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« L’homme de Workington » ou l’électeur clé du succès aux législatives britanniques

Pour remporter les élections du 12 décembre, le Parti conservateur du Premier ministre britannique Boris Johnson doit convaincre l'électeur-clé, habitant…

Pour remporter les élections du 12 décembre, le Parti conservateur du Premier ministre britannique Boris Johnson doit convaincre l’électeur-clé, habitant de bastions travaillistes pro Brexit, symbolisé par « l’Homme de Workington », du nom d’une ville moyenne du nord-ouest de l’Angleterre.

Workington a voté Labour pendant un siècle, avec seulement une parenthèse conservatrice de trois ans dans les années 1970. Toutefois les habitants ont voté pour le Brexit en 2016 et la députée actuelle est une travailliste favorable au maintien dans l’UE, un contexte qui pourrait profiter à Boris Johnson.

Réparant son casier à homards dans une cabane de pêcheur près du port, Alan Ferris admet qu’il correspond bien à la définition de « l’Homme de Workington » créée par le cercle de réflexion Onward: un homme blanc, âgé, sans diplôme, qui a voté pour le départ de l’Union européenne lors du référendum de 2016.

Mais « si je vote Conservateur, ce sera par erreur et je me trancherais les doigts pour que ça ne se reproduise pas », lance à l’AFP cet homme de 67 ans, qui a exercé différents emplois, de la mine de charbon au bâtiment.

– « Nous faire sortir » –

L’hostilité envers les Tories est forte dans cette ancienne ville industrielle dont de nombreux habitants sont aujourd’hui employés dans la centrale nucléaire voisine de Sellafield.

Mais beaucoup ne sont pas convaincus par le chef du Labour, principal parti d’opposition, Jeremy Corbyn.

Ce dernier projette des nationalisations et une hausse des impôts et s’est aussi engagé à renégocier les conditions du Brexit puis à organiser un deuxième référendum.

Travailliste toute sa vie, Alan Ferris ne glissera pas de bulletin de vote pour ce parti le mois prochain. « Je ne peux pas voter pour Jeremy Corbyn. C’est un clown. Et sur le Brexit, il est totalement neutre », déclare-t-il en référence aux ambiguïtés du chef du Labour sur ce sujet sensible.

« Cette circonscription a voté pour le Brexit. Pourquoi ne le mettent-ils pas en oeuvre? Nos votes ne comptent pas », déplore-t-il.

Boris Johnson a été contraint de repousser de trois mois le Brexit, jusqu’à fin janvier, faute de soutien du Parlement à son plan de sortie de l’UE. Il espère désormais remporter une large majorité qui permettra à l’accord péniblement négocié avec Bruxelles d’être voté au Parlement.

Le dirigeant conservateur fait campagne en martelant « Réalisons le Brexit », un slogan qui séduit certains habitants.

« Les conservateurs sont les seuls à promettre de nous faire sortir » de l’UE, souligne Bron Stringer, 43 ans, qui tient un stand sur le marché de la ville.

Elle vote habituellement travailliste, mais ne porte pas Jeremy Corbyn dans son coeur et le traite de « communiste ».

Selon un sondage réalisé par Survation pour le Daily Mail le week-end dernier, les conservateurs sont en très bonne position à Workington, avec 45% d’intentions de vote, contre 34% pour le parti travailliste.

Lors des élections en 2017, la travailliste Sue Hayman s’était fait réélire avec 51% des voix. Ses partisans assurent qu’elle peut de nouveau l’emporter.

« Il n’y a pas que le Brexit, mais aussi le service public de santé » qui compte dans cette élection, déclare Charlotte Byers, commerçante de 50 ans, évoquant le bilan du Labour en matière de financement des services publics.

– Farage entre en scène-

A Workington, on se sent à mille lieues de Westminster.

« On est loin de tout ici, tout le monde se fiche de nous », dit Bron Stringer.

Les partisans du Brexit avaient largement exploité ce sentiment de désillusion lors de la campagne du référendum de 2016, et le populiste Nigel Farage, chef du Parti du Brexit, espère récidiver.

Workington a été l’une des premières étapes de sa campagne.

Son ancien parti, Ukip, avait décroché 20% des voix aux législatives de 2015, mais s’était effondré à moins de 4% deux ans plus tard. Son candidat en 2015, Mark Jenkinson, représente aujourd’hui les conservateurs et a fait de la réalisation du Brexit son principal argument de vente.

Lors d’un meeting dans un hôtel local, Nigel Farage a déclaré que l’accord de Brexit conclu par Boris Johnson « n’a de Brexit que le nom ». Et d’afficher clairement la couleur: « Si vous voulez quitter l’UE, ne votez pas Labour, parce qu’il est clair qu’ils vont trahir votre vote ».

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