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Jair Bolsonaro, un premier mois mouvementé à la tête du Brésil

Le président brésilien Jair Bolsonaro, élu sur un programme anticorruption et ultra-libéral, a vécu un mois inaugural de mandat mouvementé:…

Le président brésilien Jair Bolsonaro, élu sur un programme anticorruption et ultra-libéral, a vécu un mois inaugural de mandat mouvementé: une première sortie internationale ratée à Davos, un fils soupçonné de transactions douteuses et une catastrophe minière.

Le baptême du feu de ce capitaine de réserve de 63 ans n’a pas été de tout repos: il a aussi subi une intervention chirurgicale de sept heures, plus de quatre mois après avoir survécu de peu à un attentat à l’arme blanche.

Mais c’est ce vendredi que commence réellement l’épreuve de vérité, avec le début de la législature. Quelque 30 partis sont représentés au sein d’un Parlement encore très atomisé.

Le président d’extrême droite, qui a promis de « changer le Brésil », aura besoin d’alliances. Son Parti social libéral (PSL) n’a que 55 députés à la Chambre sur 513 et quatre sénateurs sur 81.

M. Bolsonaro a promis de stopper net les arrangements politiques en tous genres qui ont fait le lit des scandales de corruption au Brésil depuis des années.

« Il a fait une campagne très forte » sur la lutte anticorruption, dit le politologue Carlos Pereira, de la Fondation Getulio Vargas (FGV) de Rio de Janeiro, « il est lié par cette promesse ».

Mais « en l’absence d’une coalition stable, les soupçons de corruption pourraient rendre le président très vulnérable », ajoute M. Pereira, en référence à son fils Flavio.

Ce fils aîné, élu sénateur, a été pris dans une tempête médiatique dont le président se serait bien passé en arrivant au pouvoir.

Des mouvements suspects ont été notés sur l’un de ses comptes bancaires et de l’un de ses assistants, qui a maille à partir avec la justice et entretiendrait, selon la presse, des relations avec une milice paramilitaire.

Pour Leandro Gabiati, directeur des consultants Dominium Associados, « quand un gouvernement arrive si plein d’éthique et de morale » et que « soudain il y a des soupçons de corruption, les élus vont lui dire: +Tu as besoin de mes votes, mais comme tu es fragilisé, il va falloir que tu payes davantage+ ».

– Discours « superficiel » –

Sur la scène internationale, ce premier mois de mandat d’un farouche anticommuniste a permis au Brésil, totalement aligné sur Washington, de peser de tout son poids contre la « dictature » du président Nicolas Maduro au Venezuela.

Mais à Davos, Jair Bolsonaro a déçu l’élite économique et financière mondiale pour sa première sortie internationale. Le premier chef d’un Etat sud-américain à avoir l’honneur de prononcer le discours d’ouverture de 45 minutes, a raté sa prestation.

Mal à l’aise, il a parlé seulement six minutes, une intervention jugée « superficielle » par beaucoup de commentateurs qui attendaient une présentation forte des projets de cette puissance régionale.

Pourtant, la Bourse continue de fonder de grands espoirs dans la capacité de Jair Bolsonaro et surtout de son « Chicago boy » Paulo Guedes, le ministre de l’Economie, de créer un choc libéral. La Bourse de Sao Paulo a volé de record en record début janvier.

M. Bolsonaro a aussi rapidement mis en acte des promesses électorales emblématiques telle la libéralisation de la détention d’armes. A rebours de l’avis général des experts, il affirme que davantage d’armes permettront de faire reculer la criminalité dans l’un des pays les plus violents au monde.

Le Congrès qui siège à nouveau ce vendredi « lui donnera ses voix pour mettre en oeuvre ses réformes sociales les plus conservatrices », prédit M. Gabiati, « mais le grand problème, ça va être l’économie ».

La réforme la plus épineuse est celle des retraites, très impopulaire mais jugée impérative pour le redressement des comptes publics.

« Dans n’importe quel pays, c’est une réforme très difficile. Si le gouvernement y arrive, il aura un capital (politique) très grand », avance Carlos Pereira, « sinon j’ai des craintes pour sa capacité à gouverner par la suite ».

Le 25 janvier, la catastrophe de Brumadinho, où un barrage minier du groupe Vale a cédé, faisant 110 morts et 238 disparus selon un dernier bilan, a donné un tour tragique à ce début de mandat. Et un effet de réalité aussi pour le pouvoir.

Si le drame n’est pas imputable au nouveau gouvernement, « il met à mal son discours selon lequel il faut assouplir les procédures de licences environnementales », relève André César, de l’institut d’analyse politique Hold.

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