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Pour les rebelles syriens dans le sud, le choix entre « le mal et le pire »

Cibles d'une offensive du pouvoir de Bachar al-Assad et de son allié russe, abandonnés par leurs parrains américain et jordanien,…

Cibles d’une offensive du pouvoir de Bachar al-Assad et de son allié russe, abandonnés par leurs parrains américain et jordanien, les rebelles qui contrôlent le sud syrien se retrouvent acculés à choisir entre le « mal et le pire ».

Avec une marge de manoeuvre plus que limitée, quels sont concrètement les choix dont disposent les rebelles qui forment aujourd’hui une nébuleuse éclatée de petits groupes?

– Où sont les parrains internationaux? –

Les groupes rebelles du sud entretenaient après le début de la guerre des liens étroits avec les Etats-Unis, mais aussi avec la Jordanie où ont été militairement formés de nombreux combattants appartenant à la rébellion dite « modérée ».

Le 19 juin, le régime a lancé une offensive dans la province de Deraa pour en chasser les rebelles, faisant fi d’un cessez-le-feu observé depuis près d’un an après un accord négocié par les Etats-Unis, la Russie et la Jordanie.

Mais quelques jours après le début de l’assaut, Washington prévient les insurgés qu’ils ne devraient pas compter sur un appui militaire américain, a indiqué à l’AFP un commandant rebelle.

La Jordanie voisine du sud syrien assure, elle, poursuivre les contacts avec Washington et Moscou pour trouver une « solution politique ». Elle a par ailleurs répété son refus d’accueillir de nouveaux réfugiés.

Pour des experts, Amman ne serait pas contre une reprise de la région par le régime, ce qui apporterait un peu de stabilité et permettrait la réouverture de la frontière dont la fermeture s’est répercutée négativement sur l’économie jordanienne.

« L’abandon américain et la (décision de maintenir) fermée la frontière jordanienne semblent être un feu vert à l’opération russe dans le sud » et les choix des rebelles sont ainsi « limités », estime l’analyste indépendant originaire de la province de Deraa, Ahmad Abazid.

– Quelles alternatives ?

Les rebelles « ont le choix entre le mal et le pire », estime Sam Heller, du centre de réflexion International Crisis Group. « Soit la négociation avec la Russie, par l’intermédiaire de la Jordanie, ou la résistance, qui se terminera aussi par la négociation après une plus grande pression militaire ».

« Le scénario proposé aux factions du sud est différent des autres régions en raison de la position géographique du secteur, et de son importance stratégique », renchérit l’expert sur la Syrie Nawar Oliver.

Il rappelle que par le passé, pour garder le calme aux frontières jordanienne et israélienne, le centre MOC, une cellule d’opération américaine-jordanienne chargée de former les rebelles, « a fait de gros efforts pour empêcher les insurgés de s’engager dans plusieurs batailles » face au régime.

Et parce que le sud n’a pas connu de combats entre rebelles et régime aussi féroces que ceux d’Alep (nord) ou de la Ghouta orientale, aux portes de Damas, les experts ne s’attendent pas à des départs forcés des combattants vers d’autres territoires insurgés.

« Les évacuations ne sont pas envisageables », estime M. Oliver. « Les combattants vont probablement devenir une force de police » dans l’ouest de Deraa, ajoute-t-il, précisant que les factions se contenteront « d’un rôle dans la lutte contre » des jihadistes ayant prêté allégeance au groupe Etat islamique (EI) dans le sud-ouest de Deraa.

Et si le régime tergiverse quant à un maintien des rebelles sur place, « la Russie le poussera à accepter », précise-t-il.

Selon M. Abazid, les rebelles ont refusé une proposition russe relayée par la Jordanie, les invitant à « se rendre et à abandonner leurs armes lourdes », en échange de quoi les combattants qui le souhaitent « deviennent une force de police locale ».

Mais selon lui, si les rebelles sont conscients que tôt ou tard ils devront céder, ils essayent « d’améliorer les contreparties » de tout accord. Leur marge de manoeuvre est limitée, comme en témoigne leur recul rapide sur le terrain dans l’est de la province de Deraa.

– Quid de la stratégie du régime?

Dans son offensive dans le sud, le pouvoir a recours aux mêmes tactiques. Les opérations débutent par un déluge de frappes aériennes, tandis que les forces au sol oeuvrent en parallèle au morcellement des territoires rebelles pour les isoler et les affaiblir.

« L’incapacité des rebelles à résister n’est pas seulement liée à l’abandon de Washington, mais aussi au recours à l’aviation, décisif dans n’importe quelle bataille », explique M. Oliver.

Ces derniers jours, les frappes ont visé des secteurs à forte densité de population, touchant également des infrastructures vitales tels les hôpitaux.

« Faire le plus grand nombre possible de victimes, et éliminer les services de base (…) a pour objectif de pousser les rebelles à capituler, ou à accepter des (accords) de réconciliation (…) », renchérit M. Abazid.

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