InternationalAFP




Les Soudanais dans les rues pour célébrer leur révolution

Rassemblements festifs et demande de "justice pour les martyrs" de la révolution: les Soudanais sont descendus dans les rues jeudi…

Rassemblements festifs et demande de « justice pour les martyrs » de la révolution: les Soudanais sont descendus dans les rues jeudi à l’occasion du premier anniversaire du soulèvement qui a mis fin au régime d’Omar el-Béchir, après 30 ans de règne autoritaire.

En après-midi, des milliers de personnes se sont rassemblées dans différents quartiers de Khartoum en scandant des slogans révolutionnaires comme « nous sommes des révolutionnaires, nous terminerons notre mission », tandis que des automobilistes accrochaient des drapeaux soudanais à leurs voitures.

« Nous sommes fiers de la révolution », a dit Hani Hamed au milieu d’une foule de manifestants euphoriques.

Nuançant légèrement l’enthousiasme de son camarade, Nahla Mohamed a ajouté: « Notre célébration ne sera pas terminée avant que justice ne soit rendue à nos martyrs ».

– Portraits de martyrs –

Nombre de manifestants arboraient d’ailleurs les portraits des personnes tuées pendant le mouvement de contestation.

Selon Amnesty, au moins 177 personnes ont été tuées dans la répression du mouvement et plus de 250 d’après un comité de médecins proche des manifestants, notamment au cours d’un massacre le 3 juin devant le QG de l’armée.

Pour rendre hommage aux pionniers de la révolution, deux trains remplis de centaines de personnes sont partis de Bahri près de Khartoum, en direction d’Atbara, une ville ouvrière du nord-est du pays qui a été le théâtre en décembre 2018 des premiers rassemblements après l’annonce soudaine du triplement du prix du pain.

Ce voyage symbolique, organisé par le gouvernement de transition et les Forces pour la liberté et le changement (FLC), principale organisation de la contestation, fait écho aux trains de manifestants d’Atbara envoyés à Khartoum durant la contestation.

Les trains devraient arriver en fin d’après-midi à Atbara, située à 350 km de la capitale. Et les manifestants sont invités à rester sur place jusqu’au 25 décembre, pour une semaine entière de festivités.

D’autres célébrations sont prévues notamment jeudi soir à Khartoum. Le grand jardin Green Yard, rebaptisé « place de la liberté », sera l’un des principaux lieux des festivités.

Le Premier ministre Abdallah Hamdok, nommé après de longues négociations entre l’armée et les contestataires, a décrété récemment que le pays devait célébrer sa révolution « durant tout le mois de décembre ».

Jeudi, dans la capitale, l’armée a barré les voies d’accès à son quartier général, haut lieu de la contestation où les manifestants avaient organisé un sit-in des semaines durant pour faire pression sur les militaires en faveur d’un régime civil.

En décembre 2018, les premières manifestations avaient éclaté à Atbara, ainsi qu’à Port-Soudan, principal port du pays situé à 1.000 km à l’est de la capitale, et à Nhoud (ouest).

Puis le mouvement avait gagné d’autres villes, dont Khartoum.

L’armée avait destitué Omar el-Béchir le 11 avril, en s’efforçant toutefois de garder la mainmise sur la transition, mais se heurtant à un rejet déterminé de la rue.

Un accord entre l’armée et la contestation a été trouvé en août, en vertu duquel un Premier ministre civil et un Conseil souverain composé de civils et de militaires, sont chargés de conduire la transition durant trois ans, en vue d’élections libres.

– « Avenir meilleur » –

M. Béchir, détenu depuis avril à Khartoum, a lui été condamné samedi dernier pour la première fois à une peine de deux ans en institution pénitentiaire pour corruption.

L’ex-dictateur reste la cible de graves accusations de la part de la Cour pénale internationale (CPI) pour des crimes lors du conflit sanglant au Darfour (ouest) à partir de 2003.

Dans un communiqué publié jeudi matin, l’ONG Amnesty International a salué la possibilité offerte aux Soudanais de « célébrer le fait que leur action collective a mis fin à une répression étouffante et donné l’espoir d’un avenir meilleur ».

Toutefois, l’ONG a rappelé que le gouvernement de transition devait « honorer son engagement de restaurer l’Etat de droit ». Il a aussi réitéré la nécessité d’extrader M. Béchir vers la Haye, où siège la CPI.

Dans un rapport sur les crimes au Darfour publié mercredi, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) a appelé la communauté internationale à faire pression sur le Soudan « pour faciliter l’accès à la justice (…) pour toutes les victimes, y compris celles de violences sexuelles ».

Parallèlement, le pays fait face à d’importants défis économiques.

Un an après le début de la contestation, le pays subit encore les effets de l’embargo économique américain (1997-2017), en raison de son maintient sur la liste noire américaine des « Etats soutenant le terrorisme », ce qui de facto l’exclut du système financier international et barre la route aux investissements étrangers.

Suivez l'information en direct sur notre chaîne