LUANDA – Ce lundi, la capitale angolaise bruisse d’une énergie particulière. Sous les ors des palais et dans les salles de conférence climatisées, près de 80 dirigeants africains et européens se croisent, sourires de circonstance et poignées de mains stratégiques. Mais dans ce ballet diplomatique bien rodé, un nouveau venu fait son entrée avec l’assurance tranquille de celui qui vient bousculer l’ordre établi : le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye.
Arrivé dimanche soir, le plus jeune chef d’État africain n’est pas venu à Luanda pour une simple tournée de politesses. Il y mène une offensive. Le thème du sommet, « Promouvoir la paix et la prospérité grâce à un multilatéralisme efficace », résonne comme une partition qu’il compte bien réorchestrer. Pour Dakar, ce 7e Sommet Union africaine–Union européenne, qui marque les 25 ans d’un partenariat parfois tiède, n’est pas une célébration. C’est une opportunité historique de redéfinir les règles du jeu international.
Le Sénégal, porte-voix d’un continent en quête de justice
Depuis son accession au pouvoir, la diplomatie de Bassirou Diomaye Faye se veut le fer de lance d’un rééquilibrage. À Luanda, sa feuille de route est claire : plaider pour un multilatéralisme où l’Afrique n’est plus un invité, mais un acteur à part entière dans les arènes du G20 et de l’ONU. Son discours est un mélange de fermeté et de pragmatisme. Il exige une réforme de l’architecture financière mondiale, un allègement du fardeau de la dette et un accès facilité aux financements. La sécurité, souvent définie par d’autres, doit, selon lui, être repensée pour coller aux réalités du terrain.
Face à lui, une Union européenne en repositionnement. Bruxelles brandit ses chiffres : premier partenaire commercial, accès sans droit de douane pour 90% des exportations africaines. Mais le Sénégal, et avec lui une bonne partie du continent, regarde au-delà de ces statistiques. L’enjeu n’est plus l’aide, mais le partenariat : investissements productifs, transfert de technologies, coopération stratégique sur un pied d’égalité. Dans l’ombre de Luanda, se profile la concurrence d’autres puissances – Chine, Turquie, Russie – qui obligent l’Europe à repenser son approche.
Au-delà des discours, l’espoir d’une feuille de route historique
Les discussions, qui s’articuleront autour de la paix, des migrations et du développement durable, seront scrutées à la loupe. Le Sénégal y défend une approche résolument « co-construite », loin des schémas hérités du passé.
L’objectif final de ce sommet est l’adoption d’une déclaration conjointe qui tracera la voie du partenariat pour la prochaine décennie. Dakar travaille à y inscrire durablement sa vision : un partenariat UA-UE enfin remodelé, plus équitable, capable de soutenir concrètement l’industrialisation de l’Afrique et d’entériner son nouveau rôle sur l’échiquier mondial. À Luanda, Bassirou Diomaye Faye ne représente pas seulement le Sénégal ; il incarne les ambitions d’une génération qui veut écrire elle-même son histoire.
