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Rwanda: 22 ans de prison requis contre l’opposante Diane Rwigara

Le parquet rwandais a requis mercredi 22 ans de prison contre Diane Rwigara, opposante et critique du président Paul Kagame…

Le parquet rwandais a requis mercredi 22 ans de prison contre Diane Rwigara, opposante et critique du président Paul Kagame accusée d’incitation à l’insurrection et de falsification de documents, des charges qu’elle conteste vigoureusement.

Diane Rwigara, 37 ans, avait tenté de participer à l’élection présidentielle de 2017 contre le président Kagame mais sa candidature avait été invalidée par la commission électorale arguant de signatures selon elle falsifiées dans son dossier.

« Nous requérons que Diane Rwigara soit emprisonnée 15 ans pour incitation à l’insurrection et sept ans pour falsification de documents », a déclaré un représentant de l’accusation.

Depuis son arrestation, Diane Rwigara dénonce des poursuites montées selon elle de toutes pièces par le régime pour la réduire au silence.

« Si vous osez critiquer le gouvernement, voilà ce qui arrive: vous vous faites arrêter, emprisonner ou vous perdez la vie. Je m’attendais à une forme de riposte », avait-elle déclaré lors d’un entretien à l’AFP en fin de semaine dernière.

Le parquet a également demandé 22 ans de réclusion contre sa mère, Adeline Rwigara, « pour incitation à l’insurrection et promotion du sectarisme », dans un pays encore hanté par le génocide de 1994, qui fit plus de 800.000 morts essentiellement parmi la minorité tutsi.

Diane Rwigara, sa mère et sa soeur Anne, avaient été arrêtées et emprisonnées en septembre 2017. Diane et sa mère ont été remises en liberté sous caution début octobre. La soeur avait recouvré la liberté un an auparavant, les charges pesant contre elle ayant été abandonnées.

Devant le tribunal mercredi, Diane Rwigara s’est montrée combattante : « Je maintiens mes propos, ils sont le reflet de mon parcours politique couplés à l’appel lancé aux Rwandais de résister à la peur et de parler haut et fort pour notre pays ».

Diane Rwigara a à plusieurs reprises dénoncé la situation des droits de l’homme dans le pays et accusé le gouvernement rwandais de maquiller les chiffres de l’économie pour les enjoliver.

– ‘Dénoncer les injustices’ –

M. Kagame, crédité de l’important développement d’un pays exsangue au sortir du génocide de 1994, est régulièrement accusé de bafouer la liberté d’expression et de museler toute opposition.

Il a été réélu le 4 août 2017 pour un nouveau mandat de sept ans avec près de 99% des voix. Une réforme de la Constitution adoptée par référendum fin 2015 lui permet de potentiellement diriger le pays jusqu’en 2034.

Le rejet de la candidature de Mme Rwigara par la Commission électorale avait été critiquée par des gouvernements occidentaux et des groupes de défense des droits de l’homme.

De son côté, Adeline Rwigara a réitéré que mari, Assinapol, père de Diane, avait selon elle été tué en 2015 par des agents de l’Etat qui avaient maquillé son assassinat en accident de la circulation.

« Je maintiens mes déclarations et je continuerai à dénoncer les injustices auxquelles ma famille doit faire face », a-t-elle affirmé.

Entrepreneur rwandais ayant fait fortune dans l’industrie et l’immobilier, Assinapol Rwigara avait financé dans les années 1990 le mouvement rebelle Front patriotique rwandais (FPR) de M. Kagame. En juillet 1994, le FPR allait renverser le pouvoir extrémiste hutu, mettant fin au génocide.

Depuis l’arrestation de Diane Rwigara en 2017, sa soeur et ses frères ont été interrogés, des biens leur appartenant ont été saisis et vendus aux enchères dans le cadre d’un redressement fiscal de plusieurs millions de dollars tandis qu’un hôtel de la famille a été rasé au motif qu’il ne respectait pas les règles d’urbanisme de Kigali.

Dans la salle d’audience, une des principales figures de l’opposition rwandaise, Victoire Ingabire, a assisté aux débats avec beaucoup d’intérêt, elle qui fut également empêchée de participer à la présidentielle en 2010 avant d’être condamnée à 15 ans de prison. Courant septembre, elle a bénéficié d’une libération anticipée décrété par le gouvernement.

Le verdict dans l’affaire Diane et Adeline Rwigara sera rendu le 6 décembre par une formation collégiale de trois juges.

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