniers jours en camp pour réfugiés venus de Syrie.

– Femmes, enfants, sang –

Sur leur chemin, « des gens fuyaient, des petits enfants étaient sous les frappes, des femmes dormaient dans les rues. On a vu le sang couler de nos propres yeux », raconte Zoueida dans un débit mitraillette.

Elle dit s’inquiéter pour le reste de sa famille dont elle ignore le sort. « On est partis sous les bombes, on n’a ni téléphone ni rien ».

Plus de 800 Kurdes syriens ayant fui l’offensive sont arrivés ces derniers jours dans des camps de la province irakienne de Dohouk, où se trouve le camp de Berdarach et où les autorités kurdes irakiennes leur distribuent des vivres.

Parmi eux, Rosine Omar, qui a elle aussi fui avec sa famille Ras al-Aïn, où les combattants kurdes tentent de repousser les forces turques et leurs supplétifs syriens.

« A Ras al-Aïn, la situation devenait intenable, on entendait des tirs de roquettes et on a eu peur », dit à l’AFP cette kurde syrienne de 29 ans, installée également dans le camp de Bardarach.

Des dizaines de civils ont été tués et plus de 300.000 personnes ont été déplacées depuis le 9 octobre, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). Mais la Turquie est déterminée à poursuivre contre vents et marées son opération visant à instaurer une « zone de sécurité » dans le nord syrien pour éloigner les YPG de sa frontière.

– « Aidez-nous »! –

Et dans cette explosion de violences, Rosine Omar met en avant les différentes forces impliquées dans le conflit syrien: les troupes turques, leurs supplétifs syriens, les forces du régime syrien et d’autres… Sans oublier les « cellules dormantes » du groupe jihadiste Etat islamique (EI).

« On a eu peur que l’EI » ou les supplétifs syriens « viennent nous occuper. On a préféré partir parce qu’il fallait sortir nos enfants de cette guerre », martèle-t-elle.

Sauver ses enfants, c’est aussi ce qui a poussé Zanjabil, originaire de la ville syrienne d’Afrine conquise en 2018 par les forces turques et leurs supplétifs syriens, à payer des passeurs pour arriver au Kurdistan irakien.

Il y a un an et demi, il avait quitté Afrine « sous les bombes turques » pour se réfugier dans la province syrienne de Hassaké, plus à l’ouest.

Mais après la nouvelle offensive turque, il a repris la route la semaine dernière en direction du Kurdistan irakien, où il s’est installé dans le camp de Bardarach. « On a vu des enfants démembrés par les bombes » sur le chemin, raconte Zanjabil avant de dire être sans nouvelles de son père et de ses soeurs, restés à Afrine.

« L’exode permanent va durer jusqu’à? » se lamente-t-il. « Les Kurdes n’en peuvent plus: on ne fait la guerre à personne, c’est eux qui nous bombardent (…) Il faut que les pays européens nous aident. Il nous faut une aide d’urgence ».

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