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Présidentielle tunisienne : quelles chances pour les deux candidats du 2e tour?

L'un est constitutionnaliste mais néophyte en politique, l'autre est homme d'affaires mais a maille à partir avec la justice :…

L’un est constitutionnaliste mais néophyte en politique, l’autre est homme d’affaires mais a maille à partir avec la justice : Kaïs Saïed et Nabil Karoui, les deux qualifiés pour le second tour de la présidentielle en Tunisie, ont eu le mérite d’avoir su surmonter leurs handicaps pour surclasser les 24 autres prétendants à la magistrature suprême.Ce faisant, ils ont, à la surprise générale, déjoué les pronostics des observateurs qui donnaient victorieuses les forces politiques traditionnelles.

« Les Tunisiens ont montré à travers ce scrutin qu’ils veulent un changement radical, par rapport au système qu’ils ont connu depuis l’indépendance du pays, incarné par les héritiers de Habib Bourguiba ou de Ben Ali, et même par le pouvoir post-printemps arabe », a estimé Pr Babacar Samb, ancien directeur du Laboratoire d’Etude et de Recherche sur le monde arabe contemporain à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, par ailleurs ancien ambassadeur du Sénégal en Égypte.

Malgré sa posture d’outsider, Kaïs Saïed s’est retrouvé en tête du premier tour de la présidentielle tunisienne avec 18,40% des suffrages. Ce candidat indépendant a sûrement tiré profit de sa rupture avec le système en place. Sans parti, ni une équipe de campagne à l’image du Premier ministre Youssef Chahed arrivé 5è avec 7,38%, Kaïs a mené un combat solitaire basé sur la probité et la simplicité. Toutefois, son manque d’expérience en politique pourrait freiner son ascension, surtout dans le cadre des alliances qui vont naturellement se former, en perspective du second tour.

« Si Kaïs Saïed noue une alliance avec un ou des candidats qui ont déjà été aux affaires et dont la gestion financière a été jugée un tant soit peu indélicate, il peut subir la colère des électeurs qui s’étaient abstenus au premier tour », avertit Ibrahima Bakhoum, analyste politique.

Par contre, le réalisme politique qui commandera les alliances pour le second tour oblige à ne peut pas négliger le parti islamiste modéré, Ennahdha, arrivé troisième avec 12,88%, à seulement trois longueurs de Nabil Karoui, crédité, lui, de 15,58% des voix.

« Il y a encore une force islamiste qui tient la route en Tunisie », reconnait l’analyste politique sénégalais, selon qui Ennahdha, actuellement majoritaire au parlement, peut bien jouer les « faiseurs de roi ». Même si le report des suffrages du premier tour reste une des grandes inconnues !

En attendant la date du second tour dont l’un des enjeux sera de dépasser les 49% de taux de participation du premier tour, les candidats pensent également aux législatives du 6 octobre qui risquent de chambouler les alliances pour la suite de la présidentielle. Un avertissement pour Kaïs Saïed qui n’a pas déposé de liste pour le scrutin législatif !

Son adversaire au second tour, Nabil Karoui, actuellement en détention provisoire pour fraude fiscale et blanchiment d’argent depuis le 23 août dernier, est un homme d’affaires doublé d’un mécène. Si cette image qu’il s’est forgée n’est pas juridiquement irréprochable, il ne demeure pas moins qu’elle est cautionnée par un modèle sociétal basé sur la solidarité à l’égard des couches défavorisées.

Le candidat du parti Qabl Tounès pourra de nouveau faire campagne à partir de sa cellule, s’il ne bénéficie pas d’une liberté provisoire. S’il reste en prison, les Tunisiens seraient privés d’un débat télévisé entre deux grosses pointures de l’«anti-système ».

A ceux qui craignent que la machine judiciaire entrave son succès politique, l’avocat sénégalais Me Moussa fait remarquer que Nabil Karoui qui est poursuivi pour une infraction pénale, n’est pas encore condamné et que par conséquent il est présumé innocent.

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