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PMA à l’étranger: après cinq ans d’échecs, Laura n’aura « peut-être jamais d’enfant »

A bientôt 43 ans, Laura n'aura "peut-être jamais d'enfant". Depuis cinq ans, cette Parisienne célibataire a vu toutes ses tentatives…

A bientôt 43 ans, Laura n’aura « peut-être jamais d’enfant ». Depuis cinq ans, cette Parisienne célibataire a vu toutes ses tentatives de PMA à l’étranger échouer. Epuisée et endettée, elle se trouve « à l’orée d’une décision très difficile »: renoncer à être mère.

Son parcours « très lourd » et illégal en France a démarré en 2013. « J’allais avoir 38 ans et je voyais l’horloge biologique avancer », raconte cette chargée de projet.

La procréation médicalement assistée (PMA) est actuellement réservée en France aux couples hétérosexuels en « âge de procréer » qui souffrent d’infertilité ou risquent de transmettre une maladie grave à l’enfant. Maintes fois repoussée, l’extension de la PMA à toutes les femmes, seules et en couple, sera débattue fin septembre à l’Assemblée nationale.

Laura, qui a demandé à changer son prénom pour des raisons personnelles et professionnelles, n’a pas foncé tête baissée vers une clinique. Elle réfléchit un an, soutenue par une thérapeute et un groupe de parole associatif. « C’est une décision mûrement réfléchie, en pensant toujours au bien-être de l’enfant. Quand on nous dit parfois que l’on consomme des enfants, c’est hyper violent » .

La quadragénaire, qui souhaite que son enfant « ait deux parents », cherche d’abord une coparentalité. Elle sollicite un ami mais le projet tombe à l’eau. Quant à l’adoption, les dossiers de « solos » sont en bas de la pile.

Elle se lance alors seule et passe ses premiers coups de fil à deux cliniques en Belgique, à Bruxelles et Liège. « Il y avait deux ans d’attente dans la première. Vu mon âge, on m’a dit +laissez tomber+. La seconde refusait les femmes célibataires ».

– « Entretien d’embauche » –

Elle part alors pour Elsendorp, aux Pays-Bas. Là-bas, l’enfant peut connaître à sa majorité le nom de son géniteur, un critère important pour Laura.

« J’y suis allée comme pour un entretien d’embauche, tellement j’avais l’habitude d’être jugée en France ». Sur place, l’appréhension se dissipe rapidement au fil des examens et des entretiens: « l’accueil a été merveilleux, très humain ».

Mais les fécondations in vitro (FIV) y sont réalisées au compte-goutte et, une fois encore, Laura est placée sur liste d’attente.

« La mort dans l’âme », elle se tourne alors vers l’Espagne, où le don de sperme est anonyme. Eugin, la très prisée clinique de Barcelone pour ses délais réduits, accepte de l’accompagner.

C’est le début d’un marathon médical fait de prises quotidiennes de médicaments et d’injections d’hormones à heure fixe. Les prises de sang et les échographies tous les 2 ou 3 jours obligent à s’absenter fréquemment du bureau, avec la peur de ne pas avoir l’autorisation de sa hiérarchie ou de susciter des questions.

« C’est une charge mentale énorme », confie Laura, qui a réussi à trouver une gynécologue acceptant de l’accompagner dans l’illégalité en France. Sans ordonnance, le traitement de FIV coûte « entre 1.000 et 2.000 euros », explique-t-elle.

Avec une vingtaine d’ovocytes mûrs, et quatre embryons recueillis, le traitement de Laura a fonctionné à merveille. La suite sera moins joyeuse: aucune des tentatives n’a débouché sur une grossesse. La dernière s’est soldée en mai par une fausse couche.

– « Colère » –

« Paumée », Laura est aujourd’hui « à l’orée d’une décision très difficile à prendre »: renoncer ou persévérer.

« J’ai conscience que plus on avance en âge, plus la grossesse est compliquée. Mais il y a toujours cette envie de donner de l’amour à un enfant, de le voir grandir et de le chérir. C’est douloureux de se dire que ça n’arrivera peut-être jamais », dit-elle.

Et puis, « c’est moche de parler d’argent », mais le compte bancaire de Laura commence à s’assécher. Plus de 15.000 euros dépensés, dont 11.000 euros empruntés en prétextant un achat de voiture, et beaucoup de privations.

Parmi les causes d’échec, « il y a la barrière financière » et le fait qu' »elles se décident souvent à passer le pas tardivement », explique à l’AFP Isabelle Laurans, présidente de l’association Mam’En solo, qui milite pour l’ouverture de la PMA aux femmes célibataires et a accompagné Laura.

« En Espagne, pourtant très catholique, en Angleterre, aux Pays-Bas, il y a de nombreux pays où ça marche. Pourquoi en France c’est aussi compliqué? Je suis en colère contre mon pays », confie Laura avec amertume.

Endettée jusqu’en 2022, le remboursement du prêt lui rappelle chaque mois son échec.

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