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Evans Ngure, l’artiste kényan qui offre une seconde vie aux déchets

Dans une pièce qui lui sert d'appartement et d'atelier, Evans Ngure travaille sur sa prochaine sculpture, un poisson imaginaire fait…

Dans une pièce qui lui sert d’appartement et d’atelier, Evans Ngure travaille sur sa prochaine sculpture, un poisson imaginaire fait de multiples objets de récupération comme des ustensiles de cuisine en bois ou une machette.

Ce Nairobien réside dans le quartier populaire de Githurai 45, dans le nord de la capitale kényane, et depuis neuf ans, il vit de ses œuvres d’art et bijoux conçus avec des objets recyclés et détournés.

Après s’être essayé à la peinture et au graphisme, Evans Ngure s’est lancé dans cette forme d’art pour faire passer des messages: « Mon but est d’avoir un impact sur la société en impliquant tous ceux qui sont au contact de mon art », explique-t-il.

Sa patte est visible sur le toit-terrasse de l’immeuble de quatre étages où il habite: il y a disposé des installations artistiques et l’entrée de son appartement est décorée d’un rideau fait d’une multitude de boutons.

Pour être capable de vivre de son art, Evans Ngure fabrique une cinquantaine de bijoux par mois, qu’il vend entre 500 et 2.000 shillings pièce (entre 4 et 17 euros).

Ses clients sont « principalement des Kényans qui achètent surtout des bijoux mais également quelques œuvres d’art », dit-il.

Il sort une broche d’une pochette en papier. Avec une pièce de deux euros accrochée à un fil de fer doré, des perles et une Tour Eiffel miniature, il a composé un bijou original. Il réalise également des boucles d’oreille, des pendentifs et des bracelets.

– « Morceau de moto » –

L’argent qu’il gagne grâce à ces bijoux lui permet de concevoir de grandes sculptures surréalistes, sur lesquelles il travaille pendant plusieurs jours. L’artiste en réalise une dizaine par mois, vendues « entre 300 et 1.000 dollars (entre 250 et 860 euros) pièce ».

Sa matière première, Evans Ngure la trouve dans différents lieux: « Je récupère des objets dans plusieurs endroits. Je les trouve par terre quand je me promène en ville,certains amis m’en donnent, et même certains clients », explique l’artiste de 29 ans.

A quelques mètres de chez lui, dans une rue en terre battue, se trouve une décharge où il vient fouiller régulièrement. Entre deux bâtiments, des dizaines de sacs en tissu jonchent le sol, il y a là aussi des jeux d’enfants en plastique, de la ferraille, des canettes… Evans Ngure trouve de tout et en ressort les mains pleines.

« Je ramasse n’importe quel matériau… Ce morceau de moto, en le regardant, je me dis que ça pourrait faire une sculpture incroyable », raconte-t-il, sourire aux lèvres et morceau de carrosserie cabossée dans les mains. Il s’inspire des objets qu’il déniche pour imaginer ses sculptures.

– La « seconde chance » des objets –

« J’aime collecter des objets depuis tout petit mais c’est vraiment quand je suis allé à l’université que j’ai commencé à créer de l’art avec des matériaux non conventionnels », explique Evans Ngure, qui a étudié la peinture à l’université Kenyatta de Nairobi.

« J’ai commencé par ajouter des objets à mes peintures, comme des boutons ou des morceaux de tissu et j’ai évolué jusqu’à faire des collages entièrement à base d’objets », poursuit-t-il en montrant du doigt un paon réalisé avec des morceaux de ceintures en cuir et, pour la queue, des couverts aux manches colorés.

Le recyclage est une philosophie de vie pour cet artiste qui parle des objets comme d’êtres humains.

« Ce ne sont pas seulement les êtres humains qui ont besoin d’une seconde chance; les objets aussi ont droit à une seconde chance mais ils ne peuvent pas le demander. Avant de les mettre à la poubelle, prenez le temps de penser à eux » sous un autre angle, conseille-t-il.

Evans Ngure souhaite également sensibiliser ses contemporains à la protection de la faune en réalisant des collages représentant des animaux, comme le papillon ou la coccinelle qu’il a exposés avec d’autres œuvres au British Institute il y a quelques mois.

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