Le désert d’Arabie, habitué aux mirages, assiste cette semaine à une scène bien réelle : l’arrivée du Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko pour une visite officielle de haut vol aux Émirats arabes unis. Du 8 au 12 septembre 2025, Abou Dabi, cité d’or et de pouvoir, devient le théâtre d’une diplomatie économique offensive. Loin des simples poignées de main protocolaires, cette mission incarne la nouvelle ambition du Sénégal sur l’échiquier mondial.
Pour la troisième fois hors du continent africain depuis sa prise de fonction, le chef du gouvernement pose ses valises dans un hub global, un pont entre l’Orient et l’Occident. Cette visite, soigneusement calibrée, s’inscrit dans le sillage de celle du président Bassirou Diomaye Faye en décembre 2024. Elle n’est pas un hasard. Elle est la pièce maîtresse d’un plan plus vaste, le « Jubbanti Koom » – le redressement national – dont chaque chapitre se écrit avec des partenaires de poids.
Sous le soleil émirati, M. Sonko s’entretiendra avec le président Sheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan. Les discussions auront le parfum de l’ambition et le poids du concret. Car entre le Sénégal et les EAU, l’histoire ne fait que commencer, mais elle est déjà dense. Elle se chiffre en millions de dollars, en mégawatts d’énergie solaire, en conteneurs échangés et en vies transformées par la formation.
Une coopération aux multiples visages
Les deux pays tissent leur entente sur une toile de projets structurants. Le géant portuaire DP World, pilier de l’économie émiratie, a jeté l’ancre à Dakar depuis 2008. Il ne se contente pas de gérer le terminal ; il construit l’avenir avec le futur port en eaux profondes de Ndayane, promesse de transformation du commerce ouest-africain.
L’énergie est un autre chapitre crucial. Les Émirats, en virtuoses de la transition énergétique, accompagnent le Sénégal dans le déploiement de son potentiel solaire et hydroélectrique. Le Centre Sheikh Mohammed bin Zayed pour l’innovation, à Dakar, souffle un vent de modernité sur l’entrepreneuriat local, formant la relève des PME qui porteront demain l’économie sénégalaise.
Les liens dépassent le tangible pour s’ancrer dans la connaissance. Bourses d’études, partenariats universitaires avec l’université Cheikh Anta Diop de Dakar ou l’Université Al Qasimia : les EAU investissent dans la matière grise, la ressource la plus précieuse. Même la sécurité et la justice ne sont pas en reste, avec quatre accords de coopération et un memorandum liant les forces de police des deux nations.
L’art de regarder vers demain
Cette visite n’est donc pas une simple formalité. C’est une opportunité de consolider les acquis et de tracer de nouvelles pistes. Les perspectives sont vastes : villes intelligentes, transformation agricole, renforcement du secteur privé, et programmes éducatifs pointus dans les domaines technologiques.
Ousmane Sonko, en ambassadeur d’un Sénégal sûr de son destin, négocie ainsi bien plus qu’un partenariat. Il scelle une alliance stratégique pour son pays, un pont entre Dakar et Abou Dabi qui pourrait bien devenir la route incontournable de l’émergence sénégalaise. Dans le grand jeu géoéconomique, le Sénégal joue désormais ses cartes avec une audace qui force le respect.