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Ghana : Juges et avocats continueront de porter des perruques !

Le mois dernier, le nouveau Juge en chef du Ghana, Kwasi Anin-Yeboah, a fait sensation en déclarant catégoriquement que les…

Le mois dernier, le nouveau Juge en chef du Ghana, Kwasi Anin-Yeboah, a fait sensation en déclarant catégoriquement que les perruques et robes de cérémonie portées par les juges ne seraient pas retirées, malgré la demande persistante d’une importante frange de l’opinion publique.Lors de sa comparution devant le comité des nominations du Parlement ghanéen, le Juge Anin-Yeboah a clairement indiqué que le pouvoir judiciaire ne changerait pas la tradition du port de perruques, de robes et de costumes, hérités de la période coloniale britannique.

Pour lui, les praticiens du droit, de même que ceux d’autres professions, tels que les pasteurs, les imams et les moines se distinguent par leur code vestimentaire spécifique qui les distingue des autres dans la société ghanéenne.

Les juges ne devraient donc pas faire exception à cette règle

Mais la position du Juge Anin-Yeboah sur la perruque et les robes de cérémonie portées par ses collègues du monde anglophone, à quelques exceptions près, comme les Etats-Unis, va à l’encontre de l’opinion publique au Ghana où l’opposition à cette opinion est passée de l’indifférence froide à l’indignation.

Pour les non-apologistes des perruques, le fait de s’accrocher à ces beaux atours de cérémonie hérités des colons britanniques, qui ne signifient rien ou n’ont aucun sens pour les Ghanéens ordinaires, constitue un symbole gênant d’un passé colonial turbulent, lorsque leur pays était sous occupation par une puissance étrangère venue de l’autre côté de la mer.

Les juges et les avocats portant des perruques, dans le cadre de la procédure judiciaire normale ont été passés au crible par les Ghanéens qui estiment que 63 ans après que leur pays a brisé le joug du colonialisme, il était temps que l’Etat avance et s’éloigne des vestiges qui rappellent la domination étrangère.

Au Ghana, la corporation juridique est l’une des rares professions qui suscitent encore un immense respect des Ghanéens ordinaires qui considèrent les juges et les avocats comme des sages qui méritent d’être vénérés.

Cependant, lorsqu’ils apparaissent dans leurs tenues traditionnelles lors des cérémonies officielles, les juges portant des perruques sont généralement l’objet de dérision.

Les Ghanéens rient, froncent les sourcils et se plaignent même de leur apparence ridicule.

Le costume du juge, par exemple, une longue robe, un capuchon complet avec un capot couvrant les épaules et un manteau (ou une cape) est considéré comme issu d’une tradition établie sous le règne du roi Edouard III (1327-77), il est perçu comme étant la tenue correcte pour assister aux séances de la cour royale.

Le matériel pour confectionner ces robes a été à l’origine, remis aux juges sous le forme d’une subvention de la Couronne, et comprenait de l »hermine, du taffetas ou de la soie.

Les couleurs étaient le violet pour l’hiver et le vert en été, avec le rouge écarlate pour gilet, mais la dernière mention de robes vertes remonte à 1534.

On pense en outre qu’en 1635 le Guide définitif de la tenue des tribunaux a été publié dans le règlement des juges. Mais cela n’a pas introduit de nouveaux costumes. Le Guide indiquait seulement quelles robes existantes devraient être portées, et à quelle occasion.

En plus de leurs complaintes au sujet de «la folie de préserver un héritage colonial», d’autres Ghanéens estiment que les perruques et les robes des juges ne sont pas naturellement destinées aux climats du pays, qui est généralement trop chaud pour le confort de ceux qui les portent.

Mais ceci ne semble guère ébranler le juge Anin-Yeboah qui n’écoute clairement pas la clameur de l’opinion publique au Ghana.

Et il bénéficie du soutien de l’Association du barreau du Ghana, où une telle tradition est une fibre profondément enracinée dans le système judiciaire.

Cependant, il fait déjà face à une révolte de certaines sections de la magistrature qui ne voient aucun sens à être attachées sentimentalement à une culture étrangère qui parle davantage de l’influence d’une puissance étrangère sur le sol ghanéen, des décennies après la défaite et le bannissement du colonialisme.

La Juge Gertrude Torkornoo, l’une des trois femmes choisies pour siéger à la Cour suprême, a soutenu les appels à des réformes concernant le code vestimentaire de la magistrature afin de refléter les cultures, les valeurs et les conditions autochtones dans la société et l’environnement au Ghana.

Les juges portant des perruques lors des cérémonies officielles et juridiques sont un must pour les professions légales des anciennes colonies britanniques, notamment le Kenya, le Zimbabwe, la Sierra Leone, la Gambie et le Nigeria où aucune campagne connue n’existe pour que ces objets vestimentaires soient rangés aux oubliettes.

Mais les Ghanéens veulent que leur pays suive les traces du Malawi, lui-même une ancienne colonie britannique qui, en novembre dernier, a vu sa cour constitutionnelle suspendre le port de perruques blanches traditionnelles et de robes noires dans les salles d’audience, à un moment où les niveaux de température dans ce pays continuaient d’augmenter.

Mais, pour l’instant en tant que Juge en chef, Anin-Yeboah semble avoir le dernier mot sur cette question et elle ne semble pas prête à céder un pouce de terrain.

«C’est notre uniforme et je suis tout à fait en faveur de la tradition du Barreau. Je ne le changerai pas », a-t-il déclaré sans ambages.

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