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Prise d’otages de Beslan: les proches des victimes exigent une enquête « objective »

Des proches des victimes tuées en 2004 dans la prise d'otages de Beslan (Russie), qui avait fait plus de 330…

Des proches des victimes tuées en 2004 dans la prise d’otages de Beslan (Russie), qui avait fait plus de 330 morts dont 186 enfants, ont déclaré dimanche toujours attendre des réponses des autorités russes, accusées de mensonges et d’incompétence.

Dimanche a marqué le 15e anniversaire du massacre de Beslan, une ville du Caucase russe. Un commando islamiste composé de Tchétchènes et d’Ingouches avait fait irruption dans une école, pris en otage plus de 1.100 personnes dans un gymnase et piégé le bâtiment avec des explosifs.

L’assaut des forces de sécurité, après trois jours de négociations, avait tourné au massacre. Outre les tués, plus de 700 personnes avaient été blessés. 12 membres des forces spéciales avaient perdu la vie.

Demandant à Moscou de révéler la vérité sur le siège, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a estimé en 2017 que les autorités avaient monté une opération présentant de « graves défauts » et fait un usage excessif de la force.

« Malheureusement, aucune conclusion de la Cour européenne n’est prise en compte, et c’est très triste », a déclaré dimanche la présidente du groupe des Mères de Beslan, Soussana Doudieva.

« Nous ne cessons de repenser aux 1er, 2 et 3 septembre 2004, parce qu’il y a encore des zones d’ombre, des questions (…) Nous sommes inquiètes parce que tout n’a pas été fait, il n’y a pas d’enquête objective en cours », a-t-elle ajouté. « Nous avons peur que cela ne se reproduise ».

« Nous allons une fois de plus en appeler aux services d’enquête pour relancer l’enquête sur l’attaque de Beslan ».

Une cérémonie et un service religieux ont été organisés dimanche dans le gymnase de l’école, qui abrite désormais un mémorial où s’est réunie une foule de personnes en deuil, apportant peluches, bougies et œillets rouges.

— « Sans discernement » —

Selon la CEDH, la Russie aurait pu empêcher la prise d’otages de Beslan car les autorités disposaient « au moins quelques jours avant les faits » de suffisamment « d’informations précises sur un projet d’attaque terroriste dans la région, lié à la rentrée scolaire ».

D’où des mesures de prévention qualifiées d' »insuffisantes » par les juges, qui ont noté que ni l’administration de l’école ni le public n’avaient été prévenus.

Quant à l’assaut lui-même, si l’utilisation d’une force létale était « justifiée », « un usage aussi massif d’explosifs et d’armes frappant sans discernement ne peut être considéré comme absolument nécessaire », avait estimé la CEDH.

Cinquante-deux heures durant, parents et enfants avaient vécu un calvaire, privés d’eau. Les tentatives de négociation entre les autorités et les preneurs d’otages n’avaient donné que de maigres résultats.

Le 3 septembre 2004, une double explosion à l’intérieur du gymnase avait semé la panique, les enfants tentant de fuir sous les tirs des preneurs d’otages. Ces explosions avaient poussé les forces spéciales à donner l’assaut dans un chaos total.

D’après l’enquête officielle russe, les victimes ont péri au moment de ces explosions.

Mais l’enquête indépendante de la CEDH affirme que la plupart des explosifs mis en place dans le gymnase étaient intacts et que de nombreux cadavres de victimes ont été trouvés ailleurs dans l’école, commme s’ils avaient été utilisés comme boucliers humains par des insurgés en fuite.

Les autopsies pour établir les causes des décès n’ont jamais été effectuées et la version officielle « ne contenait pas un mot de vérité », selon un documentaire diffusé la semaine dernière par le journal indépendant Novaya Gazeta.

« Le but principal était d’éliminer les terroristes, pas de sauver des gens », explique le documentaire, qui accuse les autorités d’avoir fourni de fausses informations au public pendant le siège et refusé de négocier avec le leader séparatiste tchétchène Asla Maskhadov.

Dans une lettre ouverte publiée dimanche, Ella Kesayeva, qui a perdu plusieurs proches durant le siège, a demandé à cinq généraux russes impliqués dans l’opération de Beslan de répondre aux accusations les visant.

« Vous êtes au-dessus des lois, comme s’il n’y avait pas eu Beslan, et depuis 15 ans vous vivez dans la paix et le respect », a-t-elle écrit. « Dites-nous qui vous a donné l’ordre d’utiliser des armes mortelles dans l’école ».

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