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Henri Joyeux, professeur contesté et aiguillon des anti-vaccins

Figure de proue des anti-vaccins, le professeur Henri Joyeux se définit comme un "lanceur d'alerte" mais est contesté par l'immense…

Figure de proue des anti-vaccins, le professeur Henri Joyeux se définit comme un « lanceur d’alerte » mais est contesté par l’immense majorité de la communauté médicale pour ses propos « sans fondement scientifique ».

Il a remporté une victoire mardi avec l’annulation en appel de sa radiation. Le Conseil national de l’Ordre des médecins, qui n’a pas été suivi par l’instance disciplinaire de l’ordre, l’accusait pourtant de « mettre en danger la santé publique » en faisant « douter la population de l’intérêt de la vaccination ».

À bientôt 73 ans -il les aura jeudi-, le controversé professeur montpelliérain se défend mordicus d’être opposé à la vaccination, et jure n’en combattre que « les abus ».

De réunions publiques en interventions sur internet, toujours tiré à quatre épingles, Henri Joyeux déroule un discours bien rodé.

Sa cible: la « dictature vaccinale », expliquait-il lors d’une conférence organisée en novembre dans un théâtre parisien, aux côtés du prix Nobel Luc Montagnier.

Ce jour-là, avec une aisance de bateleur et une bonhomie toute méridionale, le professeur Joyeux avait dénoncé « une manipulation de la population » menée par « des experts dans les ministères qui sont extrêmement proches des labos ».

« Le meilleur de tous les vaccins, c’est le lait maternel », avait-il lancé.

Le professeur Montagnier, lui, avait carrément fait un lien entre certains vaccins et des « risques de mort subite du nourrisson », ce qui n’est corroboré par aucune étude.

Les deux hommes s’étaient attiré une réplique cinglante des Académies de médecine et de pharmacie. Elles avaient protesté « avec force » contre des « propos qui ne reposent sur aucune base scientifique » et qui créent « le trouble chez les parents de jeunes enfants ».

Cancérologue et spécialiste en chirurgie viscérale, Henri Joyeux s’est d’abord fait connaître du grand public par des conseils de diététique et d’hygiène de vie, détaillés dans de nombreux livres.

En septembre 2014 et mai 2015, il publie sur internet deux pétitions contre des vaccins, qui lui valent des poursuites devant le Conseil de l’Ordre.

– Rétrograde? « Une insulte » –

La ministre de la Santé de l’époque, Marisol Touraine, s’élève alors contre ce « médecin qui s’est déclaré contre la pilule, contre l’avortement, qui a pris des positions rétrogrades sur toute une série de sujets ».

« Rétrograde, je considère ça comme une insulte », s’est-il défendu lors de l’audience en appel du 24 mai, devant la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins.

« Dire que je suis contre l’avortement, contre la pilule, c’est totalement faux », a affirmé ce père de six enfants qui a présidé de 2001 à 2013 l’association Familles de France, réputée conservatrice.

Dans le livre « La Pilule contraceptive » (2013), il exposait les dangers supposés de ce mode de contraception et accusait les autorités médicales d’entretenir le silence à ce sujet, sur fond de soupçons envers les laboratoires pharmaceutiques.

Lié à l’association IPSN (Institut pour la protection de la santé naturelle), Henri Joyeux a été épinglé pour sa proximité avec un site internet de médecines « alternatives » à vocation commerciale.

« Ses relations avec le site Santé nature innovation (SNI) étaient borderline, il a rompu totalement avec ce site », a expliqué lors de l’audience d’appel Xavier de Boisgelin, président du Conseil départemental de l’Ordre de l’Hérault.

Le Conseil départemental s’était joint à l’appel du professeur Joyeux contre sa radiation en première instance, car il la jugeait « disproportionnée ».

« En 40 ans, il a fait preuve d’une grande écoute auprès de malades souvent très graves », a souligné Xavier de Boisgelin, en louant ses « grandes qualités morales ».

Les adversaires du professeur Joyeux insistent sur le fait qu’il n’est pas qualifié pour parler des vaccins car ce n’est pas son domaine de spécialité. Mais ils savent que son passé de médecin crédibilise son discours.

Interrogé par l’AFP, Daniel Floret, vice-président de la Commission technique des vaccinations (CTV), le reconnaît: « Il n’y aurait pas de mouvements anti-vaccins s’il n’y avait pas de médecins anti-vaccins ».

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