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Le seul service d’ambulances gratuit de Somalie à court d’argent

Quand Mogadiscio a été frappée il y un an par l'attentat le plus meurtrier qu'ait jamais connu la Somalie, parmi…

Quand Mogadiscio a été frappée il y un an par l’attentat le plus meurtrier qu’ait jamais connu la Somalie, parmi les premiers sauveteurs à se précipiter sur les lieux figuraient, comme d’habitude, les membres d’Aamin, le seul service ambulancier gratuit du pays.

Fondé il y a plus d’une décennie par un dentiste somalien et financé par des donations, Aamin s’est révélé indispensable, en venant au secours des gens ordinaires, qu’ils soient victimes des violences armées, d’un accident de voiture ou d’une complication lors d’un accouchement.

Mais Aamin est maintenant à cours de financements. « C’est sur ce service que les gens comptent par temps de crise. Mais nous pourrions avoir à suspendre nos opérations en raison de contraintes financières », explique à l’AFP Abdulkadir Adan, le fondateur de la compagnie, âgé de 45 ans.

Avec la hausse de la demande, les coûts ont explosé, constate celui qui a fait des études de dentiste au Pakistan, avant de rentrer en Somalie en 2006. A son retour, il avait été consterné par l’absence d’ambulances gratuites à Mogadiscio, une ville d’environ deux millions habitants.

Depuis son cabinet de dentiste, dans le marché de Bakara, le poumon économique de la capitale somalienne, « il a vu des femmes sur le point d’accoucher emmenées en catastrophe à l’hôpital sur des charrettes à bras ».

Inspiré par l’œuvre du philanthrope pakistanais Abdul Sattar Edhi, dont la fondation du même nom gère aussi un service d’ambulances gratuit, M. Adan a dépensé 4.200 dollars (3.700 euros) de son propre argent pour transformer un vieux minibus en ambulance.

Aujourd’hui, Aamin dispose de 16 ambulances, emploie 36 médecins, chauffeurs et personnels divers, et doit trouver chaque mois 12.000 dollars pour subsister.

Les sources de financement sont la diaspora somalienne, des hommes d’affaires, ou même les étudiants de M. Adan dans une école de médecine de la ville, qu’il encourage à faire un don à la fin de ses cours.

Après l’attentat au camion piégé du 14 octobre 2017 dans le centre de Mogadiscio, le plus meurtrier de l’histoire de la Somalie, qui avait fait au moins 512 morts, les donations avaient augmenté, le travail d’Aamin étant reconnu à sa juste valeur.

– ‘Tant de vies sauvées’ –

Mais un an plus tard, l’argent manque à nouveau. « Sans les sacrifices consentis par l’équipe, beaucoup de personnes qui sont vivantes aujourd’hui seraient mortes », souligne M. Adan.

« C’est le pire jour de ma vie, l’incident le plus terrible », avoue-t-il en pensant à cet attentat dévastateur. Il confie que plusieurs des secouristes intervenus lors de cette journée pour transporter les corps démembrés ou calcinés, souffrent encore de cauchemars ou de crises d’angoisse.

Les Somaliens aisés peuvent s’offrir l’un des nombreux services d’ambulances payants de Mogadiscio. Mais pour les moins nantis, Aamin est la seule option, qui vient combler le vide laissé par un État complètement inopérant.

« Si Aamin ferme, beaucoup de Somaliens mourront », prévient Feisal Mohamed Rashid, 20 ans, rescapé d’un énième attentat dans la capitale le mois dernier.

Mohamed Dayib, 32 ans, n’a lui pas le moindre doute que c’est grâce au courage du personnel d’Aamin que son frère est sorti vivant d’un autre attentat l’an passé.

« Ce sera un désastre si ce service n’existe plus », prédit-il. « Qui va se précipiter sur le lieu d’une explosion si ce n’est Aamin? ». M. Adan a tenté de mobiliser les gens derrière sa compagnie, mais ce soutien n’est pas encore suffisant.

« Ce service est tellement important. Grâce à lui, tant de vies ont été sauvées », approuve Bashir Yusuf, un homme d’affaires de 42 ans.

« Le secteur privé est prêt à aider », promet-il. « Mais à long terme, il faut un financement durable du gouvernement parce que, dans ce pays vous pouvez être sûr d’une chose, c’est qu’un désastre peut frapper à tout moment ».

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