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L’intercommunion, signe tangible de siècles de divisions

Les protestants mariés à des catholiques peuvent-ils communier avec leur conjoint dans une Eglise catholique ? Le Vatican a récemment…

Les protestants mariés à des catholiques peuvent-ils communier avec leur conjoint dans une Eglise catholique ? Le Vatican a récemment refusé la souplesse prônée par l’épiscopat allemand, signe le plus visible de divisions doctrinales persistantes, à la veille d’une visite oeucuménique du pape François à Genève.

L’Allemagne compte 40% de couples mixtes catholiques-protestants, à l’image d’un pays européen où aucune religion n’est majoritaire.

Pour ces couples, la pratique de « l’intercommunion » dans des églises catholiques ou des temples protestants est monnaie courante.

En février, la Conférence des évêques allemands a donc voulu formaliser la pratique en établissant des critères précis autorisant un protestant à recevoir l’eucharistie en couple, un projet adopté à une majorité des trois quarts.

Protestants et catholiques ont en commun le baptême, ainsi que l’eucharistie, en lui attachant toutefois une symbolique différente. Le droit canon permet déjà l’intercommunion en cas de « grave nécessité », comme un danger de mort.

Mais sept évêques allemands, opposés à cette ouverture et estimant qu’elle est du ressort de l’Eglise universelle, ont écrit en catimini une lettre au Vatican en demandant des clarifications.

Des évêques allemands aux opinions divergentes ont finalement été convoqués le 3 mai au Vatican sur cette épineuse question débattue depuis des siècles et le Vatican leur a demandé de se mettre d’accord « si possible à l’unanimité ».

Mais début juin, Mgr Luis Ladaria, le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, gardienne du dogme de l’Eglise catholique, écrivait une lettre aux évêques allemands pour leur dire que leur projet n’était « pas mûr » pour être publié car il soulève des « problèmes d’importance significative ».

Un coup de frein émanant du pape en personne. Le même jour, devant une délégation de l’Eglise évangélique luthérienne, il a estimé que certains points du dialogue oecuménique – dont l’eucharistie – nécessitaient des « réflexions poussées ».

Les forces conservatrices au sein du Vatican sont-elles montées au créneau face à l’imminence du danger?

La lettre, qui devait être confidentielle, a été divulguée sur le blog d’un vaticaniste conservateur. Et de nombreux experts l’ont interprétée comme un clair blocage du projet.

Au grand dam de Mgr Reinhard Marx, président de la Conférence épiscopale allemande et un conseiller du pape, qui défend l’ouverture. Il s’est dit « surpris » de ce brusque changement d’opinion qui n’a pas laissé le temps aux diocèses allemands de discuter, mais il a estimé que la lettre invitait à poursuivre les discussions.

L’affaire a été « un désastre en communication » en Allemagne et un signal négatif pour l’oecuménisme, souligne un prélat en colère, déplorant la déconnexion du Vatican dans un monde de plus en plus sécularisé. « Si ça continue, l’Eglise catholique va se réduire à un petit groupe de militants actifs! », a-t-il prévenu.

Si le pape prône un oecuménisme concret sur le terrain, les ouvertures théologiques, objet de discussions plus élitistes, restent donc laborieuses et rares.

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