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Mike Pompeo, le pillier du trumpisme fragilisé par l’affaire ukrainienne

Mi-septembre, Mike Pompeo s'était imposé comme l'homme fort de la politique étrangère de Donald Trump après le limogeage de son…

Mi-septembre, Mike Pompeo s’était imposé comme l’homme fort de la politique étrangère de Donald Trump après le limogeage de son rival John Bolton. Deux semaines plus tard, celui qui reste l’un des principaux piliers du gouvernement américain est sur la défensive, fragilisé par l’affaire ukrainienne.

Si le président des Etats-Unis est visé par une procédure de destitution engagée par les démocrates, le rôle de son secrétaire d’Etat est désormais aussi sous les projecteurs. A tel point que les ténors de l’opposition dénoncent un « conflit d’intérêts » et réclament pour certains qu’il se « récuse » pour tout ce qui est en lien avec l’Ukraine.

Mike Pompeo était présent lors du fameux coup de fil du 25 juillet entre le milliardaire républicain et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky. Rien de plus anodin pour le ministre des Affaires étrangères.

Ce qui peut poser problème, c’est la première réaction de l’intéressé qui, appelé le 22 septembre sur la chaîne ABC à dire ce qu’il savait de cette conversation, avait esquivé, au point de donner à croire qu’il n’en connaissait pas le contenu. Or, Donald Trump y demandait au président ukrainien d’enquêter sur son rival politique Joe Biden.

« J’étais sur l’appel », a finalement confirmé mercredi Mike Pompeo lors d’une visite à Rome, parasitée, comme toute son action, par l’enquête du Congrès.

– Le dossier de Giuliani –

Les parlementaires démocrates tentent de démontrer que Donald Trump a fait pression sur Kiev pour obtenir de quoi salir l’ancien vice-président américain, jusqu’ici bien placé pour l’affronter lors de l’élection de novembre 2020.

Pour cela, ils ont commencé à auditionner des responsables du département d’Etat et enjoint personnellement le secrétaire d’Etat de fournir des documents clés. A quel point ses diplomates étaient-ils associés aux démarches de Rudy Giuliani, l’avocat personnel du président américain, qui ne cache pas son lobbying auprès de l’Ukraine? Savent-ils si Donald Trump est allé jusqu’à suspendre des aides, notamment militaires, pour faire plier le président Zelensky?

Rudy Giuliani a dit avoir « directement » confié en mars à Mike Pompeo un dossier à charge concocté par ses soins contre les activités ukrainiennes de Joe Biden et de son fils Hunter, et avoir obtenu l’assurance que la diplomatie américaine mènerait ses propres investigations. Une partie de ces documents ont été remis mercredi au Congrès par l’Inspecteur général du département d’Etat, et ont été balayés par les chefs de file démocrates comme un « ramassis de désinformation ».

« M. Pompeo n’a rien fait pour empêcher M. Giuliani de s’allier avec certains des personnages les plus corrompus d’Ukraine pour colporter des histoires fausses sur M. Biden », déplore le Washington Post dans un éditorial, accusant sans détour le ministre d’avoir « permis la destruction de la diplomatie américaine ».

Les premières réponses pourraient venir de Kurt Volker, l’ex-émissaire pour l’Ukraine qui a démissionné la semaine dernière. Ce diplomate respecté a été entendu jeudi à huis clos à la Chambre des représentants.

– Arguments du passé –

Selon le rapport du lanceur d’alerte par qui le scandale est arrivé, Kurt Volker a conseillé les autorités ukrainiennes « sur la manière de +composer+ avec les demandes du président ». Certains de ses collègues ont affirmé dans les médias américains qu’il avait, malgré les ingérences du camp Trump, tenté de défendre la politique traditionnelle américaine: fermeté face à la Russie et lutte contre la corruption.

Le Congrès veut aussi entendre d’autres responsables du « State Department », dont Thomas Ulrich Brechbuhl, très proche conseiller et ami de longue date de Mike Pompeo.Or le chef de la diplomatie américaine a pour l’instant défendu bec et ongles Donald Trump, comme à son habitude, nourrissant les soupçons de l’opposition.

Dans une lettre aux élus démocrates, il a dénoncé « une tentative d’intimider, de harceler et de maltraiter les éminents professionnels du département d’Etat ». Il a invoqué de « profondes faiblesses procédurales et légales » pour au moins ralentir l’enquête et retarder sa réponse aux injonctions.

Ironie du sort, c’est par sa virulence lors d’une enquête parlementaire que Mike Pompeo était passé de l’ombre à la lumière. Alors élu du Kansas, il menait le combat contre la gestion par le département d’Etat et sa cheffe démocrate Hillary Clinton de l’attentat de Benghazi, qui avait coûté la vie à l’ambassadeur des Etats-Unis en Libye en 2012.

Ses arguments de l’époque lui sont aujourd’hui renvoyés en boomerang par ses détracteurs, notamment lorsqu’il accusait l’exécutif de se « cacher derrière de vagues » prérogatives pour « refuser l’accès aux documents et aux témoins ». Ou quand il martelait vouloir « avancer plus vite » mais être « confronté à l’obstruction » du pouvoir.

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