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Pedro Sanchez, un joueur tenace prêt à prendre des risques

Ancien joueur de basket, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, qui est parvenu à se faire reconduire au pouvoir mardi…

Ancien joueur de basket, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, qui est parvenu à se faire reconduire au pouvoir mardi par les députés espagnols, a démontré sa ténacité et sa disposition à prendre des risques dans un parcours politique mouvementé.

Le socialiste avait pourtant moins de cartes en mains après le scrutin législatif du 10 novembre, sur lequel il comptait pour se renforcer, mais qui s’est soldé par un recul de son poids à la Chambre (de 123 à 120 députés).

Pour cet économiste de 47 ans, cette équation difficile n’aura été qu’un obstacle de plus à surmonter dans une carrière politique qui a fait en 2014 d’un jeune député inconnu le chef du plus ancien parti d’Espagne.

Il est finalement parvenu à la résoudre en dépassant en à peine 48 heures ses réticences à s’allier avec son ancien frère ennemi à gauche, le chef de Podemos, Pablo Iglesias, qui sera son vice-président.

Et en faisant le pari risqué de compter sur l’appui du parti séparatiste catalan ERC pour être reconduit alors que les indépendantistes l’avaient lâché l’an dernier, précipitant la convocation d’élections anticipées.

– Un joueur téméraire –

« C’est un joueur, parfois téméraire, prêt à prendre des risques, qui ainsi déstabilise facilement ses adversaires », estime José Ignacio Torreblanca, du think tank European Council on Foreign Relations.

Avant de réussir enfin à se hisser au pouvoir l’an dernier, Sanchez était revenu de loin.

Donné pour politiquement mort après avoir essuyé en 2015 et 2016 les pires résultats électoraux de l’histoire du Parti socialiste ouvrier espagnol, il a été démis de la tête du parti par ses caciques. Mais a réussi, six mois plus tard, à se faire réélire par les militants après avoir sillonné l’Espagne dans sa voiture personnelle.

Tentant un coup de poker, il a pris la tête du gouvernement le 1er juin 2018 en rassemblant les voix de la gauche et des partis basques et catalans pour renverser le chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy, coulé par un scandale de corruption.

Sa majorité bancale a toutefois fini par exploser en février 2019, l’obligeant à convoquer des élections en avril. Vainqueur de ce scrutin, il s’est toutefois révélé incapable d’obtenir la confiance de la Chambre et est reparti une nouvelle fois en campagne, impeccablement cintré dans un costume sombre, pour un nouveau scrutin en novembre.

– Exhumer Franco –

Né à Madrid le 29 février 1972, Pedro Sanchez a grandi dans une famille aisée, entre un père entrepreneur et une mère fonctionnaire. Du haut de son 1,90 mètre, il joue au basket et étudie l’économie dans la capitale espagnole puis décroche un master en économie politique à l’Université libre de Bruxelles.

Marié et père de deux adolescentes, Sanchez, à l’aise en anglais contrairement à la plupart des hommes politiques de son pays, se présente sur son compte Twitter comme « Premier ministre d’Espagne et père ».

Mais la politique a toujours été sa passion.

Il s’inscrit au Parti socialiste à 21 ans, devient conseiller municipal de Madrid de 2004 à 2009, puis député. Et il est propulsé en 2014 à la tête du Parti socialiste, à la faveur des premières primaires de l’histoire du parti. Un parcours où l’obstination triomphe, raconté dans un livre intitulé « Manuel de résistance », le premier à avoir été publié par un chef de gouvernement espagnol en exercice.

Une fois à la Moncloa, Pedro Sanchez a frappé les esprits en nommant le gouvernement le plus féminin de l’histoire espagnole, en acceptant d’accueillir les migrants recueillis par le bateau humanitaire Aquarius, dont personne ne voulait, et en augmentant le salaire minimum de 22%.

Malgré l’opposition des descendants du dictateur, il est parvenu en octobre à exhumer Franco de son mausolée pharaonique, provoquant l’indignation de la droite, qui le traite de « profanateur ».

S’il a promis que le dialogue en Catalogne serait la « priorité absolue » de son nouveau mandat, la crise séparatiste dans cette région aura miné le précédent, en particulier lors des manifestations parfois violentes ayant éclaté après la condamnation en octobre de dirigeants séparatistes à la prison pour la tentative de sécession de 2017.

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