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La chanteuse bulgare dont la voix défie les orchestres

A force de voir frémir son auditoire, la chanteuse bulgare Smilyana Zaharieva a compris qu'elle était un cas à part.…

A force de voir frémir son auditoire, la chanteuse bulgare Smilyana Zaharieva a compris qu’elle était un cas à part. Un record officiel l’a confirmé : elle possède l’un des timbres les plus puissants du monde, comparable aux décibels d’un concert de rock.

La chanteuse de 48 ans raconte avoir fondu en larmes lorsque le Guinness des records lui a remis le certificat de la voix mezzo-soprano la plus forte jamais mesurée.

La bible des records a dû innover car il n’y avait pas de précédent dans cette catégorie: Guinness lui a donc fixé l’objectif de dépasser les 110 décibels mesurés à une distance de 2,5 mètres pour lui décerner un titre.

L’enregistrement s’est déroulé en septembre 2018 et le verdict est tombé le 18 juin dernier: évaluée à 113,8 décibels, la voix de Smilyana Zaharieva est comparable à la puissance d’un concert de rock, d’un orchestre symphonique ou … d’une sirène d’ambulance, selon les sites spécialisés.

Mieux, cette brune au regard pénétrant a tenu ce son pendant deux minutes, contre les 5 secondes requises par le Guinness.

Formée très jeune à l’école du chant traditionnel des montagnes des Rhodopes (sud), puis au conservatoire, Smilyana Zaharieva s’était fait remarquer par « ses performances vocales incroyables », témoigne la professeure Svetla Stanilova, directrice du conservatoire de Plovdiv et témoin de l’expérience Guinness.

« On frémit ou on pleure quand je chante », décrit l’interprète.

– Voix de poitrine –

La musique folklorique bulgare a eu son heure de gloire sur la scène internationale dans les années 1980, portée par le succès du choeur féminin « Le Mystère des Voix Bulgares » dont le son puissant semblait envahir l’espace grâce aux harmonies créées par différentes combinaisons des voix.

« Le son vient directement du larynx », décrit à l’AFP Dora Hristova, cheffe de chœur du groupe Le Mystère des voix bulgares. « Les résonateurs sont dans la poitrine et pas dans la tête comme c’est le cas du chant lyrique. Les chanteuses folkloriques sont nées avec cette physiologie, avec cette voix naturelle », explique-t-elle.

C’est avec un autre choeur, « Les grandes voix bulgares », que Smilyana Zaharieva a connu le tourbillon des tournées internationales avant de brutalement mettre fin à sa carrière, en 1996.

« Un jour, à mon retour, ma fille toute petite ne m’a pas reconnue, ceci m’a brisé le cœur », raconte-t-elle.

Reconvertie dans le tourisme, cheffe de sa propre entreprise, elle ne chante plus que pour ses proches. « Mais je sentais un vide, ma voix poussait à ressurgir », se souvient-elle.

En 2015, elle relance sa carrière et se mesure à une formation de 101 cornemuses traditionnelles des Rhodopes, les « kaba gaïda ». Sa voix a tenu face à la puissance des instruments.

« La force de la voix est une qualité individuelle, mais pas la plus importante » puisque « la beauté dépend du timbre », relève toutefois la professeure Stanilova.

– Le son qui soigne –

A cet égard, Smilyana Zaharieva dispose aussi « d’un registre exceptionnel », lui permettant de nombreuses modulations, du chant traditionnel à un répertoire plus lyrique, assure-t-elle encore.

Le directeur de l’opéra de Sofia Plamen Kartaloff est plus réservé sur la notion de record: « Quelle drôle d’idée de mesurer sa voix! », s’exclame-t-il, énumérant plusieurs chanteuses lyriques connues pour leur voix puissante, peut-être autant que celle de Zaharieva, mais jamais mesurée.

Forte de son titre, Smilyana Zaharieva veut élargir son horizon. Sur scène, elle rêve de créations originales, avec des vedettes de la pop comme Madonna à laquelle elle a récemment écrit.

Mais elle veut aussi explorer le potentiel curatif de la musique. Intéressée par les techniques de méditation et de relaxation, elle est persuadée que le son a une influence sur le bien-être.

« Une mélodie dont on varie les rythmes, la puissance, la hauteur, la tonalité, peut activer diverses émotions », assure la chanteuse, dans sa robe blanche imprimée d’une gamme de musique.

Pour en faire la démonstration, elle vocalise des voyelles sur chaque note, tout en agitant une installation de petites cloches, les « tchanove » typiques des Rhodopes. Elle s’accompagne d’une lyre en cristal pour son effet reposant et méditatif.

« Chaque son remet des vibrations vers un centre énergétique du corps et agit sur un organe », affirme-t-elle, vantant les effets bénéfiques du « do sur le coeur, du ré sur les voies respiratoires » ou du « si sur les intestins ».

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