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Massacre en Centrafrique: que s’est-il passé à Alindao en novembre?

Jeudi 15 novembre 2018, 112 personnes ont été tuées à Alindao, dans le centre de la Centrafrique, par des membres…

Jeudi 15 novembre 2018, 112 personnes ont été tuées à Alindao, dans le centre de la Centrafrique, par des membres de groupes armés rivaux. Un rapport d’enquête de l’ONU reçu vendredi fait la lumière sur la chronologie des événements.

Dans ce pays d’Afrique centrale de 4,5 millions d’habitants, miné par la violence depuis son indépendance en 1960, une quinzaine de groupes armés combattent pour l’influence et les ressources.

Parmi eux, le groupe armé Unité pour la paix en Centrafrique (UPC), qui contrôle une majorité de la région d’Alindao.

Dans le camp de déplacés de cette ville, de nouveaux affrontements ont opposé le 15 novembre ce groupe armé à des milices antibalaka, autoproclamées d’autodéfense et implantées localement.

Ce camp, où 17.732 personnes déplacées par le conflit qui dure depuis 2013 avaient trouvé refuge, a été brûlé et pillé.

Ces nouvelles tensions ont commencé le 14 novembre, explique l’ONU, lors d’attaques antibalaka contre des civils musulmans: « six combattants présumés antibalaka ont tué un agriculteur musulman de 50 ans dans son champ », explique notamment le texte.

Les populations musulmanes d’Alindao et l’UPC ont alors accusé les chrétiens, « en particulier les habitants » du camp de déplacés, tous chrétiens, de protéger des miliciens antibalaka.

A Alindao, 80% des habitants sont chrétiens. La majorité a fui la ville pour se réfugier dans les camps de déplacés en 2017, lors d’une éruption de violences qui avait fait plusieurs centaines de morts en ville.

Jeudi 15, à 8H00 du matin, « entre 200 et 400 personnes », dont des combattants de l’UPC en uniforme, sont entrés dans le principal camp d’Alindao, à pied et en voiture, ont raconté des témoins à l’ONU.

Quelque 35 Casques bleus étaient présents dans le camp ce matin-là. Ils ont affirmé n’avoir « initialement vu aucun assaillant en uniforme et aucune arme autre que des machettes », avant d’indiquer avoir « effectué des tirs de sommation ».

Face à l’entrée des combattants par le nord-ouest du camp, une dizaine de miliciens antibalaka, armés de fusils artisanaux, ont « dans un premier temps résisté à l’attaque ».

– Un groupe « tirait au hasard » –

Mais vers 10H00, les quelques miliciens antibalaka avaient « épuisé leur stock de munitions », et fui. Et « avant 16H les assaillants s’étaient retirés », continue le rapport.

Entre temps, un premier groupe d’assaillants « tirait au hasard à l’arme automatique sur les personnes déplacées », quand un autre groupe s’employait à un « pillage systématique des biens des personnes déplacées, ainsi que des biens de l’Église et des ONG ».

« Enfin, un troisième groupe de renfort de l’UPC en provenance de Bokolobo (à une soixantaine de km d’Alindao) a incendié le camp en fin d’après midi » et a quitté les lieux, indique le rapport.

Des miliciens antibalaka ont ensuite « refait surface » dans le camp, et « ont pillé le peu de biens des personnes déplacées restant des attaques précédentes ».

Vendredi 16 et samedi 17, la Croix-Rouge a découvert 20 fosses communes dans le camp de déplacés, selon l’ONU.

En tout, 100 personnes ont été tuées dans et autour du camp de déplacés, dont 38 femmes et 18 enfants. 68 étaient dans les fosses.

Une « majorité » de civils, note le rapport qui souligne qu’aucun musulman ne vit dans ou autour du camp.

Parmi les cadavres découverts à l’intérieur du camp figuraient ceux du vicaire général d’Alindao, d’un curé et d’un pasteur.

Douze musulmans dont six femmes ont aussi été retrouvés morts, tués le 15, sans que les circonstances de leur mort aient pu être déterminées par l’ONU.

En Centrafrique, où le conflit a obligé un quart de la population à fuir son domicile, un accord de paix a été signé début février entre Bangui et les groupes armés.

Parmi les signataires figurent l’UPC et les antibalaka, qui ont officiellement acté un cessez-le-feu.

Leurs combattants acteurs du massacre à Alindao peuvent être poursuivis pour les crimes commis, indique l’ONU dans son rapport, soulignant que « beaucoup » de violations du droit international humanitaire commises le 15 novembre « peuvent constituer des crimes de guerre ».

Une Commission vérité, justice, réparation et réconciliation (CRVJRR), doit être mise en place dans les trois mois en Centrafrique.

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