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Réformes judiciaires en Pologne: malgré Bruxelles, Varsovie ne cède pas d’un pouce

Les conservateurs au pouvoir à Varsovie s'apprêtent à mettre en oeuvre mardi leurs réformes judiciaires controversées, ne donnant aucun signe…

Les conservateurs au pouvoir à Varsovie s’apprêtent à mettre en oeuvre mardi leurs réformes judiciaires controversées, ne donnant aucun signe d’assouplissement malgré la procédure d’infraction d’urgence lancée la veille par la Commission européenne.

Des manifestations de soutien aux juges qui contestent cette réforme sont attendues mardi soir et mercredi matin autour du siège de la Cour suprême à Varsovie.

La Commission européenne a envoyé lundi une « lettre de mise en demeure », à laquelle la Pologne a un mois pour répondre, première étape d’une procédure qui peut aller in fine jusqu’à la Cour de justice de l’UE (CJUE) et à d’éventuelles sanctions financières.

C’est ce mardi qu’entre en vigueur la réforme de la Cour suprême, qui permet d’envoyer à la retraite d’office plus d’un tiers des juges de la Cour (27 sur 72) âgés de plus de 65 ans.

– Ligne rouge –

Une « ligne rouge » à ne pas franchir, aux yeux de Bruxelles.

L’âge de départ à la retraite des juges a été abaissé de cinq ans par les conservateurs, dans le but affiché d’éloigner les magistrats ayant commencé leur carrière avant la chute du communisme.

Le même jour, le président Andrzej Duda devrait signifier à la présidente de la Cour suprême, Malgorzata Gersdorf, elle aussi ayant atteint l’âge de la retraite, la date à laquelle elle devrait céder son poste. La précision a été donnée lundi par une proche collaboratrice de M. Duda, la juriste Anna Surowka-Pasek.

Mme Gersdorf devrait être remplacée provisoirement par un juge de la Cour suprême choisi par le chef de l’Etat, en attendant l’élection de son successeur.

Or, Mme Gersdorf refuse de s’en aller, invoquant un passage de la Constitution qui fixe la durée de son mandat à 6 ans, ce qui situe son départ en 2020.

– Briser la caste des juges –

Pour les conservateurs au pouvoir, la réforme de la Cour suprême fait partie d’un effort indispensable pour briser une caste de juges, qu’ils considèrent corrompue et descendant de ses prédécesseurs communistes.

Pour l’opposition centriste, en revanche, le parti au pouvoir Droit et Justice (PiS) cherche à prendre le contrôle de l’appareil judiciaire pour s’assurer une mainmise complète sur l’Etat.

Elle accuse les conservateurs de violer un des principes fondamentaux de la démocratie, celui de séparation des pouvoirs, et de vouloir favoriser le choix des responsables-clés de l’appareil judiciaire parmi les magistrats qui leur sont favorables.

La position de la Commission européenne se rapproche de celle de l’opposition polonaise.

Le « manque de progrès » dans des discussions avec le gouvernement conservateur polonais, qui n’ont « pas apporté satisfaction », a poussé l’exécutif européen, garant des traités, à lancer cette procédure d’infraction « de toute urgence », a indiqué lundi le porte-parole de la Commission, Margaritis Schinas.

« En même temps, la Commission se tient prête à continuer le dialogue sur l’Etat de droit avec la Pologne, qui reste la voie préférée par la Commission pour résoudre la menace systémique qui pèse sur l’Etat de droit en Pologne », a tout de même souligné M. Schinas.

Une importante manifestation de soutien aux juges est prévue mardi soir devant la Cour suprême, tandis que mercredi matin –donc le 4 juillet, date à laquelle les juges « retraités » ne devraient plus s’y présenter–, les magistrats prévoient, au contraire, d’y entrer en procession, vêtus de leurs toges, entourant Mme Gersdorf.

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