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Journée de prière au Nicaragua, en attendant la reprise du dialogue

L'Eglise catholique appelait jeudi à une journée de prière au Nicaragua, secoué par une vague de contestation ayant fait près…

L’Eglise catholique appelait jeudi à une journée de prière au Nicaragua, secoué par une vague de contestation ayant fait près de 190 morts en deux mois, avec l’espoir d’une reprise prochaine du dialogue.

Les violences se poursuivent dans le pays, le plus pauvre d’Amérique centrale, alors que les forces du gouvernement de Daniel Ortega tentent de reprendre le contrôle des villes auto-déclarées en rébellion, notamment Masaya, commune de 100.000 habitants devenue l’épicentre des protestations.

« Nous vivons dans la peur. J’ai vu passer des camionnettes avec des civils armés de fusils AK-47. Nous avons passé la nuit enfermés dans nos maisons, on a entendu des rafales de tirs » a raconté à l’AFP Ivania Miranda, 53 ans, à Masaya.

Les cloches des églises ont sonné dans la nuit dans certaines villes du pays comme Diriamba (ouest), pour alerter de la présence d’hommes armés tentant de démonter les barrages installés par les habitants dans les rues.

L’Eglise catholique, qui agit comme médiatrice, a appelé à une journée de prière pour le Nicaragua, particulièrement pour les villes de Masaya et Carozo, les deux plus touchées par la répression des forces de l’ordre et des groupes paramilitaires, a annoncé l’évêque auxiliaire de Managua, Mgr Silvio Baez.

– « Dehors Ortega » –

Suspendu depuis lundi, le dialogue entre gouvernement et opposition pour chercher une issue à la crise pourrait bientôt reprendre, alors que l’exécutif a finalement invité, comme il l’avait promis, des organismes internationaux de défense des droits de l’homme à venir enquêter sur les violences commises.

« L’Union européenne, le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et la CIDH (Commission interaméricaine des droits de l’homme) ont informé les évêques nicaraguayens qu’ils ont officiellement reçu les invitations respectives du gouvernement », a indiqué sur Twitter Mgr Baez.

Depuis le 18 avril, quand ont éclaté les premières manifestations, le Centre nicaraguayen des droits de l’homme (Cenidh)a dénombré 187 morts et plus de 1.000 blessés.

L’Eglise comme l’opposition appelle le président Ortega – un ex-guérillero de 72 ans au pouvoir depuis 2007 après l’avoir déjà été de 1979 à 1990 – à permettre l’organisation d’élections générales anticipées en mars 2019 (au lieu de fin 2021). Ce dernier ne s’est pas encore prononcé sur ce point.

La vague de contestation, démarrée contre une réforme de la sécurité sociale depuis abandonnée, cible le chef de l’Etat et son épouse et vice-présidente, Rosario Murillo: le couple est accusé de confisquer le pouvoir et de brider les libertés dans le pays.

« Le peuple ne se rend pas », « Dehors Ortega », « Non à la dictature orteguiste », pouvait-on lire jeudi sur les murs de Masaya.

– « Personne n’a confiance » –

A la table du dialogue, l’Alliance civique pour la justice et la démocratie, qui réunit différents secteurs de la société civile, exige la séparation des pouvoirs de l’Etat, actuellement tous contrôlés par Ortega, surtout le Conseil suprême électoral.

« La présence d’organisations internationales nous donnera la sécurité pour engager des poursuites. Nous avons besoin d’un tiers car personne n’a confiance dans les institutions. Le système repose sur tant d’années de corruption », a dénoncé Lesther Aleman, leader étudiant et membre de l’Alliance.

Le gouvernement réclame, de son côté, que soient levés tous les barrages érigés sur une grande partie des routes et rues du pays.

Le couple Ortega-Murillo accuse ceux qui se sont rebellés contre eux de « délinquants » et « vandales », coupables de « terrorisme » et de mettre à mal l’économie du pays, alors que de nombreux commerces sont fermés et que des milliers de camions de marchandises restent bloqués sur les routes du Nicaragua.

« Nous allons vaincre le mal, la perversité, l’ignominie et l’abomination », a lancé Rosario Murillo, elle-même surnommée « La sorcière » par ses détracteurs.

« Nous voyons qu’il y a une volonté politique de l’Etat de pousser vers une guerre civile », s’est inquiétée mercredi auprès de l’AFP Marlin Sierra, directrice exécutive du Cenidh.

Le département d’Etat américain a appelé cette semaine à organiser des élections anticipées et dénoncé la répression exercée par les forces de l’ordre, de même que l’ONU, le Parlement européen ou encore Amnesty international.

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