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Irak: les manifestations regagnent en intensité à Bagdad et dans le sud

Les manifestations ont regagné en intensité dimanche dans le sud de l'Irak et à Bagdad, les protestataires bloquant les rues…

Les manifestations ont regagné en intensité dimanche dans le sud de l’Irak et à Bagdad, les protestataires bloquant les rues avec des pneus en flammes et menaçant d’intensifier encore leur mouvement si leurs revendications continuent de rester lettre morte.

Ce mouvement de contestation inédit qui réclame depuis début octobre une refonte du système au pouvoir avait été éclipsé ces dernières semaines par la flambée des tensions entre l’Iran et les Etats-Unis, les deux principaux parrains de Bagdad.

Face au risque de voir leur pays devenir la théâtre principal de l’affrontement entre Téhéran et Washington, les manifestants avaient accordé un délai d’une semaine au gouvernement pour faire avancer leurs revendications, dont le renouvellement d’une classe politique jugée corrompue.

Dimanche, à la veille de cette date-butoir, des centaines de jeunes en colère ont relancé le mouvement en manifestant sur les places Tahrir et Tayaran à Bagdad.

D’autres contestataires ont brûlé des pneus pour bloquer les autoroutes et les ponts, aggravant les embouteillages dans la deuxième capitale la plus peuplée du monde arabe (quelque neuf millions d’habitants).

Au moins dix personnes, dont des policiers, ont été blessées dans les affrontements qui en ont résulté, selon des sources médicales et sécuritaires à l’AFP.

« Ce n’est que la première escalade », a déclaré à l’AFP un manifestant, écharpe enroulée autour du visage.

« Nous voulons envoyer un message au gouvernement: arrêtez de tergiverser. Les gens savent ce que vous faites », a-t-il dit.

« Demain, le délai expire, ensuite les choses pourraient devenir hors de contrôle ».

– « Nous commençons l’escalade » –

Les manifestants réclament un scrutin anticipé sur la base d’une loi électorale réformée, et un nouveau Premier ministre pour remplacer l’actuel chef du gouvernement démissionnaire Adel Abdel Mahdi.

Ils demandent aussi la fin de la corruption, qui a englouti en 16 ans deux fois le PIB de l’Irak, et du système politique de répartition des postes en fonction des ethnies et des confessions.

M. Abdel Mahdi a démissionné il y a près de deux mois, mais les partis politiques n’ont jusqu’à présent pas réussi à s’entendre sur un successeur et celui-ci continue à diriger le gouvernement.

Les manifestants ont publiquement rejeté les noms de possibles remplaçants possibles et sont furieux que d’autres réformes de grande envergure n’aient pas été mises en œuvre.

« Nous commençons l’escalade aujourd’hui, car le gouvernement n’a pas répondu à nos demandes », a dit Haydar Kadhim, un manifestant à Nassiriya (sud).

« Nous avons accordé un laps de temps au gouvernement pour mettre en oeuvre nos demandes, mais il semble ne pas s’y intéresser », a déclaré un autre manifestant, Mohammad Kareem, âgé de 20 ans.

Des rassemblements ont aussi eu lieu dans les villes de Diwaniya, Kout, Amara, dans le sud, où la plupart des bureaux gouvernementaux, des écoles et des universités sont fermés depuis des mois.

Dans la ville sainte de Najaf, au sud de Bagdad, des jeunes arborant des drapeaux irakiens ont brûlé des pneus et entamé un sit-in sur une route principale menant à la capitale.

Plus au sud, à Bassora, les étudiants ont participé à un mouvement de grève.

– Manifestation concurrente –

Depuis octobre, la contestation, inédite parce que spontanée, a été émaillée par des violences et réprimée par les forces de l’ordre. Il y a eu environ 460 morts –quasiment tous des manifestants– et plus de 25.000 blessés.

Si les violences ont légèrement diminué lors des manifestations, les militants disent être confronté à une vaste campagne d’intimidation, d’assassinats et d’enlèvements.

Les protestataires regardent aussi avec appréhension l’organisation d’une manifestation rivale le 24 janvier, à l’appel du leader chiite Moqtada Sadr, contre la présence américaine dans le pays.

Le Parlement a voté le 5 janvier pour réclamer le retrait des troupes étrangères –notamment les 5.200 troupes américaines– présentes dans le pays, après le tir de drone américain qui a tué le puissant général iranien Qassem Soleimani et son lieutenant irakien Abou Mehdi al-Mouhandis près de l’aéroport de Bagdad le 3 janvier.

En représailles à cette frappe, l’Iran a tiré des missiles sur des bases irakiennes abritant des Américains le 8 janvier, blessant 11 soldats américains.

Les manifestants, qui dénoncent l’influence grandissante de l’Iran, conspuent aussi les Etats-Unis, dont les récentes frappes en Irak ont menacé de faire plonger le pays dans le chaos.

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