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Le Nicaragua expulse la mission de l’ONU après un rapport dérangeant

Deux jours après la publication d'un rapport de l'ONU dénonçant un "climat de peur" au Nicaragua à la suite de…

Deux jours après la publication d’un rapport de l’ONU dénonçant un « climat de peur » au Nicaragua à la suite de la violente répression des manifestations antigouvernementales, ce pays a expulsé la mission des Nations unies sur les droits de l’homme.

« Considérant que les raisons, les causes et les conditions qui ont donné lieu à l’invitation (de cette mission) ne sont plus réunies, ce ministère annonce y mettre un terme (…) à partir d’aujourd’hui, 30 août 2018 », peut-on lire dans un courrier du ministère nicaraguayen des Affaires étrangères daté de jeudi et rendu public vendredi.

Selon le gouvernement, l’invitation adressée à la mission de l’ONU prévoyait d’accompagner la levée des blocages mis en place par les manifestants jusqu’en juillet. Les forces de l’ordre avaient alors déclenché une violente opération pour déloger les rebelles.

Pour l’heure, les membres de la mission de l’ONU n’étaient pas joignables.

Cette décision « reflète les intentions d’une personne qui se sent complètement perdue et qui ne peut plus dissimuler ni sa responsabilité, ni la vérité », a déclaré la présidente du Cenidh Vilma Nuñez, parlant du président nicaraguayen de gauche Daniel Ortega.

Dans un rapport paru mercredi à Genève, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a dénoncé « l’usage disproportionné de la force, qui se traduit parfois par des exécutions extrajudiciaires; des disparitions forcées; des détentions arbitraires généralisées; la torture et les mauvais traitements ».

Selon le Haut-Commissariat, entre le 18 avril, date du début des manifestations contre le gouvernement Ortega et le 18 août, au moins 300 personnes ont été accusées « de terrorisme et de crime organisé » après avoir participé à ces protestations.

Dans un communiqué diffusé à l’occasion de la publication du rapport, le Haut-Commissaire Zeid Ra’ad Al Hussein a appelé la communauté internationale à agir pour enrayer la crise au Nicaragua.

– « Infamie » –

« La répression et les représailles contre les manifestants se poursuivent au Nicaragua, alors que le monde regarde ailleurs », a-t-il déclaré.

Daniel Ortega a réfuté ce rapport, qualifiant le Haut-Commissariat d' »instrument de politiques de terreur, de mensonge et d’infamie ».

Le gouvernement nicaraguayen a ajouté que cette institution des Nations unies avait « outrepassé ses prérogatives » et fait preuve d’un « manque de respect » envers la souveraineté nationale.

Le président Ortega est confronté depuis quatre mois à des manifestations de l’opposition réclamant sa démission. La répression de ces rassemblements, au cours desquels plus de 300 personnes ont été tuées selon des associations de défense des droits de l’Homme, a suscité de nombreuses critiques internationales.

Les autorités nicaraguayennes qualifient régulièrement de « putschistes » les participants aux manifestations de l’opposition. Elles font état d’un bilan de 198 morts pendant les manifestations et en imputent la responsabilité à l’opposition.

Jeudi encore, des centaines de Nicaraguayens ont formé une chaîne humaine à Managua pour demander la libération des personnes arrêtées lors des protestations.

« Liberté pour tous les prisonniers politiques ! » et « justice ! », ont scandé les manifestants qui se donnaient la main dans la partie ouest de la capitale.

Les manifestations de l’opposition au Nicaragua, le pays le plus pauvre d’Amérique centrale, ont commencé en avril contre une réforme de la sécurité sociale – abandonnée depuis – pour se durcir ensuite et s’étendre à tout le pays en réaction à la répression.

Depuis, des milliers de Nicaraguayens ont fui leur pays pour se réfugier notamment au Costa Rica voisin, de peur d’être interpellés.

Les opposants à Daniel Ortega l’accusent de corruption, de népotisme et d’avoir instauré une dictature avec son épouse Rosario Murillo, qui est vice-présidente. Ils demandent que l’élection présidentielle prévue pour 2021 soit avancée au mois de mars 2019, ce que refuse M. Ortega.

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