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Le Pont Morandi, un ouvrage des années 1960 truffé de problèmes

Le pont autoroutier de Gênes dont une portion s'est écroulée mardi faisant une trentaine de morts est un ouvrage en…

Le pont autoroutier de Gênes dont une portion s’est écroulée mardi faisant une trentaine de morts est un ouvrage en béton des années 1960, truffé de problèmes structurels dès sa construction et objet d’un coûteux entretien selon des experts.

« Pont Morandi à Gênes, une tragédie annoncée », titrait mardi le site spécialisé « ingegneri.info », en soulignant que l’ouvrage avait toujours fait l’objet de « doutes structurels ».

A l’appui l’analyse très technique d’Antonio Brencichun ingénieur et professeur à l’Université de Gênes, spécialiste du béton.

« Le viaduc Morandi a présenté dès le départ des aspects problématiques », commente-t-il, en évoquant une augmentation imprévue des coûts de construction, ainsi qu’une « évaluation erronée des effets différés (viscosité) du béton qui a produit un tablier non horizontal ».

Une anomalie de la voie rendue plus acceptable après des corrections répétées, note M. Brencich.

Le Pont Morandi a été construit entre 1963 et 1967. Ses mensurations sont impressionnantes: travée principale de 219 mètres, longueur totale de 1,18 km, piles de 90 mètres.

La technologie du béton armé précontraint était la marque de fabrique de son concepteur, l’ingénieur italien Riccardo Morandi, célébré en son temps et aujourd’hui décédé.

Fort du brevet « Morandi M5 », il avait utilisé cette technologie pour d’autres ouvrages, comme une aile d’un stade de Vérone en 1953.

Cette technique caractérise aussi un autre pont problématique plus long de Morandi, complété en 1962: le pont General Rafael Urdaneta qui enjambe la baie de Maracaibo, au Venezuela, d’une longueur de 8,7 km et doté de 135 travées.

– « Confiance illimitée dans le béton armé » –

En 1964, un pétrolier avait heurté ce pont, dont deux piles s’étaient écroulées dans la mer.

Le site « ingegneri.info » note que ce type d’infrastructure devrait avoir une durée de vie d’au moins 100 ans. Or dès ses premières décennies d’existence, l’ouvrage a fait l’objet de travaux de maintenance importants liés en particulier aux fissures et à la dégradation du béton.

Au début des années 2000, les câbles de suspension des années 1980 et 1990 ont par exemple été changés.

« Il y a 50 ans, on avait une confiance illimitée dans le béton armé. On pensait qu’il était éternel. Mais on a compris qu’il dure seulement quelques décennies », a expliqué dans la presse italienne Diego Zoppi, ex-président de l’ordre des architectes de Gênes.

« On n’a pas tenu compte à l’époque des continuelles vibrations du trafic, car le ciment se microfissure et laisse passer l’air, qui rejoint la structure interne en métal et la fait s’oxyder », note-t-il, expliquant ainsi les constantes opérations de maintenance du pont Morandini.

« L’Italie construite dans les années 1950 et 1960 a un besoin urgent de restructurations. Le risque d’écroulement est sous-estimé. Les ouvrages construits à cette époque sont en train d’arriver à un âge où ils deviennent à risque », a prévenu l’architecte.

La société autoroutière avait récemment lancé un appel d’offres de 20 millions d’euros pour des interventions sur le viaduc, rapporte l’agence de presse économique Radiocor.

Cet appel d’offre prévoyait précisément un renforcement des câbles de certaines piles (structures verticales qui soutiennent les arches d’un pont), dont la pile numéro 9, celle qui s’est écroulée mardi.

Compte tenu de l’importance de cet axe routier qui voit passer chaque année 25 millions de véhicules, l’hypothèse d’une démolition de l’ouvrage avait même été étudiée en 2009.

Au moment de l’accident, des travaux de maintenance étaient en cours.

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