DAKAR — La poignée de main était ferme, le décor, solennel. Ce mardi à Dakar, dans le bureau feutré du ministre de l’Économie, Abdourahmane Sarr, et le directeur adjoint du FMI, Mlachila Montfort, ont engagé un dialogue dont les termes résonnent bien au-delà des murs de la capitale sénégalaise. Une rencontre à haut risque, sur fond d’ajustement budgétaire et d’attente d’un nouvel accord avec l’institution de Washington.
D’emblée, le ministre sénégalais a campé son discours sur une ligne de crête : oui à l’assainissement, mais non au pessimisme. « Le Sénégal conserve un potentiel de croissance robuste », a-t-il assuré, face aux inquiétudes sur l’impact social des coupes budgétaires prévues pour 2025-2026. Son credo : l’élimination des dépenses « non productives » est un passage obligé, une cure d’austérité pour renforcer les fondamentaux de l’économie.
Derrière cette rigueur affichée, le gouvernement garde les yeux rivés sur un horizon plus lointain : la Vision Sénégal 2050. Un projet de transformation structurelle qui promet une croissance « vigoureuse », à condition de traverser sans encombre la période de restrictions actuelles.
La dette, point de friction stratégique
Sur le dossier brûlant de la dette publique, Abdourahmane Sarr a affiché une assurance calculée. « Son caractère est soutenable », a-t-il répété, en rappelant que les indicateurs officiels restent alignés sur les standards internationaux. Mais le ministre est allé plus loin, portant une requête subtile : que le FMI accepte d’élargir son cadre d’analyse.
Intégration dans une union monétaire, transferts des migrants, accès aux marchés financiers… Autant de « particularités » sénégalaises qui, plaide-t-il, devraient être intégrées dans l’équation. Une manière de demander à l’institution une grille de lecture moins standardisée, plus attentive aux réalités locales.
L’accord, catalyseur de financements
Malgré les désaccords potentiels, la volonté de parvenir à un nouvel accord avec le FMI ne faiblit pas. Le ministre y voit un levier « catalytique », un sésame pour débloquer d’autres financements et accélérer la mise en œuvre des projets nationaux. Les discussions se poursuivent, mais l’enjeu est désormais clair : concilier la discipline exigée par le Fonds et les impératifs de développement d’un pays en quête d’émergence.
Dans les couloirs du ministère, on se garde de tout triomphalisme. La route est encore longue, et le pari de la rigueur pour la croissance reste à gagner.
