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Le « Comment osez-vous? » de Greta Thunberg, grand moment du mouvement climatique

Avec ses "Comment osez-vous?" impérieux adressés aux dirigeants mondiaux à l'ONU lundi, la jeune Suédoise Greta Thunberg a confirmé sa…

Avec ses « Comment osez-vous? » impérieux adressés aux dirigeants mondiaux à l’ONU lundi, la jeune Suédoise Greta Thunberg a confirmé sa place de porte-parole de toute une génération sur le climat, fruit d’un an de son propre acharnement, martèlent ceux qui la connaissent.

S’il n’a pas vraiment fait bouger les leaders qui se sont exprimés après elle, son discours de quatre minutes et demie est devenu immédiatement viral, suscitant des dizaines de milliers de partages et de commentaires sur les réseaux sociaux.

Le statut dominant de Greta Thunberg dans le mouvement climatique n’est pas si difficile à expliquer, disent ceux qui ont côtoyé la lycéenne de 16 ans, en année sabbatique.

« Elle a fait quelque chose d’inhabituel, une grève de l’école, alors que l’école c’est vraiment important pour les enfants », dit à l’AFP Jennifer Morgan, directrice exécutive de Greenpeace International. Cette grève, elle l’a lancée à Stockholm avec sa pancarte en août 2018.

La simplicité de l’action a vite fasciné en dehors de Suède, et un an après, ces grèves, régulières ou occasionnelles, ont gagné des dizaines de pays, propagées par les réseaux sociaux.

« Sa parole est très claire, et elle a prononcé des mots au sommet qui sont ressentis par énormément de gens », juge aussi Jennifer Morgan.

« Elle parle avec tant de passion qu’on est obligés d’écouter », dit à l’AFP la directrice exécutive d’Oxfam International, Winnie Byanyima.

Cette forme d’expression –toujours brève, percutante, et illustrée de quelques données scientifiques bien choisies– contraste avec les discours d’autres jeunes, comme on a pu le voir le week-end dernier à un sommet de jeunes. Certains s’expriment déjà comme leurs aînés, récitant de longs textes sans vrai sens de la formule.

La singularité de son expression, tantôt réservée, tantôt brute, est influencée par son syndrome d’Asperger, une forme légère d’autisme, dont elle dit qu’elle l’a rendue « très directe ».

« Tout le mouvement qu’elle a inspiré, ainsi que son discours d’hier, jouent un rôle très important pour faire évoluer l’air du temps », dit à l’AFP Bill McKibben, fondateur de l’organisation 350.org, active dans le mouvement des grèves.

« Notre idée de ce qui est normal et attendu est en train de changer de plus en plus vite grâce au travail de Greta », ajoute l’écologiste, qui l’a vue à Washington et New York.

– La voix de la science –

Comme la jeune Afghane Malala Yousafzai pour l’éducation des filles ou l’ancien lycéen américain David Hogg pour les armes, Greta Thunberg a été accusée d’être une enfant manipulée.

Elle-même a répondu qu’elle n’était pas une marionnette: « Il n’y a personne +derrière+ moi, à part moi », a-t-elle écrit sur Facebook en février. « Et oui, j’écris mes propres discours. Mais comme je sais que ce que je dis atteindra beaucoup, beaucoup de gens, je demande souvent des avis ».

Son entourage donne à l’AFP plusieurs noms de scientifiques réputés qu’elle consulte: Johan Rockström, Stefan Rahmstorf, Kevin Anderson, Jean-Pascal van Ypersele, Glen Peters…

« Je suis convaincu qu’elle écrit ses textes elle-même pour l’essentiel, même si elle les fait relire », confirme à l’AFP le climatologue belge Jean-Pascal van Ypersele, en contact régulier avec elle et son père. Par messages, il l’a aidée encore la semaine dernière à préciser un point avant son intervention au Congrès américain.

« Si elle passait dix minutes avec le président Trump à parler de physique et de chimie planétaires, à votre avis, qui dominerait? », demande Bill McKibben, admiratif.

Evidemment, elle ne voyage pas toute seule. Son père, le comédien devenu producteur Svante Thunberg, l’accompagne, ainsi qu’une amie de famille de longue date. Callum Grieve, de l’association Every Breath Matters, était aussi présent à Washington.

Elle ne gère pas non plus seule le déluge d’invitations et de demandes d’interviews. Les sociétés de communication spécialisées sur le climat et les ONG Climate Nexus et GSCC gèrent la logistique des demandes de presse, pro bono. De multiples ONG sont en contact pour coordonner des événements, comme 350.org, qui fait passer des invitations. « Elle n’a pas de grandes ONG derrière elle, elle est sa propre personne », dit la porte-parole de 350.org Kim Bryan.

Greenpeace Suède l’a un peu aidée l’hiver dernier avec de la nourriture et du soutien, dit Jennifer Morgan, mais à part cela, Greenpeace n’aide pas Greta Thunberg.

« Elle sait qu’elle peut nous appeler, mais elle a vraiment sa propre personnalité », dit-elle. « C’est du pur Greta ».

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