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Le hacker Rui Pinto piratait aussi le parquet portugais

Source de révélations fracassantes sur les pratiques controversées du foot-business ou l'origine contestée de la fortune de l'Angolaise Isabel dos…

Source de révélations fracassantes sur les pratiques controversées du foot-business ou l’origine contestée de la fortune de l’Angolaise Isabel dos Santos, le « hacker » Rui Pinto est aux prises avec la justice portugaise notamment pour avoir ciblé ses procureurs.

Parmi les délits informatiques et de violation de correspondance qui lui ont été imputés par le ministère public, et confirmés le 17 janvier par une juge d’instruction, figure le piratage de plusieurs boîtes mails du parquet général de la République.

Le Portugais de 31 ans, arrêté en Hongrie il y a un an à la demande des autorités de son pays, aurait notamment violé la correspondance d’Amadeu Guerra, le procureur en charge des grandes affaires politico-financières jusqu’à début janvier.

Le magistrat de 63 ans, qui dirigeait ce Département central d’investigation et d’action pénale depuis 2013, est désormais à la tête du parquet du district de Lisbonne.

Avant cela, ce procureur réputé pour sa volonté de rester « invisible » aux yeux des médias et des internautes, avait longtemps siégé à la Commission nationale de protection des données.

Le parquet général et le procureur Amadeu Guerra ne sont que deux des cibles de Rui Pinto, selon la décision de la juge d’instruction consultée par l’AFP.

– « Jamais un lanceur d’alerte » –

On y trouve aussi la société Doyen Sports, un fonds d’investissement basé à Malte que le hacker aurait tenté de racketter, le club du Sporting Portugal, la Fédération portugaise de football ou le cabinet d’avocats PLMJ, cité dans l’enquête journalistique baptisée « Luanda Leaks » sur la fille de l’ex-président angolais José Eduardo dos Santos.

Afin de pouvoir élargir son enquête sur Rui Pinto au-delà de ces infractions, la justice portugaise a obtenu des autorités hongroises une extension du mandat européen qui avait conduit à son arrestation à Budapest en janvier 2019 et à son extradition vers le Portugal deux mois plus tard.

Selon plusieurs médias portugais, le pirate informatique serait également à l’origine de la publication d’une série de courriels compromettants pour le Benfica, le club de football le plus populaire et le plus influent du pays.

Les avocats de Rui Pinto le présentent comme un lanceur d’alerte ayant agi par « devoir de citoyenneté et sans contrepartie », mais la justice portugaise lui refuse ce statut.

« L’accusé ne pourrait jamais être classé dans la catégorie des lanceurs d’alerte », a conclu la juge d’instruction Claudia Pina dans sa décision.

« Un lanceur d’alerte est un dénonciateur qui agit de bonne foi et qui a découvert les faits qu’il dénonce de façon légitime », a-t-elle expliqué en ajoutant que « l’agissement de Rui Pinto est très différent » de cela.

– « Absurdité » –

Dans le communiqué qui a révélé lundi que l’homme derrière les « Football Leaks » est aussi à l’origine des « Luanda Leaks », ses représentants réaffirment que leur client souhaite coopérer avec les autorités portugaises.

Mais celles-ce « n’ont demandé sa collaboration que pour son auto-incrimination », écrivent son avocat portugais Francisco Teixeira da Mota et son confrère français William Bourdon, qui représente d’autres lanceurs d’alerte comme Edward Snowden, Hervé Falciani (SwissLeaks) ou Antoine Deltour (LuxLeaks).

« Les corrupteurs au Portugal gambadent et Pinto est détenu. Absurdité. Exigeons leur protection », a ajouté Me Bourdon sur son compte Twitter.

Contrairement au Portugal, des pays comme la France, la Suisse ou la Belgique, se sont saisis des documents révélés par le hacker pour ouvrir des enquêtes sur les malversations présumées dans le football.

Prenant la défense de Rui Pinto avec autant de virulence qu’elle a dénoncé les investissements d’Isabel dos Santos au Portugal, l’ex-eurodéputée socialiste Ana Gomes a accusé lundi la justice portugaise d’adopter un point de vue « totalement obsolète » en refusant de reconnaître « le service public rendu par un lanceur d’alerte qui révèle la criminalité organisée ».

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