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A Burri, près de Khartoum, l’espoir d’un Soudan démocratique renaît

Des centaines d'hommes brandissant des drapeaux, des femmes venues avec des enfants dans les bras et de nombreux adolescents, comme…

Des centaines d’hommes brandissant des drapeaux, des femmes venues avec des enfants dans les bras et de nombreux adolescents, comme enivrés de joie, ont chanté, crié et dansé vendredi près de Khartoum, voyant renaître leur espoir d’un Soudan démocratique.

A l’aube, les généraux au pouvoir et les meneurs du mouvement de contestation qui a précipité le 11 avril la chute d’Omar el-Béchir après 30 ans de règne, se sont accordés sur une instance de transition, après plusieurs mois d’un long bras de fer.

Principal point d’achoppement des négociations entre les deux parties, la présidence de cet organe devra mener la transition pendant une période de trois ans. Elle sera finalement partagée, tenue tour à tour par les militaires et les civils.

A l’est de Khartoum, dans le quartier populaire de Burri, l’un des épicentres de la contestation, la nouvelle a été accueillie avec des chants et des tambours, lors d’un rassemblement de plusieurs centaines de personnes en fin de journée.

« Ici, on a connu des épreuves difficiles depuis le début du mouvement. Beaucoup de nos jeunes ont été poursuivis et battus par les forces de sécurité », raconte Hannan, 51 ans, venue au rassemblement avec sa fille, sa petite-fille et ses voisins.

Depuis le déclenchement le 19 décembre 2018 de la contestation pour protester contre la décision du gouvernement de tripler le prix du pain, plus d’une centaine de manifestants ont été tués, selon les protestataires.

– 100% civil –

« C’est la fin de l’ère Béchir: il doit être puni et il mérite de subir le même sort que nos martyrs », lance Israa, 18 ans, venue elle aussi au rassemblement à Burri.

Pendant une minute, les habitants de ce quartier de la banlieue de Khartoum ont observé le silence, faisant le V de la victoire en hommage aux manifestants tués, dont ceux morts le 3 juin, lors de la brutale dispersion du sit-in en face du QG de l’armée à Khartoum.

« Les barricades ne sont pas tombées, des hommes sont encore derrière », assène Mohamed, qui confie « ne pas faire confiance à cet accord, car on ne peut pas faire confiance au Conseil militaire ».

« Tant que les Forces de soutien rapide (RSF, des paramilitaires, ndlr) seront à Khartoum, rien ne changera », dit le jeune homme qui est resté des jours et des nuits au sit-in.

Les redoutées RSF, considérées par les contestataires comme une émanation des milices arabes Janjawids qui ont terrorisé le Darfour à partir de 2003, sont accusées par les protestataires d’être responsables de la mort de plusieurs dizaines de manifestants.

Enveloppée dans le long voile blanc traditionnel porté par les femmes soudanaises, qui « représente la paix », Hiba, 18 ans, montre une cicatrice encore boursouflée sur sa main. « J’ai reçu un tir de gaz lacrymogène pendant une manifestation », dit-elle, assurant que, vu le prix payé, la seule condition pour un pouvoir accepté par la population soudanaise, sera « un gouvernement 100% civil ».

Entouré d’une nuée d’enfants, Mohamed, 19 ans, dessine au pinceau le drapeau soudanais sur leurs joues. « Il faut que les plus jeunes aiment leur pays et qu’ils aient plus tard une conscience politique », explique le jeune artiste.

« Un jour, tous les Soudanais qui ont fui à l’étranger rentreront au pays. Et ce pays sera alors un beau pays », présage-t-il.

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