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Le cardinal Monsengwo, aiguillon des pouvoirs en RDC

Le cardinal archevêque de Kinshasa, Laurent Monsengwo, qui a cédé jeudi son fauteuil à l'âge de 79 ans, a longtemps…

Le cardinal archevêque de Kinshasa, Laurent Monsengwo, qui a cédé jeudi son fauteuil à l’âge de 79 ans, a longtemps joué un rôle politique de premier plan en République démocratique du Congo, pays qui se prépare à vivre sa première passation pacifique du pouvoir depuis l’indépendance de 1960.

Mgr Monsengwo laisse la place à Mgr Fridolin Ambongo à moins de deux mois d’une présidentielle prévue le 23 décembre et qui doit entrainer la succession du président Joseph Kabila.

Enfant de la famille royale de l’ethnie Sakata le 7 octobre 1939 à Inongo dans la province de Mai-Ndombe (ouest de la RDC), Laurent Monsengwo Pasinya a été ordonné prêtre en 1963.

Créé cardinal par Benoît XVI en 2010, cette grande figure de l’Église catholique africaine, est membre du C9, le conseil des cardinaux choisis par le pape François pour l’aider à réformer le Vatican.

Premier Africain docteur en sciences bibliques, cet intellectuel jouit d’un grand prestige en RDC pour son rôle majeur dans l’ouverture démocratique au début de la décennie 1990, alors qu’il était archevêque de Kisangani (nord-est), la troisième ville du pays, et président de la conférence épiscopale nationale.

Initiateur en 1990 d’un mémorandum demandant plus de libertés au maréchal Mobutu, au pouvoir depuis près de 30 ans, Monsengwo était alors considéré comme « un personnage incontournable, le cerveau moteur de la poussée vers la démocratie », notent les écrivains Roger Gaise et Isidore Ndaywel dans un livre consacré au cardinal.

Pour le député Gilbert Kiakwama, témoin de cette époque agitée, il était « la passerelle idéale », une des « rares personnalités congolaises qui faisait l’unanimité ».

– ‘Vérité & Justice’ –

Il est à Kisangani lorsqu’éclate en 1996 la première guerre du Congo, qui verra Mobutu, abandonné par les occidentaux, chassé l’année suivante par les rebelles de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération (AFDL) de Laurent-Désiré Kabila, fortement appuyés par le Rwanda.

Rapidement Monsengwo se montre critique du nouveau pouvoir, attitude qu’il conservera après l’accession à la tête du pays de Joseph Kabila, à la suite de l’assassinat de son père en 2001, en pleine deuxième guerre du Congo (1998-2003).

Pendant ce conflit d’une extrême violence, il dénonce les crimes commis par les belligérants dans sa ville, et doit, pour sa sécurité, vivre un temps hors de Kisangani, pour le contrôle de laquelle Ouganda et Rwanda se livreront des combats sans merci, directement ou par milices congolaises interposées.

A la fin de la guerre, il ne participe pas à la transition politique mais reprend vite son rôle d’aiguillon du pouvoir.

Fin 2007, Monsengwo est nommé archevêque de Kinshasa. Sous son impulsion, l’Église catholique, seule institution réellement présente sur l’ensemble du territoire et dont se revendique environ 40% de la population, lance régulièrement des mises en garde au pouvoir.

En 2011, le cardinal conteste la réélection du président Kabila, en estimant que les résultats de la présidentielle de novembre ne sont « conformes ni à la Vérité, ni à la Justice ».

– ‘Blanc à la peau noire’ –

C’est là l’une de ses « grandes actions politiques », estime le député congolais d’opposition Juvénal Munubo, qui assimile l’archevêque de Kinshasa à un « opposant voilé », « le plus crédible de tous ».

Ses détracteurs l’accusent d’être proche de l’opposition, ou de jouer le jeu des Occidentaux : d’être « un Blanc à la peau noire ».

Il est néanmoins régulièrement consulté par des hommes politiques de tous bords.

« Que les médiocres dégagent » avait lancé Mgr Monsengwo après la répression de l’une des premières marches anti-Kabila le 31 décembre 2017 qui avait fait six morts à Kinshasa, après un second report des élections en RDC.

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