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Nigeria: des milliers de personnes fuient après une attaque de Boko Haram

Des milliers de civils ont fui après l'attaque d'une localité du nord-est du Nigeria par le groupe jihadiste Boko Haram,…

Des milliers de civils ont fui après l’attaque d’une localité du nord-est du Nigeria par le groupe jihadiste Boko Haram, qui a également incendié des abris dans le camp de déplacés, selon l’ONG Médecins sans frontières (MSF) mercredi.

L’attaque survenue lundi à Rann, à environ 175 km au nord de Maiduguri, la capitale de l’Etat du Borno, porte la marque de l’ISWAP, la faction de Boko Haram affiliée au groupe Etat islamique (EI), qui a mis l’armée en déroute à de nombreuses reprises ces derniers mois.

Les insurgés ont obligé les soldats de la base militaire de Rann à battre en retraite avant d’incendier les camps de déplacés, forçant les civils à fuir en brousse.

Le responsable des programmes d’urgence à MSF, Hugues Robert, a affirmé à l’AFP qu’une petite équipe s’était rendue à Rann mardi pour évaluer les dégâts, décrivant une situation « chaotique ».

« Les chiffres obtenus hier de gens qui se sont rendus sur place (…) sont de 14 morts », trois soldats et 11 civils, a-t-il déclaré au téléphone depuis Genève où il se trouve. Des sources sécuritaires et humanitaires avaient dans un premier temps fait état de 7 morts.

Des milliers de personnes ont fui la ville pour se réfugier de l’autre côté de la frontière camerounaise. Beaucoup ont rejoint la ville de Bodo, où des enfants en bas âge, des femmes enceintes et des mères qui allaitent ont passé la nuit à la belle étoile à cause du manque d’abris.

« Notre équipe à Bodo estime que quelque 8.000 personnes sont arrivées hier et que plusieurs milliers d’autres pourraient arriver aujourd’hui », a précisé Hugues Robert dans un communiqué.

« Nous nous préparons à aider 15.000 personnes avec de la nourriture, de l’eau et des soins médicaux dans les prochains jours », a-t-il ajouté, demandant à « toutes les parties belligérantes » de « respecter la sécurité des civils ».

– ‘Comme un cimetière’ –

Rann a été visée à plusieurs reprises par les insurgés depuis le début du conflit il y a dix ans, qui a fait plus de 27.000 morts et plus de 1,8 million de déplacés.

Les opérations humanitaires avaient temporairement été suspendues en mars 2018, après une attaque de l’ISWAP au cours de laquelle trois humanitaires avaient été tués et trois autres enlevés. Deux des otages ont depuis été exécutés.

Des dizaines de personnes avaient par ailleurs péri en janvier 2017, lorsque l’armée avait bombardé « par erreur » les camps de déplacés de la ville, en pourchassant les insurgés.

Selon M. Robert, « les conséquences (de la dernière attaque) sont encore plus graves pour la population. Les structures et entrepôts des organisations humanitaires ont été impactés ».

« Les gens sont extrêmement isolés. Les services étaient déjà très basiques. Même cette réponse d’urgence est réduite », a-t-il déploré.

La situation s’est dégradée de façon inquiétante ces dernières semaines dans la région, malgré les affirmations répétées des autorités selon lesquelles Boko Haram est presque vaincu pour encourager les déplacés à retourner chez eux.

Plus de 30.000 personnes ont ainsi fui fin décembre les combats entre l’armée et les jihadistes dans la région de Baga, sur les rives du lac Tchad, qui sert de base arrière à l’ISWAP, selon l’ONU.

Selon un infirmier de MSF qui s’est rendu à Rann pour évaluer les besoins médicaux après l’attaque, la ville, qui accueillait environ 35.000 déplacés, est étrangement silencieuse, « comme un cimetière ».

« La ville a été dévastée et j’étais dévasté de voir ça », a déclaré Isa Sadiq Bwala, cité dans un communiqué. « De nombreuses parties de la ville ont été brûlées. »

Un incendie a ravagé la base, le bureau et la pharmacie de MSF. Les bâtiments d’autres organisations humanitaires ont été pillés et incendiés.

Les membres du personnel sont sains et saufs, mais une « longue file » de civils a pris la route du Cameroun frontalier, a-t-il ajouté: « Certains avaient des ânes, mais beaucoup ne portaient que leurs affaires. Ceux avec qui j’ai parlé partaient parce qu’ils avaient trop peur de rester ».

« De toute façon, il ne leur reste plus grand-chose ici. Leurs maisons ont disparu et je ne sais pas de quoi ils vivraient. Le marché a été incendié et pillé – les magasins de nourriture également ».

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