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Trump-Pelosi, étincelles en vue à Washington

Lui à la Maison Blanche, elle au Congrès. Pendant deux ans, Donald Trump et Nancy Pelosi vont devoir travailler ensemble…

Lui à la Maison Blanche, elle au Congrès. Pendant deux ans, Donald Trump et Nancy Pelosi vont devoir travailler ensemble à Washington. Mais la cohabitation s’annonce terriblement compliquée.

Le président (républicain) des Etats-Unis ne pourra se passer de la présidente (démocrate) de la Chambre des représentants s’il veut étoffer un bilan législatif jusqu’ici plutôt maigre.

L’élue de Californie, désormais troisième personnage de l’Etat, aura besoin du locataire de la Maison Blanche pour démontrer, à l’approche de 2020, que les démocrates sont prêts à gouverner et ont autre chose à proposer que des slogans anti-Trump.

Le parcours, le style, les orientations: tout sépare le magnat de l’immobilier au goût assumé de la provocation, arrivé avec fracas à la présidence, et la députée de San Fransisco, fine connaisseuse des arcanes du pouvoir passée maître dans l’art des tractations au Capitole.

Ces dernières semaines, le président de 72 ans, jamais avare en surnoms, piques ou insultes pour ses adversaires, a soigneusement épargné l’élue démocrate, de six ans son ainée.

« Je l’aime bien. Vous pouvez le croire ? J’aime bien Nancy Pelosi. Elle est dure et elle intelligente, elle mérite d’être +Speaker+ », lançait-il depuis les jardins de la Maison Blanche peu après la vague démocrate des élections de mi-mandat, offrant même d’aller chercher quelques votes républicains si la fronde au sein de son propre camp menaçait son élection.

Va-t-on assister à une relation d’un nouveau genre et voir émerger un Trump plus constructif face à une Pelosi pugnace qui devint, en 2007, la première femme de l’histoire des Etats-Unis à accéder au prestigieux perchoir, un poste qu’elle vient de retrouver jeudi ?

Dans la capitale fédérale américaine, peu y croient.

« Je ne pense pas qu’il la respecte, je pense qu’il la craint », résume Julian Zelizer, enseignant à l’université de Princeton. « Il a simplement conscience des luttes de pouvoir à Washington et de la façon dont les élections de mi-mandat ont modifié la dynamique », explique-t-il à l’AFP.

Et l’historien de ne pas exclure un spectaculaire et soudain changement de ton: « S’il sent qu’elle est sur la défensive ou vulnérable, il sonnera la charge sur Twitter ».

– « Vous avez dit Trump? » –

Une brève mais mémorable passe d’armes a déjà eu lieu mi-décembre dans le Bureau ovale lorsque Nancy Pelosi a évoqué, à dessein, le « shutdown Trump », à propos de la paralysie budgétaire dont les deux camps se renvoient la responsabilité.

« Vous avez dit Trump? », a-t-il bondi, piqué au vif. « J’allais l’appeler le shutdown Pelosi…. », a-t-il ajouté peu après, tentant de reprendre la main.

Quelques pistes de travail ont été évoquées: un plan de modernisation des infrastructures (routes, ponts, tunnels…) ou une loi visant à faire baisser les prix des médicaments sur ordonnance.

Mais la partie s’annonce rude.

« Ponctuellement, ils pourront joindre leurs efforts, mais ces moments resteront relativement rares », explique à l’AFP le politologue Larry Sabato, de l’université de Virginie.

« Trump ne peut être vu comme cédant à la volonté de Pelosi. Et Pelosi provoquera une révolte dans ses rangs à la Chambre si elle cède quoi que ce soit à Trump », explique-t-il. « Les démocrates ont été élus pour mettre Trump sous surveillance et contrarier ses projets, point barre ».

Nancy Pelosi a déjà occupé le même poste à la Chambre, avec un président républicain aux commandes: George W. Bush. Mais le 45e président est très différent du 43e. Et l’élue de Californie, qui parle toujours en termes respectueux de la famille Bush, rejette toute comparaison entre les deux hommes.

« Lorsque vous négociez avec quelqu’un, vous devez partir sur des bases solides, sur des faits », a-t-elle souligné jeudi sur NBC. « C’est difficile de faire cela avec le président (Trump) car il ne respecte pas la science, les preuves, la vérité ».

Reste une question: comment se comportera Donald Trump face à « Madame Speaker » ?

« Je ne sais pas s’il sait comment travailler avec des femmes au pouvoir et des femmes fortes. Nous verrons », a répondu cette dernière, quelques heures avant sa prise de fonction.

Et d’ajouter, en forme de mise en garde: « Espérons que cela se passera bien de ce point de vue, car aujourd’hui marque un tournant pour beaucoup de monde, au Congrès, à Washington et dans le pays tout entier ».

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