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Russie: la justice lève l’assignation à résidence du metteur en scène Serebrennikov

Assigné à résidence depuis l'été 2017 sans téléphone ni internet, le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov va retrouver théâtres…

Assigné à résidence depuis l’été 2017 sans téléphone ni internet, le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov va retrouver théâtres et plateaux de cinéma: le tribunal qui le juge pour détournement de fonds a levé lundi son assignation à résidence.

La décision prononcée par un juge du tribunal de Moscou rend le réalisateur, qui rejette les accusations portées contre lui, libre de ses mouvements à condition de ne pas quitter la capitale russe.

« Cela signifie qu’il continuera à vivre dans son appartement de Moscou mais sera en mesure de le quitter, de travailler », a précisé à l’AFP l’un de ses avocats, Dmitri Kharitovov.

Le tribunal a pris la même décision pour deux autres personnes accusées dans cette affaire, dénoncée dans le monde de la culture comme une nouvelle attaque des milieux conservateurs russes contre la création artistique.

Kirill Serebrennikov, directeur artistique du Centre Gogol, théâtre qu’il a transformé en l’un des centres névralgiques de la culture contemporaine à Moscou, a assuré compter « fêter » la nouvelle avant de reprendre rapidement le travail, bien qu’il ait monté plusieurs films et spectacles depuis son domicile en transmettant des clés USB.

« Ce n’est pas très facile psychologiquement, mais il y a beaucoup de choses à faire. Nous avons des spectacles, des répétitions », a réagi le réalisateur de « Leto », ovationné lors du dernier festival de Cannes, cité par l’agence Interfax.

Actuellement jugé, Kirill Serebrennikov est soupçonné d’avoir détourné environ 130 millions de roubles (1,7 million d’euros) de subventions publiques destinées à son théâtre moscovite grâce à un système de devis et factures gonflés entre 2011 et 2014.

Lors de l’ouverture de son procès en novembre, le procureur l’avait accusé d’avoir « coordonné un groupe criminel » à des fins d’enrichissement personnel.

Le metteur en scène avait pour sa part répondu n’avoir été responsable que des « processus artistiques et de la formation des programmes » et n’avoir « rien volé ».

– Soutien international –

L’artiste avait été arrêté dans la nuit du 21 au 22 août 2017 alors qu’il se trouvait en plein tournage d’un film à Saint-Pétersbourg, puis assigné à résidence.

Depuis son arrestation, de nombreux appels à la levée des charges pesant sur lui ont été lancés par des figures du monde des arts russe comme par des personnalités culturelles internationales.

Pour ses partisans, il paye sa liberté de création et ses pièces parfois osées, mêlant politique, sexualité et religion, dans un pays où les autorités poussent pour un retour en force des valeurs traditionnelles et conservatrices.

A cause de son assignation à résidence, Kirill Serebrennikov n’a pas pu participer en mai dernier à la montée des marches à Cannes avec l’équipe de son film « Leto » (« L’été »), acclamé par la critique et présenté en compétition.

Le réalisateur avait dû terminer le montage chez lui.

Il avait aussi manqué en décembre 2017 la première de son ballet « Noureev », consacré au danseur étoile soviétique passé à l’ouest en 1961 et monté au Bolchoï de Moscou. Le spectacle lui-même avait été pris dans une controverse, retardant la première de six mois.

Début mars encore, la première de sa version de l’opéra « Nabucco » de Verdi a eu lieu à Hambourg, en Allemagne. Les images des répétitions étaient filmées sur téléphones et envoyées à l’avocat de l’artiste qui les lui transmettait dans son appartement-cellule sur une clé USB. Kirill Serebrennikov filmait alors ses propres commentaires qui effectuaient le trajet inverse.

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