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Scandinaves tuées au Maroc: les complices présumés nient leur implication

Une dizaine d'accusés ont nié jeudi devant la justice marocaine toute participation dans l'assassinat de deux jeunes touristes scandinaves, certains…

Une dizaine d’accusés ont nié jeudi devant la justice marocaine toute participation dans l’assassinat de deux jeunes touristes scandinaves, certains accablant le cerveau de l’opération, Abdessamad Ejjoud.

Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et son amie Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans, ont été décapitées mi-décembre au nom du groupe jihadiste Etat islamique (EI) alors qu’elles campaient sur un site isolé avant une randonnée en montagne, dans le Haut-Atlas (sud).

Le procès des 24 hommes soupçonnés d’être liés à ces meurtres et d’appartenir à une cellule jihadiste se tient devant la chambre criminelle de la cour d’appel de Salé depuis le 2 mai. Après une audience de près de six heures, le procès a été renvoyé au 20 juin.

Si les hommes directement impliqués dans l’équipée meurtrière sont passés aux aveux, leurs complices présumés, accusés de « constitution d’une bande en vue de commettre des actes terroristes », démentent, eux, tout implication dans l’affaire.

L’un d’eux, cependant, a affiché ouvertement son soutien à l’EI pendant l’audience de jeudi.

– Participation à des réunions –

Said Toufik, un ancien soldat âgé de 23 ans, s’est dit « convaincu » par le jihadisme, en expliquant s’être radicalisé après avoir quitté l’armée en 2016 et avoir eu des « contacts » avec des groupes radicaux, notamment en Afghanistan. « Il aurait été préférable d’assassiner des hommes et non des femmes » car « ce sont eux qui tuent les frères syriens », a-t-il dit lors de l’audience.

Les autres complices présumés démentent adhérer au jihadisme mais reconnaissent qu’ils fréquentaient les principaux suspects et/ou participaient à des « réunions » organisées par Abdessamad Ejjoud, tout en assurant n’avoir rien su de ses projets.

Ejjoud, un marchand ambulant de 25 ans, a pour sa part reconnu avoir assassiné une des deux touristes. Younes Ouaziyad, 27 ans, a reconnu avoir décapité la seconde et Rachid Afatti, 33 ans, avoir filmé la scène avec son téléphone portable.

Des images de la décapitation et une vidéo de serment d’allégeance à l’EI ont été diffusées sur les réseaux sociaux. L’EI n’a pas revendiqué le double assassinat.

Ejjoud, un repris de justice devenu imam hors du champ religieux contrôlé par l’Etat marocain, a affirmé avoir formé un groupe après sa sortie de prison en réunissant autour de lui d’anciens compagnons de détention ainsi que des « frères » de milieu modeste, de niveau d’instruction très bas, vivant de petits boulots dans des quartiers déshérités de Marrakech, destination touristique phare du royaume.

Pourquoi se réunissaient-ils ? « Nous abordions des sujets religieux », assure un des accusés, Noureddine Belabed, 30 ans, déjà condamné par le passé à trois ans de prison pour « apologie du terrorisme ».

« Nous allions prier ensemble » mais « n’avons jamais rien planifié », dit un autre, Abdelkebir Akhmayej, 32 ans. « Nous allions aussi à la pêche », dit-il, visiblement apeuré par les questions des juges.

– Cheikh salafiste –

« Je n’ai jamais parlé de terrorisme », assurent tour à tour deux autres accusés, un menuisier de 25 ans et un imam par intermittence âgé de 30 ans qui vient de passer son bac en prison. D’autres, au contraire, assurent qu’Ejjoud faisait tout pour les embrigader.

Le rôle d’un cheikh de Marrakech, responsable d’une association salafiste se présentant comme hostile au jihadisme et rejetant toute forme de violence, a été aussi questionné pendant l’audience.

Ce cheikh, Mohamed al-Maghraoui, a entre autres fait parler de lui avec une fatwa autorisant le mariage des fillettes de 9 ans. Plusieurs prévenus, dont Ejjoud, ont suivi des enseignements coraniques dans ses écoles.

« Al-Maghraoui a deux visages: celui qu’il montre aux autorités, et un autre, plus radical, avec des idées extrémistes », a accusé jeudi un des accusés, Abdelaziz Feryat, 30 ans.

Un des avocats de la partie civile a demandé que le religieux soit convoqué devant le tribunal. Le président de la cour n’a pas statué sur cette requête.

Les principaux suspects de l’assassinat des deux Scandinaves risquent théoriquement la peine de mort – toujours prononcée au Maroc même si un moratoire est appliqué de facto depuis 1993.

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