InternationalAFP




Nouveau Levothyrox en Suisse: après la peur, l’indifférence

En France, des milliers de patients se sont plaints des effets indésirables de la nouvelle version du médicament Levothyrox, introduite…

En France, des milliers de patients se sont plaints des effets indésirables de la nouvelle version du médicament Levothyrox, introduite en 2017. Huit mois après son arrivée en Suisse, la peur a fait place à l’indifférence.

– Meilleure communication –

Le Levothyrox, fabriqué par le laboratoire allemand Merck et prescrit contre l’hypothyroïdie, a changé de formule en France en mars 2017. A partir de juillet et août, des milliers de patients ont commencé à signaler des effets secondaires parfois très invalidants : fatigue, maux de tête, insomnie, vertiges, douleurs articulaires et musculaires et chute de cheveux.

De quoi angoisser les malades vivant en Suisse où la délivrance de la nouvelle formule des comprimés d’Euthyrox (nom de la marque en Suisse) s’est faite en avril 2018.

Cette crainte était d’autant plus grande que les patients habitant en France se sont rués sur les pharmacies des pays voisins, dont la Suisse, pour acheter l’ancienne formule.

Mais environ huit mois après son introduction sur le marché suisse, l’Organisation suisse des patients à Berne a indiqué à l’AFP ne pas avoir reçu de plainte, et l’autorité de régulation sanitaire Swissmedic n’a constaté « aucune hausse du nombre d’effets secondaires », selon sa porte-parole, Danièle Bersier.

« Afin d’éviter une situation comparable à celle observée en France », les autorités suisses ont mis en place des « mesures de communication » relatives « à la consultation et à la prescription médicales » adressées aux professionnels de santé et aux patients, a-t-elle expliqué.

Comme l’a souligné Thierry Buclin, médecin-chef au Service de pharmacologie clinique du centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), « il y a donc lieu de penser que les médecins suisses, sensibilisés comme les patients par l’affaire française répercutée dans les médias suisses auront été plus prompts à fournir des explications et à contrôler la TSH (dosage sanguin de la thyréostimuline, ndlr) de leurs patients ».

Médecin chef du service d’endocrinologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), Jacques Philippe, a déclaré à l’AFP qu' »il y a eu quelques problématiques avec des patients qui n’ont pas supporté » la nouvelle formule mais comme cela arrive pour tout médicament.

– Pas de surmédiatisation –

En France, des médecins ont estimé que la crise née suite à l’introduction de la nouvelle formule pouvait être due à la médiatisation des troubles secondaires, qui aurait ainsi amplifié psychologiquement ces effets chez certains patients.

En cas de surmédiatisation, le médicament est dès lors perçu « comme dangereux » et les gens vont lui « attribuer de manière erronée des symptômes courants que tout le monde ressent dans son quotidien comme les maux de tête ou la fatigue », a détaillé le Dr Philippe à Genève.

Or en Suisse, les médias ont su traiter le sujet avec « responsabilité et sans trop de sensationnalisme », a fait part Gerasimos Sykiotis, médecin spécialiste de la thyroïde au Centre hospitalier universitaire vaudois à Lausanne, interrogé par l’AFP.

– Traitements alternatifs –

Surtout, la substitution thyroïdienne en Suisse recourt à plusieurs médicaments, selon les experts. Le changement de la formulation ne concernait donc qu’une partie des patients en Suisse.

Et ceux qui ont senti des effets ont pu se tourner vers d’autres médicaments, en suivant les conseils de leurs médecins.

Alors qu’en France, dans un premier temps, les patients n’avaient pas d’alternative. « Toute la population était coincée par un produit », a expliqué le Dr Philippe aux HUG, précisant qu’en Suisse il y a quatre traitements possibles (Euthyrox, Eltroxine, Tirosint et Novothyral).

S’il n’y a donc pas de polémique ou crise de santé publique en Suisse, les médecins restent malgré tout prudents.

La plupart des patients n’ont fait le changement que récemment, beaucoup ayant très souvent des réserves disponibles chez eux ou chez leur pharmacies, étant donné qu’une boîte suffit normalement pour trois mois, a expliqué le Dr. Sykiotis à Lausanne.

Suivez l'information en direct sur notre chaîne