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Perpétuité pour Karadzic: les applaudissements des veuves de Srebrenica

Elles ont suivi depuis le mémorial la longue lecture du verdict en appel contre Radovan Karadzic, à quelques mètres des…

Elles ont suivi depuis le mémorial la longue lecture du verdict en appel contre Radovan Karadzic, à quelques mètres des tombes de leurs proches: à l’annonce de perpétuité, les veuves de Srebrenica ont applaudi et prié.

« Dieu merci pour cela, parce qu’un autre verdict nous aurait tuées », réagit les paumes tournées vers le ciel, Bida Osmanovic. Son fils de 22 ans, Faruk, fait partie des plus de 8.000 hommes et adolescents bosniaques musulmans tués en juillet 1995 lors du massacre de Srebrenica, dont Radovan Karadzic a été un des artisans.

« Mon âme a retrouvé la sérénité maintenant », « ma douleur est un peu apaisée », dit Nura Alispahic, une Sarajévienne de 74 ans, qui a perdu son mari et un fils de 15 ans à Srebrenica.

La vingtaine de femmes venues là, parfois accompagnées de proches, n’attendaient rien d’autre qu’une confirmation que l’ancien chef politique des Serbes de Bosnie durant la guerre intercommunautaire (1992-95) ne recouvrerait jamais la liberté.

« Mon espoir et ma seule pensée, c’est que (Karadzic) soit condamné à perpétuité pour avoir ordonné et fait tout cela avec Mladic et (Slobodan) Milosevic », l’homme fort de Belgrade, disait avant le verdict Hajrija Oric, 63 ans.

Elle montre des photographies de son mari Sahin et de son fils Elvir exécutés par les forces serbes de Bosnie de Ratko Mladic, qui venaient de prendre l’enclave de Srebrenica.

Chantre de l’épuration ethnique, Karadzic avait fait appel des 40 ans de prison prononcés en 2016 pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide. La peine a été aggravée. Mladic a été condamné à la perpétuité à l’automne 2017 tandis que Milosevic est mort en détention à La Haye en 2006.

– Combattre le déni –

Le massacre de Srebrenica, considéré comme un acte de génocide par la justice internationale, est l’une des atrocités dont a été reconnu coupable Karadzic. Son « intention génocidaire » a de nouveau été reconnue.

« Ce verdict arrive très tard, mais c’est un jour très important pour nous à cause du déni qui prend de l’ampleur », dit Nedzad Avdic, un survivant âgé de 40 ans, dont le père a été tué dans le massacre.

Ce verdict « va fermer la bouche à tous les négationnistes qui dénient ce qui s’est passé ici », dit-il.

« Personne ne peut nous dire que ce n’est pas la vérité », renchérit Hajrija Oric, à quelques mètres des alignements de plus de 8.000 tombes.

Comme elle, plusieurs veuves, mères et soeurs étaient venues à Potocari, prononçant une prière devant la pierre blanche marquée de l’inscription « Srebrenica 1995 » avant de se recueillir dans l’attente du verdict.

« On va chez nos enfants », a dit l’une d’elles en se dirigeant vers l’alignement de pierres tombales.

Mais le verdict contre Radovan Karadzic ne convaincra sans doute pas la plupart des Serbes orthodoxes, qui représentent un tiers des citoyens de Bosnie, pour environ une moitié de Bosniaques musulmans et 15% de Croates catholiques.

Pour beaucoup des membres de sa communauté, en Bosnie comme en Serbie, il reste un « héros » qui a protégé son peuple.

Actuel coprésident de Bosnie (poste qu’il partage avec un Croate et un Bosniaque), le nationaliste Milorad Dodik s’était dit convaincu mardi que Karadzic n’avait jamais décidé de s’en prendre à des civils.

« Personnellement, je ne crois pas à la légitimité de ce tribunal (international de La Haye). Il n’a pas rempli sa mission qui était de bâtir par ses verdicts une base à la réconciliation », a estimé le responsable avant même le verdict.

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