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« Foncez! »: une policière de haut rang appelle les Papouasiennes au sursaut

Dans un pays comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée où tous les députés sont des hommes, où les violences contre les femmes sont…

Dans un pays comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée où tous les députés sont des hommes, où les violences contre les femmes sont endémiques et où on continue de chasser les sorcières, Julie Palakai représente une raison d’espérer: à 43 ans, cette inspectrice est l’une des officières de rang le plus élevé de la police nationale.

La Papouasie-Nouvelle-Guinée est « un des pays les plus dangereux au monde où être une femme », jugeait récemment dans un rapport l’organisation Human Rights Watch, qui y évaluait à 70% la part des femmes violées ou agressées au cours de leur vie.

Mme Palakai appelle toutes les Papouasiennes à dénoncer ouvertement le sexisme et les violences contre les femmes inhérentes à son archipel. « Les femmes doivent lutter et se lever contre toutes les formes de discrimination, de violences et de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail », dit-elle à l’AFP.

« A l’attention des jeunes filles qui ont encore du mal: ne renoncez pas mais luttez du mieux que vous pouvez pour atteindre vos objectifs et vivre une vie meilleure », insiste-t-elle. « Rien n’est impossible. »

Human Rights Watch dénonce notamment la persistance des violences contre les personnes soupçonnées de sorcellerie en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Certes, des hommes ont été victimes de chasses aux sorcières, mais ce sont en premier lieu les femmes et les filles qui sont les cibles premières de ces règlements de compte.

Un chiffre illustre mieux qu’aucun autre la condition des femmes dans l’ex-colonie australienne: ses 111 parlementaires sont tous des hommes.

– Rôle très en vue –

Au sein des forces de police, rares sont les femmes. Mme Palakai est du reste la seule femme officière dans toute la Région des Îles, l’une des quatre régions administratives du pays, située au nord-est de l’île principale. Un poste obtenu après un dur labeur et une lutte constante contre les discriminations, les violences et les préjugés.

Aujourd’hui, Mme Palakai est basée à Kokopo, une capitale provinciale située dans le nord-est de la Nouvelle-Bretagne. Elle y dirige l’Unité de sécurité publique, un rôle très en vue puisqu’elle est chargée de diriger les passages en revue de la prestigieuse Garde d’honneur.

Maniant une épée argentée, elle conduit fièrement devant les membres de la Garde alignés les délégations de dignitaires, parfois des magistrats, des supérieurs hiérarchiques, presque toujours des hommes.

Voir une femme commander est un spectacle rare dans cette nation machiste et il implique de la part de ses subordonnés un respect total.

« Quand nous passons la Garde en revue avec un officier supérieur ou un invité de marque, nous inspectons en fait chacun des individus », explique-t-elle.

Avant d’en arriver là, elle a d’abord vu ses espoirs initiaux d’études supérieures s’envoler en 1994 quand sa ville de Rabaul, au nord de Kokopo, a été ravagée à 80% par une double éruption volcanique.

– « Foncez ! » –

Elle venait de finir le lycée et a alors dû travailler, au début comme représentante de commerce, un poste qui ne lui convenait pas, avant de tomber sur une annonce de recrutement de la police dans un journal local.

Elle n’en est pas revenue d’avoir été sélectionnée.

Après six mois de formation près de la capitale Port Moresby, c’est à Lihir, une petite île de l’extrême nord-est située au large de la Nouvelle-Irlande et connue pour sa mine d’or, qu’elle fut envoyée.

« Il faut apprendre à réfléchir vite en cas d’urgence ou dans les opérations de routine, et à prendre des décisions rapides et sages », dit-elle, 18 ans plus tard.

Mme Palakai était ambitieuse. Mais comme beaucoup de Papouasiennes, elle s’est heurtée dans son propre foyer aux résistances de son partenaire. « J’ai décidé de le quitter parce que je ne voyais pas d’avenir avec lui du fait de son manque de respect. »

« Il me disait souvent que je n’étais qu’une femme, que les policiers n’écouteraient jamais mes instructions, que les femmes ne faisaient pas le poids pour diriger. »

Elle a obtenu en mai 2013 son diplôme d’officier, qui lui a été remis lors d’une cérémonie présidée par le Premier ministre Peter O’Neill. Parmi les policiers promus figuraient cinq femmes et 20 hommes.

Depuis, elle ne cesse d’encourager les femmes à se donner les moyens d’un avenir meilleur. « L’éducation n’est jamais terminée. Là où vous voyez des opportunités, foncez ! Car l’éducation est votre avenir. »

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